Cauchemar en cuisine : comment "Metro" se rachète une image (M6)
Sébastien Rochat - - Publicité - 0 commentairesUn chef étoilé aux méthodes musclées, des restaurateurs en déroute qui ont besoin d'aide, et des experts "Metro" qui ré-agencent les établissements : bienvenue dans l'émission Cauchemar en cuisine, diffusée sur M6, lundi 15 mai. Une émission qui permet au groupe de distribution "Metro" de sortir de son image "surgelé" véhiculée par plusieurs reportages ces dernières années.
Quel cauchemar ! Imaginez des plats brûlés, des produits surgelés, voire périmés, et une cuisine à la limite de l'insalubrité. C'est généralement le type de restaurants qu'affectionne M6 pour son émission Cauchemar en cuisine, présentée par le chef étoilé Philippe Etchebest. Diffusé sur M6 depuis avril 2011, ce programme est un dérivé d'une émission anglaise présentée par le chef Gordon Ramsay. Le principe ? Un chef de renom vient en aide à des restaurateurs en détresse, qui servent des plats sans saveur et cuisinent dans les locaux sales.
Sa méthode ? Malmener les cuistots à la dérive en leur hurlant dessus dans un premier temps, puis en leur prodiguant des conseils. A la fin, les cuisines sont propres, la carte est refaite et l'établissement a entièrement été redécoré. Dans la version française, deux experts "Metro" viennent épauler le chef Philippe Etchebest pour ré-agencer les restaurants. Dans l'émission diffusée lundi 15 mai, il s'agit de refaire à neuf la salle d'une pizzeria. L'intervention des experts est très courte, mais l'effet est garanti : les propriétaires du restaurant... ... sont en extase après les travaux |
Des experts "Metro" ? C'est ce qui est indiqué dans leur présentation. Le groupe "Metro Cash & Carry France" est d'ailleurs remercié dans le générique de fin.
Metro, ça ne vous dit rien ? Ce n'est pas seulement un moyen de transport, c'est aussi le deuxième groupe de distribution en Europe (alimentaire et matériel). Metro AG est un groupe allemand qui a commencé à implanter des magasins Metro en France dans les années 1970. Particularité de l'enseigne : ce sont des magasins destinés exclusivement aux professionnels issus principalement de la restauration. Si vous n'avez jamais eu l'occasion de vous y rendre, peut-être en avez-vous déjà entendu parler. Et pas forcément en bien. Ces dernières années, de nombreux reportages, dénonçant les plats surgelés vendus par des restaurateurs comme du fait maison, ont été diffusés : "La gastronomie du micro-onde" (Envoyé Spécial, France 2, février 2010), "Restauration française : les pieds dans le plat" (Spécial investigation, Canal+, février 2010), "Des restaurants sans cuisine" (Complément d'enquête, France 2, décembre 2012), "Restauration, un pavé dans l'assiette" (TV5Monde, octobre 2012),
Points communs de ces reportages multi-rediffusés ? Ils ont souvent la même construction : en caméra cachée, un critique gastronomique entre dans un restaurant et goûte des plats sans saveur qu'il soupçonne être du surgelé. Le soir, le journaliste fait les poubelles du restaurant pour découvrir les emballages de ces surgelés présentés comme du fait maison.
S'ensuit la séquence incontournable en caméra cachée au cours de laquelle le journaliste se fait passer pour un restaurateur dans un magasin destiné aux professionnels. La marque Metro est souvent citée ou facilement reconnaissable avec ses couleurs jaune et bleu. On découvre alors un univers de surgelés à bas pris, revendus parfois huit fois plus cher par les restaurateurs. Dans le reportage de France 2, une employée de Metro explique notamment comment faire passer du surgelé... pour de la cuisine maison |
Pas vraiment très flatteur pour Metro. Une enseigne qui pourtant vend également des produits frais de qualité, ce que les reportages ne rappellent pas toujours. En participant à l'émission de M6, le groupe fait donc coup double : elle décongèle son image et vante ses services de "réimplantation d'établissement". Dans un communiqué diffusé en janvier 2012, le groupe se félicitait de sa participation à l'émission de M6 en expliquant que grâce à ses activités de conseil "4000 épiceries et près de 2000 bars et restaurants ont ainsi été réimplantés depuis 2006". En suggérant à ces restaurateurs d'avoir recours à leurs produits, notamment surgelés ? Le groupe assure que non dans son communiqué. Nous avons essayé de les joindre, en vain.
(avec Marion Mousseau)