Amendement presse en ligne : rideau !
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 56 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Rideau sur l'amendement ! Cela s'est passé au coeur de la nuit :
en seconde lecture, l'Assemblée, notamment à l'initiative de députés PS proches de Manuel Valls, a rejeté l'amendement interprétatif qu'elle avait voté en première lecture. Cet amendement effaçait environ la moitié de l'ardoise fiscale de plusieurs sites de presse en ligne, dont @rrêt sur images, qui avaient appliqué dès 2008 la TVA à 2,1%. Fin du feuilleton ? Oui et non. Pour ce qui nous concerne, nous avons fait appel, la semaine dernière, de la décision du Tribunal Administratif rejetant notre recours contre nos redressements. Pour faire reconnaître notre droit, nous irons jusqu'au bout : jusqu'au Conseil d'Etat, jusqu'au Conseil constitutionnel. On tirera par la manche tous les Sages de la République. Surtout, si ce n'est pas fini, c'est grâce à vous, abonnés ou non à notre site. Sur les 540 000 euros d'arriéré fiscal que nous allons payer, vous nous avez déjà aidé à hauteur de 460 000 euros. C'est énorme. Mais on n'y est pas encore tout à fait. Alors, pour ceux qui n'ont pas encore souscrit un abonnement exceptionnel de soutien sur Ulule, il vous reste exactement trois jours, et c'est ici. Et pour ceux qui préfèrent opter pour le don défiscalisé, sur la plateforme J'aime l'info, il vous reste quinze jours, jusqu'au 31 décembre, pour pouvoir le déduire de votre impôt 2015, et c'est ici.
Parmi de nombreux désagréments, cette aventure aura au moins eu deux avantages. D'abord de nous permettre de vivre, de l'intérieur, la situation de victime d'une campagne médiatique. Pas une campagne acharnée, non. Une campagne doucereuse, qui ne ressemble pas à une campagne. Une campagne à l'insu de son plein gré. Une campagne de mots. Qui a inventé cette jolie formule "d'amnistie fiscale" ? La droite parlementaire. Très bien. Bien joué. Mais depuis le début, cette formule, l'AFP nous l'a, sans relâche, matraquée sur le front. Sans forcément penser à mal : il est vrai que ça sonne tellement mieux que l'appellation excacte d' "amendement interprétatif". Dans les derniers jours, on a même vu sortir de l'imagination d'un député de droite la formule, plus belle encore, de "cadeau de Noël à Mediapart", immédiatement reprise à son compte, elle aussi, par l'AFP. Voilà comment, sans penser à mal bien entendu, en cherchant des mots qui sonnent bien, de consciencieux confrères influencent le débat public.
Autre bénéfice collatéral de l'épisode : du coup, dans l'équipe, on a suivi à la loupe la séance de nuit à l'Assemblée. On doit être à peu près les seuls à s'infliger le supplice d'une discussion de projet de loi de finances rectificative (PLFR pour les intimes), alors que le pays entier vibre à la sortie du nouvel épisode de Star Wars. Ainsi, je suis heureux de vous apprendre que, dans la même charrette que l'amendement presse en ligne, deux autres amendements ont été enterrés par le gouvernement. L'un permettait de rendre public un "reporting fiscal" sur les entreprises françaises faisant plus de 40 millions de chiffre d'affaires annuel. Avantage : il aurait permis de connaître exactement les noms des entreprises faisant de l'optimisation fiscale. Amendement retoqué, conformément aux voeux du MEDEF, pour ne pas nuire à la "compétitivité" des entreprises françaises. Merci pour elles (pour m'éviter les reproches de partialité, voici l'opinion d'un journal libéral sur l'affaire). Autre exécuté au coeur de la nuit : un amendement permettant d'aligner les avantages des flottes d'entreprises de véhicules à essence sur ceux des flottes de véhicules diesel. Cette fois, au nom de "l'emploi". La COP 21 est finie, les affaires reprennent.