Sarkozy sauve la presse
Daniel Schneidermann - - Financement des medias - Le matinaute - 32 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Entre deux réunions de travail, portes ouvertes et en bras de chemise
, pour sauver l'économie mondiale, Sarkozy sauve donc la presse, reçue en grande pompe à l'Elysée. La recette est connue. Pour retrouver les lecteurs perdus en route, il faut de grands groupes ren-tables. Vivement qu'on retrouve Askolovitch, non seulement sur Europe 1 le matin et au JDD, le dimanche mais aussi le soir, présentant le jité d'une grande chaine. Vivement qu'on permette à Dassault d'acheter une télé, pour y diffuser l'interview caviardée, dans laquelle son ami Poutine remercie Sarkozy d'avoir sauvé la paix mondiale. Et vivement que Bouygues puisse acheter un journal, pour y évacuer Ferrari en douceur, à la rubrique "success stories". |
La presse quotidienne nationale de ce matin se saisit de ces belles intentions, ne sachant pas trop qu'en penser. Les bienveillants diront qu'elle attend pour voir. Les malveillants assureront qu'elle attend de savoir de quel prix sera payée sa neutralité dans les grandes manoeuvres. En tout cas, elle excelle à faire "comme si de rien n'était". Comme si le président de la République, au-dessus des partis et des basses contingences, n'ayant en vue que l'intérêt général, ne souhaitait rien tant que sauver la presse malade.
Et les lecteurs perdus en route ? Les lecteurs regardent. Les lecteurs voient la main jeter le grain à la volaille (car les lecteurs voient tout, on ne sait trop comment, miraculeusement, mais ils voient tout). Et pourquoi les lecteurs recommenceraient-ils à acheter ? Les lecteurs, créatures primaires, se doutent bien que la volaille ne mordra pas la main qui la nourrit, ou bien pour de mauvaises raisons, par rancune, lorsque la manne se tarira. Il est donc à craindre que les lecteurs perdus ne soient pas prêts à retrouver le chemin des kiosques, quand bien même on triplerait le nombre de kiosques,et on les ouvrirait la nuit.