Frais d'agence : pluralisme à France Inter

Daniel Schneidermann - - 0 commentaires

Mais si, les lois sont parfois utiles, quand les décrets d'application veulent bien suivre.

Prévu par la loi ALUR (ne parlez pas de loi Duflot, nous demandait l'autre semaine Cécile Duflot sur le plateau), le plafonnement des frais d'agence pour les locataires entre en vigueur ce matin. Pour fêter ça, le journal de 8 heures de France Inter est allé voir...deux agents immobiliers. On aurait pu imaginer que le journal de France Inter cherche à faire réagir aussi, par exemple, je ne sais pas, un locataire, pourquoi pas ? Disons, un locataire et un agent immobilier. Mais rien de plus difficile, sans doute, que de trouver des locataires. C'est vrai, ça se trouve où, ces animaux-là ? Ils ne sont pas représentés par d'entreprenants cabinets de relations publiques, comme les notaires ou les huissiers.

Heureusement pour le pluralisme, les deux agents immobiliers de France Inter ne sont pas tout à fait d'accord. Le premier est furieux : son chiffre d'affaires va baisser. La seconde, explique la journaliste, est...plus nuancée (et pour cause : elle est aussi locataire. Ouf !) La preuve : elle comprend parfaitement qu'un locataire louant un logement pour 1000 euros trouve saumâtre de payer des frais d'agence de 1000 euros. Mais, en toute objectivité, elle pointe un risque : les agences pourraient se détourner de la location, pour se consacrer uniquement aux ventes, plus lucratives. Horrible perspective : elles pourraient bouder. Jusqu'à présent, si les propriétaires louaient leurs logements, et parfois par l'intermédiaire d'agences, c'était par pure philanthropie.

On aurait aussi pu imaginer que le journal de France Inter fasse le travail qu'a fait le Huffington Post, et calcule les économies désormais réalisées par les locataires, en fonction des scénarios et des zones (par exemple, pour la location d'un studio dans le 18e arrondissement de Paris, zone très tendue, le locataire économisera 560 euros sur les frais d'agence). Mais non. Pas trop de chiffres, ce n'est pas très radio. Reste une question. Pourquoi, sur ce dossier du logement, l'oreille des journalistes se tend-elle irrésistiblement vers les arguments des lobbbies ? Dans les hebdos, et dans la "presse patrimoniale" en général, on comprend sans difficulté : il n'est qu'à voir les cahiers immobiliers trimestriels, financés par la pub, pour comprendre que les articles ne peuvent pas dire le contraire de ce que disent les pubs. Ce qui ne signifie pas que les journalistes reçoivent des "consignes". On n'en est plus là. Il suffit de placer les bonnes personnes aux bons endroits, et le système roule tout seul (notre émission était parfaitement éloquente sur le sujet). Mais à France Inter, media de service public fonctionnellement imperméable aux pressions de la pub ? La faute à la sociologie des journalistes ? Mais les journalistes sont comme bien d'autres professions : pour beaucoup locataires eux-mêmes en début de carrière, ils deviennent ensuite propriétaires. Alors ?

Loi ALUR, zonage

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