Le Maire et "nos femmes" : l'accident qui devait arriver

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 54 commentaires

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Soulagement général après l'affaire "nos femmes". Le tweet de BFMTV était erronné, la chaîne a rectifié

, s'est excusée auprès de Bruno Le Maire et des internautes, la vérité a été rétablie, tout va bien. Affaire bouclée. On passe à autre chose. L'incendie, cette fois, a été contenu : pendant quelques heures, un petit noyau de journalistes et de politiques-twittos s'est emballé autour d'une citation fausse d'un responsable politique. Toute l'affaire est racontée ici.

Pourquoi cet emballement ? Comme tous les emballements, parce que son objet, faute d'être "vrai", était vraisemblable. L'emploi de ce possessif, avec sa connotation sexiste, était vraisemblable. D'abord, il touche à un sujet (le degré de visibilité acceptable du corps féminin) sur lequel la classe politique, depuis plusieurs jours, exerce son éloquence. Ensuite, il vient rencontrer un immense inexprimé : le machisme permanent de la classe politique française, en dépit de la visibilité de nombreuses dirigeantes politiques, machisme qu'exprime d'ailleurs la photo ci-dessous (prise l'an dernier) également forwardée sur Twitter, la même après-midi. L'absence cruelle de femmes sur cette photo confirme (en creux) le sexisme de Les Républicains. Le possessif fatal est cohérent avec cette photo. Comme le rappelle Libé (sur la foi d'un Tweet, hum, méfions-nous !) Bruno Le Maire lui-même ne savait pas qu'il était accusé à tort.

Bref, l'accident devait arriver. L'erreur était flagrante, elle a été corrigée. Tout va bien. Mais l'écho médiatique accordé au "problème du burkini", en général, repose-t-il vraiment sur davantage de réalité ? Quand le moindre fait-divers (comme la récente échauffourée en Corse) est rattaché à tort, dans les premiers articles, au port de burkini, quand les chaînes de télé sont contraintes d'utiliser des images d'archives, faute de trouver sur les plages assez de burkinis "réels" pour illustrer les sujets sur la polémique-reine de la fin d'été, n'est-on pas dans le même phénomène ? On peut certes prouver que Le Maire n'as pas prononcé le "nos", tandis qu'il est impossible d'établir une statistique irréfutable sur le port de burkinis sur les plages françaises. Pourtant, dans les deux cas, entre ces deux exemples d'un débat public décorrelé de toute réalité, il y a une différence de dégré, pas de nature.

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