Je nationalise, tu nationalises, l'Europe nationalise...

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 53 commentaires

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C'est le grand matin des sarkolâtres, des eurolâtres, et des étatolâtres.

 

Ce ne sont pas toujours les mêmes, mais les trois troupes jubilent. Comment Sarko a sauvé le monde, demandez le programme ! Comment l'Europe s'est dépassée dans la crise, tous les détails ! Comment le bling bling Sarko et la très libérale Europe sont allés en procession brûler des cierges à la vieille icône poussiéreuse, Sainte Nationalisation, admirez le vitrail ! Laissons au défoulement collectif ces heures, ces minutes. Personne ne sait de quoi la journée sera faite.

A force de se coordonner à quatre, à sept, à quinze, la coordination de ce week-end a donc accouché, avec quelques jours de retard, d'une solution "à la Gordon Brown": nationaliser les banques quand ce sera nécessaire. C'est Brown qui aura donc montré la voie, n'en déplaise aux sarkolâtres, aux eurolâtres, et aux étatolâtres. Mieux eût valu quelques jours plus tôt, mais la seule idée de "nationaliser les banques", pour des libéraux, doit faire naître de lourdes réticences psychologiques.

On en revient toujours là: le plus dur n'est pas de faire volte-face, mais d'apostasier, de reconnaître publiquement que ses dogmes étaient vermoulus. Mitterrand, en 1983, après avoir distribué du pouvoir d'achat, revint à l'orthodoxie financière européenne, mais refusa toujours de reconnaitre publiquement qu'il avait changé de politique (les socialistes en supportent encore les conséquences aujourd'hui). Nationaliser des banques, pour des libéraux, n'est que la première moitié du chemin. Cela convaincra peut-être les banquiers. Restera, ensuite, le plus dur: poser les mots sur l'acte. Evoquant pudiquement dimanche ses "convictions d'origine", auxquelles il a fallu faire violence, Sarkozy a engagé un orteil dans la voie. Jusqu'où ira-t-il ?

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