Charlie Hebdo devient entreprise solidaire de presse

Anne-Sophie Jacques - - 0 commentaires

Charlie Hebdo change de structure et devient la toute première entreprise solidaire de presse. Ce statut est issu d’une proposition de loi sur la modernisation de la presse adoptée par les députés en décembre et entrée en vigueur le 17 avril dernier. Il impose de réinvestir dans l’entreprise au moins 70 % des bénéfices annuels et assure que seuls les collaborateurs du titre pourront détenir des actions. Une ouverture du capital, pour l’instant détenu par son directeur Riss et Eric Portheault, directeur financier, est prévue à la rentrée et pourrait concerner cinq à six salariés. De quoi apaiser les tensions sur la gestion du journal apparues deux mois après les attentats du 7 janvier.

Les tensions s’apaisent au sein de Charlie Hebdo. Comme nous le racontions ici, début avril, un collectif de onze salariés publiait une tribune dans Le Monde pour dénoncer la mise à l'écart des salariés dans la réorganisation du journal et les projets à venir. Ce collectif demandait par ailleurs un changement de statut, type coopérative, et une redistribution des actions à tous les salariés afin, non pas de s’approprier des dividendes, mais de peser sur l’avenir du journal. Le collectif a su faire entendre sa voix puisque le 17 juillet, le directeur du titre Riss a annoncé l’adoption du tout nouveau statut d’entreprise solidaire de presse. L'occasion pour la ministre de la culture Fleur Pellerin d'organiser hier une petite fête en présence d'une partie de l'équipe de Charlie, fête suivie par Le Monde.

Créée par la loi du 17 avril, cette nouvelle forme d’entreprise, vaguement calquée sur l’économie sociale et solidaire, vise à aider l’émergence et la consolidation de nouveaux titres de presse d’information politique et générale conformément à la proposition de loi adoptée en décembre par les députés. Ce statut impose de réinvestir dans l’entreprise au moins 70 % des bénéfices annuels et interdit toute prise de participation par un tiers : seuls les collaborateurs de Charlie Hebdo pourront donc détenir des actions. Pour cette année, selon Le Monde, la totalité des bénéfices sera bloquée et réinvestie dans le journal. De même, Riss a annoncé une probable ouverture du capital à cinq ou six salariés – mais pas à tous les salariés comme souhaité par le collectif. A ce jour, Riss possède 70% des parts du journal, le reste étant détenu par le directeur financier Eric Portheault.

Interrogé par @si, Laurent léger, membre dudit collectif, se dit ravi de ce changement de statut "qui tombe à pic". Est-il déçu de voir s’envoler l’idée de créer une coopérative ? "La coopérative n’était pas un but en soi, nous souhaitions seulement trouver la façon dont les salariés allaient pouvoir être représentés au sein du titre, et ce quelle que soit sa forme juridique. Nous voulions faire entendre notre voix. L’adoption de ce nouveau statut est une première étape dans la refondation du journal. On ne peut que s’en réjouir."

De même, selon Le Monde, les dons recueillis par le journal seront gérés par un comité de personnalités indépendantes chargées de définir comment répartir, parmi les familles des victimes, la somme de 4,3 millions d'euros – provenant de 36 000 donateurs – et rendue publique par la direction du journal en mai (nous l’évoquions ici). "Ce comité sera nommé par arrêté ministériel", explique Léger, "et trois ministres devront nommer chacun une personnalité indépendante". Mais ce n’est pas encore fait, précise-t-il.

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