Bolloré : et maintenant, Maïtena Biraben...

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 125 commentaires

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Et Bolloré, encore. Croyez-moi si vous voulez, on aimerait bien, ici, parler d'autre chose

que de la conquête de Canal+ par Bolloré. Des censures des enquêtes dérangeantes pour les amis de Bolloré, du cynisme de Bolloré qui va "créer un comité d'éthique" à Canal+ (défense de rire), ou des journaux de Bolloré qui font l'éloge des émissions de Bolloré. On est au bord de la bollobsession. Et là-dessus, voilà Maïtena Biraben, icône de l'Empire, choisie par Bolloré en personne pour animer le Grand Journal, qui explique froidement sur le plateau que "les propos de la vérité sont souvent tenus par le FN aujourd'hui, rarement par le PS, très rarement par les partis classiques". Et d'insister, quelques secondes plus tard : "les Français se reconnaissent dans le discours de vérité tenu par le FN". "Les" Français ! Un discours "de vérité" ! On n'y croit d'abord pas. Mais oui. Elle l'a dit.

De deux choses l'une. Ou bien Biraben a fondu les plombs, victime de l'ouragan médiatique déchaîné depuis la rentrée, qui en aurait emporté plus d'un (e), et cela peut arriver à tout le monde ; ou bien celà signifie que la chaîne tout entière se positionne, comme on dit, dans la niche prometteuse des idiots (plus ou moins) mais toujours utiles du lepénisme. Si l'animatrice a fondu les plombs, nul doute qu'elle trouvera un moyen de le reconnaître très vite, malgré la chape de silence forcé que Bolloré fait peser sur ses nouvelles troupes. Si elle-même n'y pense pas spontanément, il est vraisemblable qu'au-dessus d'elle, on y pensera pour elle.

Mais si elle ne dit rien, et si la chaîne elle-même reste muette, il faudra bien en tirer les conclusions. Celà signifiera que la bollorisation de Canal+ n'est pas seulement l'affermage éhonté de medias puissants au service des intérêts économiques de leur propriétaire, mais qu'elle poursuit aussi un objectif idéologique très précis. Cela obligera à rassembler des éléments pour l'instant épars, comme la nomination d'un catho tradi habitué de Radio Courtoisie et défenseur des tortionnaires français en Algérie, Guillaume Zeller, à la tête de l'information du groupe, ou les fou-rires complices du trublion Eldin avec Marine Le Pen (voir la video ici, commentée par l'ami Porte). Tout cela formera un puzzle qu'il faudra bien se résoudre à nommer. Cela aura au moins, pour les sociologues et les économistes, le mérite de clarifier l'éternelle interrogation sur les objectifs (économiques ? politiques ? idéologiques ?) poursuivis par les oligarques, lorsqu'ils s'emparent des medias. On se console comme on peut.

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