Toyota, la Chine, la chanteuse, et les tweets de Trump (Washington Post)

Juliette Gramaglia - - Nouveaux medias - 0 commentaires

Quelle influence a véritablement le compte Twitter de Trump ? Le Washington Post, opposant au candidat républicain pendant la campagne, a analysé l'impact de certains des tweets du président élu au cours de la première semaine 2017. Conclusion : avec son compte, auquel sont abonnés plus de 19 millions de personnes, Trump fait couler le cours des actions des entreprises qu'il attaque - et tente de créer de nouvelles tendances dans la musique.

Une semaine avec le compte Twitter de Donald Trump. Après avoir lancé une application qui fact-checke Trump sur le compte Twitter de ce dernier, le Washington Post a étudié les répercussions des tweets du président élu, à quelques jours de son investiture. Conclusion du quotidien, qui s'est toujours fortement opposé au Républicain : en une semaine, Trump, qui se décrit comme le "Hemingway de Twitter", a "attisé les angoisses, bougé les marchés et modifié des plans".

"Comment un semaine de tweets de Trump a attisé l'angoisse, bougé les marché et modifié des plans",
Washington Post, 7 janvier 2017

A quoi ressemble cet emballement autour des déclarations de Trump, dont la portée dépasse largement les réseaux sociaux ? Le Post a relevé plusieurs exemples marquants. Sur le thème des délocalisations, d'abord, pratique à laquelle Trump s'oppose officiellement (même si les marques qui portent son nom la pratiquent). Le 5 janvier, Trump a affirmé dans un tweet repris plus de 32 000 fois : "Toyota Motor a déclaré qu'il allait construire un nouveau site à Baja, au Mexique, pour construire des voitures Corolla pour les Etats-Unis. Hors de question ! Construisez des sites aux États-Unis ou payez des taxes élevées aux frontières". Une déclaration qui a obligé Toyota à publier, deux heures à peine plus tard, un communiqué affirmant que le site de Baja était là en appui de celui de San Antonio (Texas) et que les emplois aux États-Unis ne décroitraient pas. Las. "Ce n'était pas assez pour effacer les dégâts causés par le message de Trump", déplore le Post. Car même après qu'un haut responsable japonais a affirmé que les États-Unis étaient un partenaire important pour Toyota, le cours des actions de l'entreprise n'a cessé de chuter.

Tweet de Trump, 5 janvier
Retweeté 32 340 fois, plus de 20 000 réponses

Toyota n'était pas la première entreprise victime cette semaine des attaques de Trump : lundi 2 janvier, General Motors avait été accusée de construire ses Chevy Cruze au Mexique, ce qu'elle avait dû démentir dans un communiqué - après que, là aussi, le cours de ses actions ait chuté.

De la promo pour la chanteuse invitée à son investiture

Quand Trump n'est pas occupé à s'en prendre à des compagnies, il fait aussi de la promotion. Pour Jackie Evancho, par exemple. Cette dernière est "une chanteuse à peine connue de 16 ans dont le plus grand exploit pour le moment est d'avoir été une participante à l'émission de téléréalité «America's Got Talent»", la décrit le Washington Post. Et surtout, elle a été choisie par Trump pour chanter l'hymne national pendant la cérémonie d'investiture, le 20 janvier prochain. Mercredi 4 janvier, ce dernier à tweeté : "Les ventes de l'album ont explosé après qu'elle ait annoncé sa performance à l'investiture. Certaines personnes ne comprennent juste pas le «mouvement»".

Effet immédiat : en quelques heures, les recherches à propos d'Evancho ont quadruplé sur Google, raconte le Post. Quant aux journalistes, ils se sont empressés d'essayer de vérifier l'affirmation de Trump en appelant l'agente de la chanteuse. Trump disait-il vrai ? Le Washington Post l'admet de son côté, "les ventes d'Evancho ont augmenté depuis son annonce le 14 décembre qu'elle allait chanter à l'investiture. Mais, continue le quotidien, la raison n'est pas claire. Son dernier album, Someday at Christmas, est un album de fêtes, dont les ventes augmentent toujours en décembre". Peu importe la raison pour laquelle les ventes ont augmenté, conclut le Post, Trump a réussi son coup de communication : "L'agente [de la chanteuse, ndlr] attribue à Trump le mérite d'avoir généré un intérêt grand public pour Evancho". Car, affirme l'agente, toutes les grandes télévisions américaines, ABC, CBS ou Fox News, l'ont appelée pour décrocher une interview avec la chanteuse.

L'agacement à l'étranger

Si Trump est capable de générer énormément d'attention sur un sujet, ses tweets péremptoires, entachés d'inexactitudes, agacent aussi à l'étranger : "En Chine, par exemple, raconte le Post, un média d’État a récemment tancé Trump pour sa «politique Twitter envers l'étranger», qualifiée de«jeu d'enfant». Une attaque qui pourrait bien faire suite à la remarque du Républicain sur la récupération d'un drone américain par la Chine, un acte qualifié de "sans précédent" par ce dernier. Le Post rappelle d'ailleurs avec une certaine délectation que ce tweet, dans sa première version, contenait une grosse faute d'orthographe : "unprecedented" avait été écrit "unpresidented" ("inprésidenté"). Cette première version a ensuite été supprimée, et remplacée par la version bien orthographiée.

L'influence majeure des tweets de Trump est reconnue par sa propre équipe : le futur attaché de presse de la Maison Blanche Sean Spicer a confié au Post qu'il regardait "en premier" le compte de Trump en se levant le matin, "car c'est ce qui va faire les actualités [de la journée, ndlr]". Et ce n'est pas prêt de s'arrêter : après son investiture, le président élu n'a pas l'intention de cesser de communiquer sur son canal favori.

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