Entre-soi : "Avec Macron, la violence des riches ne se cache plus" [Avent2020]

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Riverains, carte scolaire, logement social : Monique Pinçon-Charlot et Ian Brossat


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Liberté, égalité, fraternité, oui bien sûr ! Mais chacun dans son quartier, chacun dans son immeuble, dans son école, entouré de barrières invisibles. Comment se développent les stratégies de l’entre-soi ? C’est l’objet de notre émission où nous revenons sur une affaire ultramédiatisée, la révolte des habitants du 16e arrondissement de Paris contre l’implantation d’un centre d’hébergement d’urgence à la lisière du bois de Boulogne, avec deux invités : Monique Pinçon-Charlot, sociologue, auteure du livre Panique dans le 16e (La ville brûle), co-écrit avec son mari Michel Pinçon et le dessinateur Etienne Lécroart, et Ian Brossat, adjoint (PCF) à la Maire de Paris en charge du logement et de l'hébergement d'urgence. Et aussi notre chroniqueuse historienne Mathilde Larrère.


Acte 1

"Salope", "mon cul", "facho" : les insultes ont fusé lors de la réunion du 14 mars 2016 à l’université Paris-Dauphine où la mairie de Paris, représentée par Ian Brossat, venait présenter le projet d’implantation d’un centre d’hébergement d’urgence dans le 16e arrondissement, près du bois de Boulogne. Présents sur scène : la préfète Sophie Brocas et l’architecte Guillaume Hannoun. Dans la salle : Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, mais aussi le maire du 16e Claude Goasguen ou encore Christophe Blanchard-Dignac, vice-président de la coordination pour la sauvegarde du bois de Boulogne, et bien sûr de riches riverains fous furieux. Arguments avancés par les riverains : le centre va dévaluer les biens, le bois de Boulogne ne sera plus en sécurité. La violence verbale s’est libérée, surtout depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron, estime Pinçon-Charlot.

Acte 2

Autres arguments des riverains : ce n’est pas un quartier pour les SDF, et la maire Anne Hildago n’aime pas les riches. Brossat assume : ce centre est un choix politique. Il y a plus de mille places d’hébergement d’urgence dans le 18e, pourquoi pas dans le 16e ? Avant la réunion, les journalistes demandaient comment protéger les habitants des sans-abris, après, c’était l’inverse : comment protéger les sans-abris des habitants ? Pour le président de l’association de sauvegarde du Bois de Boulogne Lionel Lemaire, invité de Nicolas Poincaré sur France 2, la réunion a été détournée par des casseurs. Pinçon-Charlot n’y croit pas, et rappelle que les riches se "foutent de la bonne foi" : ils sont à court d’arguments, donc multiplient les pilonages, dit-elle. Mathilde Larrère raconte que les riches ont quitté le centre de Paris à cause des révoltes et de l’épidémie de choléra de 1832.

Acte 3

Ces stratégies de l’entre-soi sont-elles réservées aux très riches ? Avec la triche à la carte scolaire, dépeinte par le journaliste de Libération Michel Becquembois, les classes moyennes usent-elles de la même stratégie ? Pour y remédier, la mairie de Paris a réuni dans le 18e arrondissement deux collèges, un huppé et un populaire. Brossat loue la mixité sociale, mais les conclusions des travaux des Pinçon-Charlot sont plus nuancées. Exemple à Nantes, au Sillon de Bretagne, bâtiment de 900 logements qui devait accueillir cadres et ouvriers. Au bout de dix ans, alors que tout le monde était mélangé, chaque classe sociale s’est finalement regroupée. La proximité physique "exacerbe les distances sociales au lieu de les rapprocher" conclut la sociologue. Pourtant, le centre d’hébergement du 16e est une réussite, et les habitants ont même apporté des vêtements de marque, assure Brossat. Certes, mais les enfants n’osent pas sortir, répond la sociologue.

Acte 4

La mairie de Paris favorise-t-elle l’accès des logements sociaux aux classes moyennes, comme l’assure un reportage de Capital ? Si on a envie que les profs se logent à Paris, répond Brossat, et tant que les loyers dans le privé ne sont pas encadrés, il faut leur réserver des logements. Avant de préciser que le reportage de M6 était malhonnête. Que penser de l'implantation de la brasserie Barbès où les prix prohibitifs excluent les pauvres ? Pour Mathilde, cela contribue à la gentrification, comme illustrée dans le livre d’Anne Clerval, Paris sans le peuple. Le quartier de la Goutte d’or, avec sa forte densité de logements sociaux, reste très populaire, rétorque Brossat. La sociologue souligne que la désindustrialisation a vidé Paris de ces ouvriers et employés. Retour au Bois de Boulogne où il existe des enclaves privées : la fondation Louis Vuitton, le Lagardère Racing Club, le Jardin d’acclimatation dont le concessionnaire est Bernard Arnault. "On assiste à une LVMHisation du Bois de Boulogne", conclut la sociologue.

Acte5

On termine avec la chronique de Mathilde qui revient sur l’ordonnance de Villers-Cotterêts, et une belle leçon d’histoire donnée à Macron et Stéphane Bern, tout nouveau "monsieur Patrimoine".

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