Annulation Le Pen : "réflexion de fond" (syndicats FR2)

Justine Brabant - - 0 commentaires

C'est le moment d'entamer une réflexion de fond. Le Syndicat national des journalistes (SNJ) et le SNJ-CGT se félicitent de l'annulation, vendredi 22 octobre, d'un numéro de l'émission Des paroles et des actes qui devait accueillir Marine Le Pen, mais estiment qu'il faut mener une réflexion de fond sur le dispositif de l'émission.

"Monsieur Pujadas, on ne m'impose rien" :
Marine Le Pen annule sa participation à Des Paroles et des actes

Après la tempête, prendre le temps de réfléchir au fond. Une semaine de débats, de menaces et de négociations a finalement abouti au désistement de Marine Le Pen de l'émission de France 2 Des paroles et des actes. La dirigeante du Front national n'a pas accepté la formule proposée par France 2 quelques heures avant le tournage (et plusieurs fois modifiée auparavant) : débattre à la fois avec des responsables politiques nationaux (Stéphane Le Foll et Jean-Christophe Lagarde) et locaux (ses adversaires aux régionales dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Pierre de Saintignon et Xavier Bertrand).

Pour le SNJ, un problème de professionnalisme

Pour les syndicats de journalistes de France Télévisions, la chaîne doit désormais réfléchir à l'avenir de l'émission. Chaque syndicat a ses priorités. "Nous sommes ravis que l'émission ait été annulée. Nous espérons surtout que cela donnera lieu à une vraie réflexion sur le contenu", explique à @si Dominique Pradalié, du SNJ. Car au-delà du cas Le Pen, "le problème est général" : "Des Paroles et des actes est une émission bling-bling et tape-à-l'oeil. On laisse les politiques dire n'importe quoi à l'antenne. C'est ce problème général de professionnalisme que l'affaire Le Pen vient d'illustrer : l'émission a été modifiée toute la journée (de jeudi) par des gens qui ne sont pas du service public !", tempête la journaliste, faisant référence aux modifications de son dispositif faites par France 2 suite à un courrier du CSA et aux protestations de plusieurs partis. L'émission doit être repensée, afin que les interventions des politiques soient "ponctuées d'explications, de vérification des faits, pourquoi pas d'encadrés pour le téléspectateur", avance encore Pradalier.

Marine Le Pen sur le plateau de Des Paroles et des actes, en 2014

Pour la CDFT, un problème nommé Pujadas

Un problème de "professionnalisme" pour le SNJ ; un problème de "personne", ajoute la Confédération française démocratique du travail (CFDT). "La première chose à faire, c'est d'arrêter de laisser l'émission entre les mains d'une seule personne, David Pujadas", estime le délégué CFDT de France Télévisions Thierry Vildary, joint par @si. Jeudi matin (avant que Le Pen n'annonce qu'elle renoncait à débattre, donc), l'organisation a dégainé un tract très critique pour le présentateur de France 2 : "Depuis longtemps, on sait que rien ne se fait ou que personne n’est nommé à la Direction de l’Information sans son avis, ni même son aval. (...) Après le dérapage organisé de «la copie» Morano chez Ruquier, deux heures d’antenne pour «l’original», elle-même candidate dans le Nord. Pujadas a trouvé ici un bon moyen de faire le buzz." Faire le buzz, sans en mesurer les conséquences : "Quand on choisit de donner plus de deux heures d'antenne à une candidate à une élection, alors que le scrutin approche et que la région est disputée, on sait très bien que cela va créer des distorsions avec les autres candidats et qu'ils ne vont pas se laisser faire. Et que le FN, au moindre problème, va crier au traitement inéquitable. Ne pas l'anticiper, c'est inconscient."

Pour le SNJ-CGT, un problème de pluralisme

La troisième piste de réflexion vient d'un troisième organisation syndicale, le SNJ-CGT : l'importance accordée aux grands partis. Dans un communiqué mis en ligne vendredi après-midi, le syndicat épingle les Républicains et le Parti socialiste (qui ont demandé à ce que leurs candidats dans le Nord débattent avec Marine Le Pen) : "Le trouble provoqué a contraint les Républicains et le Parti socialiste à se positionner. Non pas en exigeant un parfait équilibre entre toutes les familles politiques du pays, mais en réclamant en quelque sorte un droit de réponse pour eux-mêmes." Un épisode qui doit conduire France Télévisions à réfléchir au pluralisme de ses antennes, poursuit le syndicat : "Aujourd’hui, la démocratie exemplaire serait celle du triumvirat - FN, Les Républicains et PS - qui a confisqué la parole politique et n’hésite pas à caricaturer les paroles différentes. (...) Le SNJ-CGT déplore le glissement continu vers une information partielle, partiale et incomplète. Il appelle (...) la direction de France Télévisions à prendre les mesures pour que toutes les familles de pensée aient accès aux chaines de service public dans des émissions qui ne soient pas des caricatures de débat pluraliste."

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