Maths ou Histoire ? La solution d'Alphonse
Daniel Schneidermann - - Pédagogie & éducation - Le matinaute - 117 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Autant confesser tout de suite cette lourde tare :
le matinaute d'@si est plutôt ce que l'on appelle un littéraire. Comme le dit un des matheux invités à tutoyer la ligne j@une cette semaine, je suis même "dominé par la culture littéraire." Et en cela, parfaitement représentatif de "la scène médiatico-intellectuelle", comme dit toujours notre matheux de Ligne j@une, Martin Andler (allez l'écouter, il est très convaincant).
Pour autant, en préparant l'émission de cette semaine avec Birenbaum,
il nous est apparu que nous n'aurions pas signé de nos quatre mains
réunies (notez au passage la parfaite maitrise de l'addition) la très chic pétition des historiens et intellectuels,
protestant contre la suppression de l'Histoire dans les terminales
scientifiques. Oui, cette pétition exprime pour une part la réaction de
la bonne bourgeoisie, désireuse que ses enfants, ceux qui sont admis en
S et destinés aux belles carrières de l'industrie et du commerce,
continuent d'avoir le beurre de la compétence scientifique et l'argent du beurre, le vernis des humanités. Oui, l'oreille
complaisante que leur prête la plupart des journalistes, est
certainement due à la surreprésentation écrasante des littéraires dans
la corporation journalistique. La posture anti-intellectuelle
congénitale du sarkozysme a fait le reste. Tentons un exercice de
pétitionnisme-fiction : si un irréprochable ministre de gauche avait
proposé la même réforme, en argumentant de manière sincère et
convaincante sur la nécessité de sauver les filières littéraires, la
pétition eût-elle réuni toutes ces belles signatures ? (Merci de noter
aussi la virtuosité dans l'emploi matinal du passé antérieur conditionnel passé deuxième forme, merci aux vigilants).
La surreprésentation des littéraires est d'ailleurs (mais c'est un autre sujet) une des tares du journalisme français, toujours prompt à s'enflammer sur la princesse de Clèves ou Guy Môquet, mais toujours ramené à sa cancritude sur le climat, le génome ou les mutations d'un virus, et donc incapable d'expliquer clairement ces questions. La solution ? Un autre invité de notre émission, le président de l'association des profs d'histoire-géo, Hubert Tison, suggère une piste inattendue : développer l'étude de... l'histoire des sciences. Eurêka : mettre de l'Histoire dans les sciences, et des sciences dans l'Histoire. Piste prometteuse, que n'eût (bis) pas renié Alphonse Allais, inventeur de l'idée de construire les villes à la campagne, découvreur de la part permanente de loufoque dans le sérieux et inversement, génie insuffisamment enseigné au lycée, toutes sections confondues.