Le Monde : alliance Perdriel-Orange officielle (Twitter)
Dan Israel - - 0 commentairesParticiper à une réunion informelle avec des journalistes sur un des sujets les plus chauds du moment ?
Impossible pour le commun des mortels. Mais il est désormais possible de savoir ce qui se dit pendant une telle réunion : à la mi-journée, Claude Perdriel, patron du Nouvel Observateur et candidat déclaré à la reprise du Monde, a invité plusieurs journalistes pour exposer sa stratégie. Et deux d'entre eux, Fabienne Schmitt, rédactrice en chef de la Correspondance de la presse, et Philippe Cohen (Marianne2), ont raconté ce déjeuner sur leurs comptes Twitter. Et il s'est révélé très instructif, Perdriel y confirmant son association avec Orange. Schmitt a d'abord offert la photographie de l'instant. Elle et Cohen ont ensuite relayé les propos de Perdriel confirmant ce que le matinaute Daniel Schneidermann pressentait il y a plusieurs jours : Perdriel a "une très forte certitude" d'associer France Télécom à son offre. Et Stéphane Richard, son patron proche de Nicolas Sarkozy ? Il est "sympathique", et tout de même "pas le frère de lait du président"… Quelques instants plus tard, le site du Nouvel Obsconfirmait officiellement. |
Le propriétaire du Nouvel obs a pris soin de critiquer ses concurrents pour le rachat du Monde, le trio Pigasse-Niel-Bergé, les estimant "totalement ignorants du monde de la presse" et dénonçant des "apprentis sorciers". C'est à notre connaissance la première fois qu'un candidat à la reprise du Monde critique ouvertement son concurrent.
Perdriel a ensuite détaillé ses projets : si son offre l'emporte, il prendrait lui-même la place du patron actuel, Eric Fottorino, au directoire. Denis Olivennes, qui occupe ce poste au Nouvel Observateur , serait cantonné au conseil de surveillance. Un geste clair en direction des journalistes du Monde, qui craignaient l'arrivée potentielle d'Olivennes aux manettes. Moins sympathique pour les journalistes, il estime toujours qu'il y a "trop de monde au Monde". Nouveau plan de départs en perspective ?
Il envisage par ailleurs de devenir propriétaire à 100% du Monde interactif, qui édite LeMonde.fr, car Lagardère serait prêt à revendre sa participation de 34 %. Et s'il le devient, il y a fort à parier que Le Monde se débarrasse de son turbulent petit frère lePost.fr, puisque Perdriel considère sa création comme "une erreur".
Cela dit, Perdriel ne veut pas s'opposer aux journalistes. Si la Société des rédacteurs du Monde n'approuve pas son nom, il abandonnera le projet. Et pourrait alors tenter le coup… à Libération !
Ce compte-rendu à deux voix en temps réel est un bon exemple des bouleversements qu'internet apporte dans la pratique du journalisme. C'est un écho ironique aux écrits de Claude Perdriel lui-même, qui vient de rédiger une note pour expliquer son envie. Il s'y prend assez violemment au net : "Il y a belle lurette que l'opinion publique ne compte plus sur les politiques pour jouer ce rôle. L'expression majoritaire de gauche comme de droite est sous l'emprise de la langue de bois, du discours lénifiant ou du populisme démagogique. Internet peut-il jouer ce rôle? En théorie, c'est l'univers de la liberté. Dans la réalité, c'est celui des citations et rumeurs infondées. Aucune éthique, aucun contrôle, aucun moyen de démentir la fausse nouvelle." Une diatribe dans laquelle Perdriel oublie opportunément de rappeler que c'est sur le site de son hebdomadaire que l'histoire, jamais avérée, du SMS de Nicolas Sarkozy à Cécilia avait été publiée...