Affaire M'Barki : "À un moment, la hiérarchie est en cause"

La rédaction - - Investigations - Déontologie - Coups de com' - 24 commentaires


Le scandale est venu d'un nom : Rachid M'Barki. Journaliste des nuits de BFMTV, Rachid M'Barki est l'objet d'une enquête interne après la diffusion de sujets suspects dans ses journaux nocturnes, qui auraient échappé au processus habituel de contrôle éditorial. Comprendre : il a diffusé seul des informations et des images qui n'avaient pas été validées par sa chaîne hiérarchique. Mais dans quel but ? La réponse est venue de Libération d'abord, qui a révélé que certains sujets étaient en fait des commandes venues de mystérieux lobbyistes étrangers via un intermédiaire français. Au cœur de l'enquête : le royaume du Maroc, habitué des campagnes de communication offensives en France. Et puis il y a les révélations du collectif Forbidden Stories sur une entreprise israélienne, capable, dit-elle, d'interférer dans des élections à coups d'opérations de déstabilisation – si les premières révélations sont venues de Politico, en réalité, ce sont bien les journalistes du collectif qui en sont à l'origine, et avaient informé la direction de BFMTV. 

Alors qui essaie d'acheter l'info ? Le Maroc a-t-il payé pour redorer son image en France ? Quels dangers font peser sur nos démocraties ces opérations de désinformation toujours plus sophistiquées ? Autour de la table, nous recevons cette semaine Rosa Moussaoui, journaliste à l'Humanité et victime des méthodes marocaines dans l'affaire Pégasus, Vincent Coquaz, journaliste pour la rubrique CheckNews de Libération (aussi ex-journaliste d'Arrêt sur images) et Omar Brouksy, ancien correspondant de l'AFP au Maroc et auteur de nombreuses enquêtes sur le pouvoir de Mohamed VI. Il a d'ailleurs lui aussi été espionné par Rabat dans le scandale Pegasus. 

Comment BFMTV fait la com' du Maroc

Dans ses journaux de la nuit, Rachid M'Barki n'a pas hésité à faire la com' du Maroc, sur un sujet aussi sensible que le Sahara occidental, territoire disputé, mais sur lequel le royaume tente d'asseoir sa souveraineté. Une méthode inquiétante pour Rosa Moussaoui : "On martèle comme des faits établis des choses qui sont de l'ordre de la manipulation."

À BFMTV, la hiérarchie a-t-elle failli ? 

Comment Rachid M'Barki a-t-il pu diffuser plusieurs sujets échappant à tout contrôle hiérarchique sans que jamais personne, en interne, ne s'inquiète de voir ce procédé se répéter ? Une question qu'évacue pour l'instant Marc-Olivier Fogiel, le patron de la chaîne. Pour Vincent Coquaz, "la hiérarchie est en cause" dans ce détournement de l'antenne.

Dakhla, rideau sur la répression 

TF1 fait du kitesurf à Dakhla, TF1 mange des huîtres à Dakhla, mais TF1 ne rappelle jamais que Dakhla est situé dans une zone qu'officiellement le Maroc ne contrôle pas. "Le Maroc débloque des moyens démesurés pour avoir ce type de communication et masquer le conflit dont fait l'objet ce territoire", rappelle Rosa Moussaoui.

Pour aller plus loin 

- Les enquêtes de Checknews sur l'affaire M'Barki. Notre résumé de l'affaire.
- L'enquête de Rosa Moussaoui sur la situation à BFMTV, notre interview de la journaliste et de deux autres espionné·es par le Maroc via Pegasus.
- Le livre d'Omar Brouksy, Maroc : les enquêtes interdites (Nouveau Monde, 2021).
- Les enquêtes de Forbidden Stories sur plusieurs réseaux internationaux de désinformation. Celles des médias français partenaires : le Mondeà propos de M'Barki et des yachts d'oligarques russes, entre autres, ainsi que le dossier de la cellule investigation de Radio France.

Lire sur arretsurimages.net.

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