Comment Bolloré s'est improvisé auteur des Guignols (Le Monde)
Robin Andraca - - 0 commentairesDans les coulisses de l'été meurtrier de Canal + : la journaliste du Monde Raphaëlle Bacqué revient, dans une enquête, sur la prise de pouvoir de Vincent Bolloré. Et raconte comment l'industriel s'est improvisé... auteur pour la nouvelle version des Guignols de l'info.
Et si Bolloré écrivait lui-même les sketchs des Guignols de l'info ? Dans une enquête publiée vendredi 18 septembre dans Le Monde Magazine, Raphaëlle Bacqué, invitée sur notre plateau en septembre 2014, raconte comment cette reconversion inattendue est devenue réalité, l'espace de quelques secondes. La scène a lieu au coeur de l'été. Les quatre auteurs de l'émission satirique viennent d'être licenciés. Quatre vingt personnes -parmi eux des dialoguistes de comédie, des rédacteurs du Gorafi et des blogueurs- participent aux castings organisés par la production pour les remplacer. Bolloré teste la première fournée : "L’industriel, qui se targue souvent d’être « le meilleur programmateur de la télé », a donc relu les sketchs et presque tout jeté au panier", écrit Bacqué, avant d'ajouter : "Puis il a pris la plume et griffonné lui-même une ou deux saynètes à sa façon...". "Les verra-t-on un jour à l'antenne ?", s'interroge la journaliste. Parions que non.
Mais cet été, Bolloré ne s'est pas contenté de griffonner quelques saynettes et de recevoir Maïtena Biraben, Yann Barthès, Daphné Bürki ou Ophélie Meunier, dans son bureau, "dont la terrasse offre une extraordinaire vue sur l'Arc de triomphe". Il a aussi licencié beaucoup de monde, parfois de manière expéditive. Comme lors du conseil de management de rentrée, où le patron monte sur scène au siège de Canal +, à Issy-les-Moulineaux. La suite est racontée par Bacqué : "Au premier rang, se tenait la direction de Vivendi. Derrière elle, une dizaine de visages inconnus.«Et là, derrière son pupitre, il a annoncé la nomination de tous ces gens sans dire si les titulaires des postes étaient renvoyés», raconte un participant. C’est ainsi que Thierry Thuillier, venu de France Télévisions en juin dernier pour prendre la direction des sports de Canal+, s’est retrouvé dessaisi de sa mission".
Rodolphe Belmer, directeur général de Groupe Canal+, a lui aussi été évincé cet été. C'est Bertrand Méheut, "qui menait depuis deux ans une guerre larvée contre Belmer" (précise Bacqué) qui a signé le licenciement. Une signature assortie d'un commentaire de Bolloré devant les directeurs du groupe rassemblés : "« Cela fait un an que tu me demandes la tête de Rodolphe », a dit tout haut Bolloré. « Maintenant que je la coupe, assume »". Qui a signé celui de Méheut, licencié un mois plus tard ? Bacqué ne le précise pas.
On apprend, enfin, que le patron de Vivendi n'a pas "apprécié" le sketch de Catherine et Liliane à son sujet :
Bolloré voudrait-il aussi la peau du Petit Journal, où les deux secrétaires sévissent quotidiennement ? Il faut croire que non. "Si j'avais un problème avec votre impertinence, je vous aurais virés !", aurait assuré l'industriel à l'équipe au cours de l'été. Rassurés ?
L'occasion de relire notre article : "Comment Canal + Afrique vante les projets du patron Bolloré".