Caroline Fourest vole au secours de Marlène Schiappa
Paul Aveline - - Coups de com' - Les énervé·es - 22 commentaires
Caroline Fourest a moyennement apprécié que deux enquêtes simultanées de France 2 et Marianne viennent jeter le discrédit sur Marlène Schiappa et le fonds Marianne (aucun lien avec le magazine). Dans un édito publié dans Franc-Tireur(le magazine de la "gauche" tendance Manuel Valls) l'essayiste joue les torera pour sauver la ministre : agiter le chiffon rouge de l'islamisme pour faire oublier l'argent public. Caroline Fourest écrit : "On est loin du complot politique ou du «scandale d'État». Que le RN et des sénateurs de gauche feignent d'y croire et demandent une commission d'enquête, c'est le jeu. Ce que je ne m'explique pas, c'est l'emballement, la rage, les menaces et les insultes." Et d'ajouter : "Décidément, celles et ceux qui résistent aux islamistes auront tout enduré : menaces, procès d'intention et maintenant procès en association." Hop, oubliés les centaines de milliers d'euros au coeur du scandale. Ceux qui se posent des questions sont peut-être, au fond, un peu complices des islamistes. Tu parles d'un "procès en association".
Un esprit taquin - pas notre genre - noterait d'abord que si Caroline Fourest s'en prend à une enquête de Marianne (le magazine, pas le fonds), ce n'est peut-être pas un hasard : l'éditorialiste et son ancienne crèmerie se sont quittées en très mauvais termes, nous l'avions raconté ici. Un esprit encore plus taquin se plongerait dans les archives de la relation qui unit la ministre et la polémiste. Sur le compte Instagram de Fourest, on retrouve ainsi les deux femmes posant pour les photographes le jour de la remise à l'une par l'autre de la médaille de Chevalier de l'ordre du Mérite, le 3 juillet 2021 (en présence de nulle autre que Brigitte Macron).
Difficile également de ne pas relever, comme l'a fait Mediapart, que Caroline Fourest a été consultée par Marlène Schiappa dans le cadre des préparatifs de la "loi séparatisme". Consultée au même titre que Mohamed Sifaoui, mis en cause dans l'enquête de Marianne et France 2. Mohamed Sifaoui que Fourest gratifie du titre de "spécialiste de l'islamisme" dans son édito. Fourest n'a pas dû apprécier le rappel du site d'investigation. Il y en avait pourtant d'autres à faire. On se souviendrait ainsi que Marlène Schiappa avait prononcé un discours lors de la projection du film de Fourest, "Soeurs d'armes", à l'Assemblée nationale en 2019 ; que Fourest avait participé au lancement des "États généraux de la laïcité" créés par Marlène Schiappa en avril 2021 ; enfin, que ce n'est pas la première fois que Caroline Fourest entre dans l'arène pour défendre sa ministre préférée. Il y a quelques semaines, Schiappa tapait du poing sur le plateau de C ce soir. Face à Andréa Bescond, qui lui reprochait son inaction sur le sujet des violences faites aux femmes, la ministre s'emportait et menaçait de quitter le plateau. Là encore, Fourest se jette face au taureau : "Que peut répondre une responsable politique quand on lui jette à la face, avec haine, qu'elle n'a rien fait contre «l'impunité des violeurs», qu'elle devrait avoir honte et démissionner ?"
Alors on pourrait sourire devant tant d'héroïsme et se dire que si Caroline Fourest veut défendre à tout prix Marlène Schiappa, grand bien lui fasse, l'amitié c'est l'amitié. Ça ne passe pas inaperçu, la ministre a même relayé le texte dans sa story Instagram. On se serre les coudes, on a l'habitude.
Mais en fait de défendre Schiappa, Fourest profite aussi de sa tribune pour agonir ses ennemis du moment, la Ligue des droits de l'Homme (LDH) : "Au même moment, il semble interdit de s'interroger sur l'argent public reçu par la Ligue des droits de l'Homme (500 000 euros chaque année), ouvertement passée de la défense du capitaine Dreyfus à celle de frère Tariq et des séparatistes. Question de priorité." La LDH, nouvelle cible de Gérald Darmanin qui n'a pas supporté que l'association remette en cause sa vision du maintien de l'ordre. S'offrant au passage un coup de pub à peu de frais - "Frère Tariq" est le nom d'un livre de Fourest- l'éditorialiste met ses pas dans ceux du gouvernement pour planter ses banderilles dans le dos de la LDH : "Si scandale il y a, il est pourtant à chercher du côté des collectivités qui continuent à financer des organisations fragilisant la République et la laïcité."
La conclusion de Caroline Fourest vaut également le détour : "Voilà le vrai scandale. Constater que les attentats tout juste passés et les cadavres à peine froids toutes les initiatives prises pour endiguer le séparatisme sont en passe d'être salies ou enterrées." Le problème quand on raconte n'importe quoi, c'est qu'on finit par s'en prendre à tout le monde, et pas n'importe qui. Comme à la famille de Samuel Paty, qui juge toute l'affaire comme "une insulte à la mémoire" du professeur assassiné, et réclame l'ouverture d'une enquête. Ils ont dû mal comprendre eux aussi. Finalement, de cet édito de Fourest, il ne fallait garder que le titre : "Marianne : qui touche le fond ?"