Les présidents et la guerre

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 67 commentaires

Du kaleidoscope d'images du 14 juillet, celle qui surnage dans mon esprit c'est celle-ci, cette vidéo de six secondes...

...où Brigitte Macron traine son mari par la main, dans la fête foraine des Tuileries, pour l'attirer loin des passants qui le conspuent, six secondes qui ne veulent rien dire en elles-même, ne disent rien des secondes précédentes et des secondes suivantes, sauf qu'elles rappellent une autre scène visuellement similaire.


Cette image de petit toutou tiré par la laisse. Juste au moment où Macron, à la télévision, évoque avec Darmanin cette discussion "d'homme à homme", dont je parlais hier. Juste au moment où se manifeste ainsi leur inconscience commune de dominants. Est-ce possible que ce soit le même ? C'est le même. Des dominants qui n'ont plus la biographie de leur domination.  

A propos de Darmanin, Claude Askolovitch a publié un texte écoeurant de romantisation et de banalisation de la culture du viol, mais dont un passage m'a pourtant frappé : parmi les présidents de la Cinquième République, il y a ceux qui ont fait la guerre, et les autres. Ceux qui ont combattu sous l'uniforme dans la seconde guerre mondiale (De Gaulle, Giscard, Mitterrand) ou la guerre d'Algérie (Chirac), et les autres (Sarkozy, Hollande, Macron). 

Ce passage me trotte dans la tête. Et il me faut bien m'avouer quelque chose : les seuls présidents que j'ai pris au sérieux, que j'ai respectés, même si leurs décisions m'ont parfois révolté, sont les premiers. Les trois derniers, même quand ils "investissent le champ du régalien", comme on dit, même quand ils commandent une police surarmée, même quand ils ordonnent des assassinats ciblés, même quand ils s'efforcent à la raideur devant les cercueils de la cour des Invalides, je n'arrive pas à les regarder autrement que comme des présidents de Monopoly. Je vous laisse avec ce constat, qui atterre l'antimilitariste instinctif que je suis, ne sachant s'il en dit davantage sur mon inconscient viriliste, ou sur ces institutions de la Cinquième République, et sur lequel je vais tenter de réfléchir.


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