Sarkozy/Kadhafi : Arfi (Mediapart) dénonce le silence de l'AFP

Sébastien Rochat - - 0 commentaires

Il n'y aura pas de dépêche AFP sur les dernières révélations de Mediapart sur le supposé financement libyen de la campagne de Sarkozy en 2007.

C'est ce que déplore le journaliste de Mediapart, Fabrice Arfi, dans un commentaire publié au bas de son article, relayé ensuite sur Twitter : "l'Agence France Presse (AFP) m'a fait savoir par écrit aujourd'hui qu' « après lecture attentive » de cet article les conclusions des quatre experts sur l'authenticité du document libyen n'étaient pas une information digne d'être reprise et de faire l'objet d'une dépêche. D'où la faible reprise de cette révélation à la radio, à la télé, dans les journaux ou sur d'autres sites. Il est vrai que la traque d'un faux tigre mérite bien plus toutes les attentions médiatiques..." 

Mais que contient l'article de Mediapart pour mériter une reprise de l'AFP ? Trois graphologues, dont l'expertise a été réclamée par les juges d'instruction en charge de l'enquête sur le financement libyen de Sarkozy, ont authentifié la signature de l'ancien chef des services secrets du régime libyen, Moussa Koussa, au bas d'un document évoquant un "accord de principe" pour le versement de près de 50 millions d'euros pour la campagne de Sarkozy en 2007.

Des révélations très bien illustrées : Sarkozy transpirant sous le regard de Kadhafi et Guéant

Et alors ? Pour comprendre l'importance (ou non) de la nouvelle information de Mediapart, il faut revenir au point de départ de l'enquête : entre les deux tours de la présidentielle 2012, Mediapart avait publié un article expliquant que le régime libyen de Kadhafi avait financé la campagne de Sarkozy en 2007 avec un titre qui ne laissait planer aucun doute : "Sarkozy-Kadhafi : la preuve du financement". La preuve ? Un document "officiel libyen", daté du 10 décembre 2006 et signé par Moussa Koussa. Certes, il ne s'agissait que d'un "accord de principe" du versement des fonds, mais Mediapart y voyait "la preuve du financement". Ce que conteste Nicolas Sarkozy, qui a décidé de contourner le droit de la presse en poursuivant le site d'information, non pas en diffamation, mais pour "faux et usages de faux".

Dans son combat contre Mediapart, Sarkozy a reçu le soutien indirect de plusieurs médias, qui ont émis des doutes sur l'authenticité du document. A commencer par Le Monde qui, dès le mois de mai 2012, s'étonnait de l'existence de ce document, qui proviendrait des archives personnelles de Moussa Koussa. Or, ces archives "ont été visitées par un chercheur de Human Rights Watch peu après la chute de Tripoli, fin août 2011 : il n'y a rien vu de tel et n'est pas en mesure de certifier la signature du responsable libyen", écrivait Le Monde.

De son côté, le magazine Vanity Fair a contesté à deux reprises l'authenticité de ce document, comme @si vous l'avait raconté. Notamment en s'appuyant sur l'audition de Moussa Koussa, lequel a déclaré devant les enquêteurs que "ce document est falsifié. Il s'agit d'un faux car la signature est fausse". Ironie de l'histoire, avec la même audition, Mediapart faisait la démonstration inverse puisqu'à un autre moment de son audition, Koussa avait déclaré que "le contenu n’est pas faux, mais la signature est fausse". Finalement, les experts judiciaires ont estimé que la signature était bien celle de Moussa Koussa, réfugié au Qatar depuis la chute du régime libyen en 2011.

Sur ce sujet, écoutez l'analyse (prudente) de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, investigateurs du Monde, sur notre plateau de cette semaine.

Lire sur arretsurimages.net.