Quand Valls voulait seulement "dépasser" les 35 h

Laure Daussy - - 0 commentaires

Voir la vidéo

C'est un buzz à retardement. Depuis deux jours, la sortie de Manuel Valls sur les 35 heures n'en finit plus de faire parler. Pourtant, le député-maire d'Evry avait dit (presque) la même chose... il y a dix mois. Sans susciter de réactions.

"Nous devons déverrouiller les 35 heures, qui n'existent déjà plus réellement puisqu'elles ont été mises en cause progressivement depuis 2002", a déclaré le député-maire d'Evry, dimanche sur Europe 1. "Est-ce que le monde tel qu'il est aujourd'hui , avec la concurrence que nous connaissons, nous pouvons nous permettre d'être sur des idées des années 70, 80, 90? Non", a-t-il martelé.

S'ensuivent alors des réactions indignées de la part de ses collègues socialistes, qui semblent découvrir soudain la position de Valls. Bien sûr, ils l'associent à une stratégie en vue des primaires. Et les journaux multiplient les articles pour commenter cette sortie, comme le JDD.fr, l'Express.fr, ou encore le Nouvelobs.com. C'est ce qui s'appelle un buzz.

Pourtant, rien de vraiment neuf sur le fond dans les déclarations de Valls. Cette position, il la défendait, déjà, dans son livre, "Pouvoir", paru en mars dernier, rappellent le Point.fr et le Figaro.fr. Il y consacrait un sous-chapitre du livre, consulté par @si, intitulé tout simplement "dépasser les 35 heures". "Dépasser" n'est certes pas un terme aussi négatif que "déverrouiller". Valls reste alors dans les "clous" de la critique possible d'une mesure mise en place par le PS, et reste ambigu - jouant sur l'ambivalence du mot dépasser, entre aller plus loin encore, ou abandonner la mesure en question.

"Les 35 heures ont endommagé notre économie, notamment vis-à -vis de l'Allemagne, qui reste, à la fois, notre principal partenaire et notre principal concurent", attaquait-il. Et de décrire les effets négatifs, selon lui, de l'application des 35 heures : "source de rigidité dans la fonction publique", de "dysfonctionnement à l'hôpital". Il ne manquait pas de constater les conséquences de la politique de la droite sur les 35 heures : "Dénaturée à plusieurs reprises depuis 2002", "complexifiée à travers les dispositif d'heures supplémentaires". Mais pour asséner : "La loi sur les 35 heures n'a plus beaucoup de sens aujourd'hui et n'est plus guère favorable à l'emploi."

Un point de vue qu'il avait également développé sur RTL, fin mars.

"Je dis que les 35 heures ont touché la compétitivité de notre pays, il faut incontestablement les dépasser", disait-il alors.

Ecoutez picto

Ce matin, Libération fait sa Une sur la polémique Valls, sans préciser que le politique s'était déjà exprimé sur le sujet. Mais le quotidien souligne, tout de même, la stratégie bien choisie de Valls, qui a su embarquer tous les commentateurs politiques : "Soigneusement fomentée, l'opération a été remarquée en ce début d'année 2011 plutôt calme."

L'effarement suscité aujourd'hui par Valls est-il provoqué par cette escalade sémantique, ou par...le moment choisi, et l'entrée dans la campagne des primaires ?

Retrouvez la chronique du matinaute Daniel Schneidermann, qui décrypte le "mode d'emploi" du "déverrouillage'.

Lire sur arretsurimages.net.