Le Financial Times vendu 1,2 milliard : les journaux pour riches sont-ils plus chers ?
Sébastien Rochat - - 0 commentairesUn record ? Le Financial Timesvient d'être vendu par le groupe britannique Pearson au groupe de médias japonais Nikkei pour la modique somme de... 1,2 milliard de dollars. Un chiffre qui détonne dans un contexte de crise où les groupes de presse sont plutôt dépréciés.
Détenu par le groupe britannique Pearson depuis 1957, le Financial Times (FT) devient japonais. Le groupe Nikkei le rachète 844 millions de livres (soit 1,2 milliard). Une vente qui s'inscrit dans un recentrage de Pearson vers le secteur éducatif. Avant le FT, le groupe avait déjà revendu Les Echos à LVMH en 2007. Comment expliquer que le FT se soit vendu 1,2 milliard alors que le fondateur d'Amazon, Jeff Bezos, n'a déboursé que 250 millions de dollars en 2013 pour acquérir le Washington Post (le titre affichant à l'époque une dizaine de millions d'euros de pertes sur l'année) ? Selon Challenges et Les Echos, c'est sa mutation numérique (le virage payant a eu lieu dès 2007) qui explique sa valorisation. Sans donner de chiffres précis, le groupe avait annoncé avoir triplé ses profits en 2014. "Ce qui laisse penser qu’ils ont approché les 250 millions d’euros", estime Challenges. Aujourd'hui, le FT est d'abord un site, avant d'être un journal papier : sur ses 720 000 abonnés, près de 500 000 sont des abonnés numériques.
"Le Financial Times est une exception, nous explique Bernard Poulet, auteur du livre La fin des journaux et l'avenir de l'information. Les autres traversent la crise de la presse comme la quasi-totalité des titres. Les journaux financiers sont sur un créneau spécifique, avec des lecteurs prêts à payer cher, comme dans le cas du FT. Ils ont donc une vraie valeur". A raison de 6 à 9 euros par semaine, l'abonnement est haut de gamme. Selon un dossier d'information destiné aux annonceurs, cité par Challenges, le FT revendique 13% de lecteurs millionnaires. Et le nombre d'abonnés ne cesse d'augmenter : +21% en un an.
En France, les chiffres sont beaucoup plus faibles : L'Obsn'a été vendu que 4 millions d'euros par Perdriel au trio Bergé-Niel-Pigasse, L'Expressa été racheté par Drahi pour environ 7 millions d'euros. Seul Le Mondeaffiche un chiffre plus élevé, le trio BNP ayant acquis le titre contre une recapitalisation de 110 millions d'euros.
"Dans tous ces cas de revente, ce sont de riches hommes d'affaires qui s'achètent une influence. En rachetant Le Monde avec Bergé et Pigasse, Niel s'est acheté un statut qu'il n'avait pas, pour pas cher vu sa fortune. Dans ces cas-là, on rachète des dettes", conclut Bernard Poulet.
L'occasion de relire notre article sur le modèle économique du Financial Times