Porte, quarante ans plus tard

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 218 commentaires

Télécharger la video

Télécharger la version audio

Silence ! Silence, dans la tranche du matin de France Inter, sur la mise à mort à ciel ouvert de Didier Porte.

 
Mais aussi silence dans les médias traditionnels du lundi sur l'avertissement en recommandé expédié par Val à Porte, après une chronique provocatrice (nous vous le révélions hier), avertissement ratifié quelques jours plus tard sur Canal+ par Demorand, poignardant Porte en expliquant que "ce n'est pas la radio qu'il veut faire". Comme l'Histoire se répète ! Ah, ce choeur navré de Val et Demorand ! Ah ces chastes oreilles bouleversées par le "J'encule Sarkozy" ! Ah ces voix tremblantes évoquant le mail du père d'une petite fille de huit ans, choquée, la pauvre petite, par l'insoutenable obscénité de l'humoriste ! Ah comme leurs pas filent droit, quarante ans plus tard, dans ceux des censeurs gaullistes des années 60 ! S'agissant du moine-soldat Val, à vrai dire, ce n'est pas une surprise. Mais voir Demorand commander le peloton, quelle navrante démonstration de la superiorité des mécaniques sur les esprits les plus brillants, qui ne sont pas nécessairement, c'est vrai, les âmes les plus solides.

C'est absurde, idiot, excessif, mais c'est ainsi : France Inter étant le premier média audiovisuel public à avoir eu le privilège de voir son président nommé par Sarkozy, est légitimement le thermomètre du contrôle du pouvoir sur les médias audiovisuels. Et sur France Inter, la tranche du matin, la plus écoutée. Et dans la tranche du matin, le fameux "quart d'heure" de 7 h 45 à 8 h, qui rassemble notamment la chronique politique de Thomas Legrand, la chronique économique de Philippe Lefébure, (toutes deux souvent excellentes et pertinentes) et, donc, la chronique du bouffon. Que lesdites chroniques soient plus, moins, ou moyennement réussies, en devient (c'est absurde, mais c'est la mécanique, qui a produit cette absurdité) secondaire.

Brillamment, pertinemment, Legrand analysait la semaine dernièrel'infernale tenaille du soupçon, introduite par la nomination de Hees par l'Elysée. Il détaillait parfaitement comment chaque mot, chaque point virgule, même les plus scrupuleux, en deviennent instantanément soupçonnables. Il ne s'imaginait pas, sans doute, devoir passer si vite aux travaux pratiques.

(illustration : promotion pour le duo comique Font et Val, grand producteur d'obscénités dans les années 70, opportunément exhumée par un de nos @sinautes)

Lire sur arretsurimages.net.