Plenel Sarkozy, même combat ?

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 91 commentaires

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752 millions d'euros par mois : c'est l'astreinte que devrait payer Mediapart

, si la décision de la Cour d'appel de Versailles était appliquée, décision tombée hier, et qui oblige le site à retirer, non seulement tous ses enregistrements Bettencourt, mais tous les articles reprenant peu ou prou ces enregistrements. Comme le révèle le directeur de la rédaction du site, François Bonnet, qui a calculé l'astreinte au doigt mouillé (ne dramatisons pas, c'est peut-être seulement 750, ils en rajoutent toujours, c'est bien connu) "nous ne les avons pas". Pas de panique : l'arrêt de la Cour d'appel n'est pas encore exécutoire. Il faut encore que les plaignants (le gestionnaire de fortune de Maistre, la famille Bettencourt) le fassent exécuter. Et si ce devait être le cas, si Mediapart devait vraiment en être réduit à mettre hors ligne tout son dossier Bettencourt, alors plusieurs médias en ligne (et @si dans les premiers, bien entendu), se sont dès hier proposés de l'héberger, en accès libre naturellement. Peut-être aurez-vous de la lecture, beaucoup de lecture supplémentaire cet été (en attendant, notre dossier est ici).

Ce qui est frappant, dans cet incroyable arrêt de la Cour d'appel de Versailles, c'est qu'il suscite si peu de réactions chez les confrères de Mediapart. Pas un mot ce matin sur France Inter, par exemple, tout occupé il est vrai avec les deux gros morceaux de la journée d'hier : le rejet par le Conseil constitutionnel des comptes de campagne de Sarkozy, et la conférence de presse de Delphine Batho. Pourtant, on n'est plus en 2010. Plus personne, dans les rédactions installées, n'ignore l'existence de Mediapart. Depuis l'affaire Cahuzac, Plenel, Arfi, Mauduit, squattent tous les plateaux télé. Mais rien à faire : on dirait qu'ils énervent encore. Qu'ils soient victimes, comme hier, d'un coup de bambou judiciaire, et tout se passe comme si bien des confrères ne pouvaient s'empêcher, à voix basse, de grommeler un "ils l'ont bien cherché".

Simultanément, tombait hier la nouvelle du rejet des comptes de campagne de Sarkozy. En substance, il aurait dû intégrer dans ses frais de campagne l'organisation de deux meetings, et quelques autres faux frais négligeables, acquittés par l'UMP. La décision est sévère. Aussi sévère que celle qui a frappé Mediapart. L'UMP pourrait bien ne pas s'en relever. Et les parallèles sont tentants. Dans les deux cas, les juges ont, comment dire, usé d'une large faculté d'appréciation. Entre les deux impératifs contradictoires de la protection de la vie privée, et de l'information du public, les juges de Versailles auraient aussi bien pu juger l'inverse (d'ailleurs, d'autres juges, précédemment, avaient jugé l'inverse). Quant au Conseil constitutionnel, il aurait pu placer différemment le curseur, pour séparer dépenses politiques, et dépenses de campagne. Donc, belle découverte, les juges ne se contentent pas d'appliquer la loi, ils l'interprètent. Alors, Sarkozy-Plenel, même combat ? Une différence de taille : les juges du Conseil constitutionnel expliquent, argumentent. Pas ceux de la Cour de Versailles. Pour le reste, chacun conclura ce qu'il voudra.

(Et le matinaute, après décision spéciale de son tribunal particulier, se met en vacances à partir d'aujourd'hui. Ce qui ne m'empêchera pas de revenir dans d'autres espaces du site, mais à des horaires plus compatibles avec la reconstitution de ma force de travail).

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