La tyrannie, c'est les autres

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 97 commentaires

La démocratie ne fait plus rêver, alerte dans Le Mondel'éditorialiste Alain Frachon, spécialiste des questions internationales. Partout dans le monde, l'idéal démocratique est en recul, tandis que progresse l'attrait de la tyrannie.  Pas toujours sous forme aiguë, notez bien. Il existe aussi, comme en Hongrie ou en Pologne, des "formes plus ou moins bénignes du virus autocratique". Perspicaces remarques. Utile article.

Le même jour, on apprend que la journaliste du Monde Ariane Chemin, qui a révélé le scandale du nervi de l'Elysée Benalla, est convoquée la semaine prochaine par la DGSI, sur demande du procureur nommé par le gouvernement (après les journalistes de Disclose, que nous recevions la semaine dernière). Il lui est reproché d'avoir publié des informations "qui pourraient conduire, directement ou indirectement, à l’identification d’une personne comme membre des unités des forces spéciales". Le même jour, toujours dans Le Monde, on apprend aussi par exemple que le pouvoir, paniqué par la menace d'un référendum d'initiative partagée sur son projet de privatisation d'Aéroports de Paris, manigance de restreindre encore ce recours aux référendums : aucun référendum ne serait plus possible dans les "trois ou quatre ans" après l'adoption d'une loi. Une porte à peine entrouverte, c'était déjà trop.

Je relis cet éditorial sur la fatigue démocratique. J'y cherche en vain une allusion à la situation française. Il y est question de Budapest, de Varsovie, de l'Egypte, du Chili, de la Corée du Nord, de l'Arabie Saoudite, de la Chine, de Poutine (en photo). Pas un mot sur la France, les menaces sur la presse, les tentatives d'étouffement de l'expression populaire, l'impunité policière dans la répression du mouvement des Gilets jaunes. Les "formes plus ou moins bénignes du virus autocratique" s'arrêtent aux frontières françaises. La fatigue démocratique, c'est les autres.

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