Education : Libé démonte les "manip" de chiffres de Chatel

La rédaction - - Pédagogie & éducation - 0 commentaires

Des profs trop nombreux et sans élèves ; des dépenses qui n'ont jamais été aussi élevées pour des résultats médiocres. Ce sont les deux principaux arguments avancés régulièrement par le ministre de l'Education nationale, Luc Chatel, pour justifier les suppressions de postes et les réformes actuelles dans l'Education. Et pour étayer sa démonstration, Chatel mitraille des chiffres à longueur du temps. Sauf que "le ministre ne sait pas compter" selon Libération, qui dénonce "la manip des chiffres".

C'est bien connu, il y a trop de profs. Et Luc Chatel a un chiffre qui le prouve : "En septembre 2011, il y aura 35 000 professeurs de plus qu’au début des années 1990, alors que l’on compte 500 000 élèves de moins", a-t-il déclaré le 17 avril dernier sur Europe 1. En disant cela, Chatel veut justifier les 16 000 suppressions de postes de cette année et couper court à l'argument de la hausse du nombre d'élèves par classe.

Pourtant, comme le rappelle Libération, on peut difficilement comparer l'école de 1990 et celle de 2011 : "La scolarité moyenne des élèves s’est allongée, ce à quoi la gauche comme la droite ont applaudi, soucieux de faire accéder toujours plus de personnes au bac. Cela a un coût. Davantage d’élèves ont poursuivi au lycée, dans la filière générale ou professionnelle. Or celui-ci coûte cher en France. Avec une moyenne de trente heures de cours par semaine - un record en Europe -, il est un grand consommateur d’enseignants, notamment en raison des nombreuses options. Il y a aussi eu un développement des sections de techniciens supérieurs (STS) et des classes prépas, qui comptent de nombreuses heures de cours, la création de décharges pour les directeurs d’écoles ayant plus de quatre classes, la multiplication de remplaçants titulaires sans poste fixe, des classes moins chargées, l’apparition d'intervenants en langues ou en informatique, etc". De tout cela, Luc Chatel ne dit mot.

De la même manière, lorsque le ministre évoque la hausse des dépenses, il oublie d'en donner les vraies raisons et préfère alimenter la thèse du gaspillage budgétaire avec un chiffre choc.

Sur Europe 1, il a ainsi annoncé que "depuis 1980, le budget moyen par élève a augmenté de 80%". Et pour le ministre, cette hausse n'a eu aucun effet puisque "depuis 1995, le nombre d’élèves accédant au bac n’augmente plus". Mais où est donc passé cet argent ? Libération donne une autre interprétation de ce chiffre : "La hausse de 80% a deux grandes explications. D’abord, la revalorisation des salaires des enseignants sous le gouvernement Jospin en 1989. Le primaire en a été le grand bénéficiaire, car les professeurs des écoles ont été alignés sur les profs certifiés du secondaire. (...) Ensuite, le «temps de service» des profs de lycées pros a été réduit - de vingt-quatre heures de cours par semaine à dix-huit, comme leurs collègues du lycée général".


Dernier exemple d'enfumage statistique : Chatel a contesté, toujours sur Europe 1, l'idée que le gouvernement cherchait à faire des économies dans l'Education nationale. Et il a encore un chiffre qui le prouve : "Le Parlement a voté cette année le budget le plus important qui n’ait jamais été voté : 65 milliards d’euros." Seulement, en prenant une autre donnée statistique, on arrive à un résultat différent. Ainsi, selon un rapport de l'OCDE intitulé "Regards sur l'Education", la France a diminué sa part de dépense publique consacrée à l'éducation qui passée de 6,5% du PIB en 1997 à 6% en 2007, soit une "une baisse supérieure à la moyenne des pays de l’OCDE", indique Libération.

Dans la série "enfumage", relisez également notre observatoire : "L'anglais à la maternelle, à distance et en voyage : The Chatel's Revolution"

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