Israël - Hamas : "On a le devoir de ne pas censurer l'explication"

La rédaction - - Silences & censures - (In)visibilités - 74 commentaires


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Le 7 octobre, le conflit israélo-palestinien que l'on pouvait croire, sinon éteint, du moins silencieux, a violemment refait la Une de tous les journaux. Le Hamas a déployé une force de frappe inédite en pénétrant le territoire israélien dans un raid meurtrier : plus de 1 200 civils et militaires israéliens ont été tués, des dizaines sont retenus en otage à Gaza. Un séisme pour Israël. 

Le bilan est encore provisoire, mais les conséquences du 7 octobre sont déjà là. Gaza vit sous un tapis de bombes, représailles de l'État hébreu qui menace désormais d'une opération terrestre. Plus de 1 300 Palestiniens sont déjà morts dans ce pilonnage incessant. Chaque épisode de ce conflit mène aux mêmes raccourcis, aux mêmes imprécisions : l'Histoire s'efface devant l'émotion légitime, les civils d'ici ne sont pas les mêmes que ceux d'à côté, et les médias s'empêtrent dans la communication des deux camps. 

Pour tenter de donner du contexte, des explications, des pourquoi et des comment, nous recevons cette semaine Marine Vlahovic, journaliste et ancienne correspondante à Ramallah, en Cisjordanie, et Bertrand Badie, professeur émérite à Sciences Po, spécialiste des relations internationales.

Faut-il expliquer l'horreur ? 

Raphaël Enthoven, en expliquant qu'il devrait être interdit d'expliquer les actes du Hamas, a fait sursauter Bertrand Badie, qui y voit une défaite de la pensée : "Ce genre de propos me fait peur. Et ça fait référence à une démarche totalitaire. Il faut justement se demander d'où vient la barbarie, ce qui peut provoquer ce déchaînement de haine, de rage, de mépris de l'autre. Quand on est un homme responsable, on a le devoir de ne pas censurer le raisonnement."

La souffrance des Gazaouis effacée 

Dans les JT, la souffrance des habitant·es de Gaza, qui vivent depuis plusieurs jours sous un déluge de bombes, est presque absente. Parce qu'il est difficile, voire impossible, d'entrer dans Gaza pour les journalistes, et parce que les médias craignent d'amoindrir une souffrance en évoquant celle d'en face. Marine Vlahovic voit les conséquences de ce traitement sur ses contacts gazaouis : "Ils ont vraiment l'impression qu'une partie de Gaza est en train de disparaître, dont eux, dans une indifférence totale".

Contourner l'armée en zone de guerre

En Israël comme en Palestine, faire son travail de journaliste en évitant l'armée relève de la mission (presque) impossible. À Gaza, le Hamas contrôle tout, des visas aux fixeurs qui accompagnent les journalistes occidentaux. En Israël, c'est l'armée qui abreuve les rédactions d'éléments de langage, comme le raconte Marine Vlahovic : "Je suis encore inscrite sur les boucles Whatsapp (de l'armée, ndlr), et je reçois les nouvelles. Tout est fait pour que les journalistes restent assis à leur bureau".

Pour aller plus loin

- Le livre de Bertrand BadiePour une approche subjective des relations internationales, paru chez Odile Jacob.
- Le podcast de Marine Vlahovic chez Arte Radio, sur son expérience de correspondante en Palestine.
- Notre enquête sur la suppression d'un message de soutien aux Palestiniens dans le replay d'une émission de RMC. 
- Notre enquête sur une vidéo d'enfants, présentés comme des otages israéliens, qui a en réalité été tournée avant l'attaque du Hamas.


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