Le publi-rédactionnel caché : "c'est possible ?"

Vincent Coquaz - - Publicité - 0 commentaires

"Nous rédigerons l'article que nous vous soumettrons. La mention "publi-rédactionnel" ne doit pas apparaître. Est-ce possible ?"

C'est la drôle de demande reçue par mail par le rédacteur en chef de Numerama, Guillaume Champeau.

"Quoi de mieux, pour illustrer le recul de l'éthique publicitaire, que cet échange d'e-mails avec une régie publicitaire qui a tenté de nous démarcher, et dont nous savions par les rumeurs du métier qu'elle travaillait de la sorte avec certains confrères (rares) ?" développe Champeau, qui reproduit l'intégralité de l'échange mail entre lui et les publicitaires, en masquant leur identité.

pictoL'échange de mails

Ce qui choque, au delà du publi-rédactionnel "classique" (que Numerama pratique par ailleurs), c'est la demande explicite de cacher le caractère publicitaire des articles rédigés par l'agence. Pour Champeau, c'est la crise de la presse en ligne (confrontée à une baisse des revenus publicitaires) qui pousse certaines agences de pub à utiliser des méthodes de plus en plus problématiques en termes d'éthique.

Mais le problème va bien au dela du dilemme déontologique : ces pratiques sont tout simplement contraires à la loi. Elles contreviennent en effet à l’Article 20 de la loi du 21 juin 2004 (on vous en parlait ici) qui dispose que "Toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. Elle doit rendre clairement identifiable la personne physique ou morale pour le compte de laquelle elle est réalisée".

"une maladresse d'une nouvelle recrue"

Après quelques recherches, il n'est pas très difficile de retrouver l'agence aux méthodes douteuses. Le mail a été envoyé à de nombreuses rédactions. Selon nos sources, il s'agit de Pull Media. Contrairement à ce que dit Numerama, ce n'est pas une régie publicitaire mais un éditeur de sites et applications mobiles, qui cherche à les promouvoir (eux, et non pas des marques clientes). Ainsi, toujours selon nos sources, les mails semblables à celui reçu par Numerama sont assez courants alors que la pratique l'est beaucoup moins : de petites agences envoient en masse ce type de mails en espérant quelques rares réponses.

Contacté par @si, son fondateur Yann Decoopman confirme que son agence est à l'origine du mail mais rejette les accusations. "On voulait faire en sorte que certains médias parlent des applis et des sites qu'on édite mais il ne s'agit pas de publi-rédactionnel. C'est une maladresse d'une nouvelle recrue. On ne pratique plus, enfin... on ne pratique pas le publi-rédactionnel sous cette forme, en raison de la législation".

L'occasion de découvrir notre dossier "Pub : les mille ruses" et notre article sur le "native advertising", ce publi-rédactionnel en (bien) pire.

Lire sur arretsurimages.net.