Marion Maréchal (Le Pen) et la loi ELAN

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 39 commentaires

De quoi débattent nos éditorialistes vedettes ? De Marion Maréchal-Le Pen. Ou de Marion Maréchal Tout court. Que veut-elle ? Que cherche-t-elle ? Grave question : si Marion Maréchal Toucourt a amputé ses comptes de réseaux sociaux du patronyme Le Pen, est-ce pour faire oublier la référence à sa tante, ou bien à son grand-père ? Vous ne regardez pas ces débats, mais je vous jure que je n'invente rien. Regardez le montage réalisé par Manuel Vicuña : tout est vrai ! Aucune fake image. Des heures et des heures d'antenne, consacrées à ce personnage dépourvu de tout mandat électif. Dans dix ans, il sera bien temps de se demander comment "lémédias" ont créé le monstre. On y assiste en direct. C'est maintenant, sous nos yeux.

Double peine : pendant que l'on bavarde de Marion Toucourt, on ne parle pas du reste. Au hasard, la loi ELAN. Honnêtement, avez-vous entendu parler de la loi ELAN ? Portée par le ministre de l'Egalité des Territoires Jacques Mezard, et son secrétaire d'Etat Julien Denormandie, elle vise à créer un "choc de l'offre" en matière de logement, en creusant en douce des brêches dans la loi Littoral, dans la loi SRU sur les quotas de logements sociaux, et dans la loi sur l'accessibilité des logements neufs aux handicapés (seuls 10% des nouveaux logements, contre 100% auparavant, devront être accessibles, ce que BFM présente comme ci-dessous).

Depuis des mois, des maires protestent. Les handicapés protestent. Les écolos protestent. Les architectes protestent (ou, parce qu'il est aussi question, dans cette loi, de se passer d'architectes dans la construction de HLM. On ne va tout de même pas payer des gens pour rendre vivables les bétaillères où s'entasseront les pas grand chose et les moins que rien).  Quel écho ont trouvé toutes ces protestations ? Aucun.

Je vous en parle ce matin, parce que mon oeil a été attiré par le titre-choc d'un article de Tonino Serafini, le spécialiste logement de LibéLes démolisseurs.  Cet article est peut-être excessif. Honnêtement, ce matin, je n'en sais rien. Un exemple : si Serafini assure que les députés ont bien voté une brêche dans la loi Littoral, qui permettra de bétonner les "dents creuses"(quelle belle appellation, les "dents creuses" ! Ah oui, rétablissons d'urgence le beau sourire de béton du littoral ! Comblons les "dents creuses") en revanche, Le Monde, deux jours plus tôt, affirmait que les députés LREM avaient finalement reculé devant les oppositions unanimes (premier recul depuis le début du quinquennat). 

Si même les journalistes spécialisés n'arrivent pas à suivre, ce n'est pas un hasard. C'est parce qu'aucun oeil humain ne peut suivre le train fou du macronisme, qui enchaîne séances de nuit et votes de week-end. Relisez ce que racontait François Ruffin sur les circonstances précises du fameux vote sur le Glyphosate. Pour en revenir aux chaînes d'info, on comprend qu'il soit mille fois plus simple de disserter sur Marion Toucourt, ce dont elles ne se privent pas.

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