Royal : "pourquoi riez-vous ?"

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 227 commentaires

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"Pourquoi riez-vous ?" demande soudain Ségolène Royal à Patrick Cohen, sur France Inter.

C'est vrai. Pourquoi rire ? Royal est en train d'expliquer que sa candidature aux primaires, loin d'amorcer une "compétition" avec Aubry et DSK, n'a pas d'autre fonction que de rendre service à Dominique. Dominique, si vous saviez ! Avec la lourde responsabilité qui est la sienne en ce moment, devoir se coltiner tous ces amis qui prétendent parler à sa place, quel calvaire ! Si vous saviez comme ça le gêne, par rapport aux huiles du FMI. D'ailleurs, il m'a ouvert son coeur, quand nous nous sommes rencontrés l'autre jour. C'est bien simple, c'est le mieux placé d'entre nous, dans les sondages. C'est justement la raison pour laquelle je me présente. Pour lui donner de l'air. Laissons-le réfléchir. Longuement, sereinement, comme l'exigent ses lourdes responsabilités, qui lui laissent si peu de temps pour toutes ces futilités. D'ailleurs quoi qu'il arrive, il fera un excellent Premier ministre. Pourquoi vous riez ?

Résumons. Si Royal prend tout le monde de vitesse, ce n'est évidemment pas pour organiser une "compétition" (quel vilain mot) contre Martine et Dominique, mais en plein accord avec eux, pour rendre service à tout le monde, afin de parler aux Français face à face, et les yeux dans les yeux. La vraie de vraie raison ? (confie-t-elle encore à Cohen). "Les Français ne nous croient pas, quand nous disons que nous rétablirons la retraite à 60 ans". Excellente raison. Il est vrai que la perspective de s'allier avec "Dominique", enthousiaste partisan de la retraite à 60 ans, est la meilleure manière de rendre confiance au pays sur ce point précis.

Chacun décidera s'il faut rire ou non, du sketch inattendu qui s'amorce, et dont la finesse stratégique dépasse de beaucoup les modestes capacités politologues du matinaute. Mais ne rions pas trop vite. L'élection du président au suffrage universel a toujours été le meilleur mode de sélection des voyous dingos et mégalos (Mitterrand, Chirac, Sarkozy) contre les surdoués chouchous de la presse et des sondages (Rocard, Barre, Balladur, Delors, Jospin, le cimetière en est plein). Il est donc (comme toujours) conseillé de rire, en sachant que la pièce peut très bien se révéler sérieuse.

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