Sondages : rentrée en folie

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 75 commentaires

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Six Français sur dix ont une "mauvaise opinion" de Mélenchon

, signale, en une phrase, le journal du matin d'Europe 1. Une petite phrase minuscule, pour clore une longue séquence consacrée aux étripages entre candidats de la "primaire de la droite et du centre". Sans doute la présentatrice du journal du matin de la radio de Lagardère a-t-elle jugé judicieux d'envoyer une pichenette à gauche, après avoir consacré plusieurs minutes à taper à droite. Ses motivations lui appartiennent. Mais si elle nous avait lu hier, elle aurait appris que le sondage du Parisien (groupe LVMH) d'où est tiré ce chiffre, fournit aussi d'autres données contradictoires (entre autres, les sondés ayant une "bonne opinion" de Mélenchon ont progressé de 6% dans la dernière année, 68% des sondés lui reconnaissent "des convictions profondes", 51% le jugent "courageux", etc). Mais la chefferie du Parisien, entrainant tous ses confrères derrière lui, a choisi de titrer sur les "six sur dix". Autrement dit, sur une info parmi d'autres de ce sondage, ni plus ni moins insignifiante que toute cette profusion de statistiques que le vent emportera.

Vivent les sondages ! Deux sondages sur la "primaire de la droite et du centre" sortent à quelques heures d'intervalle. L'un donne Juppé nettement devant Sarkozy. L'autre les donne à quasi-égalité. Il faut aller fouiller au fond desdits sondages pour comprendre d'où vient la différence. Le sondage pro-Sarkozy n'a retenu que les sondés "tout à fait certains" d'aller voter à la primaire (332 personnes), tandis que le sondage pro-Juppé retenait, plus largement, "ceux comptant aller voter" (1472 personnes). D'où l'on pourrait conclure qu'environ les trois quarts des électeurs de droite "comptant aller voter" ne sont pas "tout à fait certains" d'y aller. C'est fragile, un électeur de droite. Quels obscurs calculs, quelles fiévreuses tractations, ont conduit les deux sondeurs à adopter tel critère plutôt que tel autre, on aime mieux ne pas y penser.

Les huit mois qui viennent vont déborder de chausse-trape de ce genre. Des sondages tordus aux forceps. Des pièges cachés dans les petites lignes, comme dans les contrats de surendettement. Des machineries politiques et médiatiques en folie lancées les unes contre les autres. Comment, ici, sur ce site, allons-nous en rendre compte ? Avec quelle intensité, avec quelle fréquence ? Figurez-vous qu'on se pose la question dans l'équipe. Et que l'on a même quelques débuts de réponses, dont je vous parlerai bientôt.

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