Adama Traoré : la leçon du New York Times à la police et au gouvernement français

Anne-Sophie Jacques - - 0 commentaires

La police française en toute impunité ?

Dans un éditorial daté du 29 juillet, le New York Times fustige le comportement de la police - et du gouvernement- français suite à la mort d’Adama Traoré, ce jeune Noir de 24 ans décédé la semaine passée à Beaumont-sur-Oise dans des circonstances troublantes – et dont la mort fut traitée en quelques secondes par les JT qui ont préféré zoomer sur les échauffourées comme nous le racontions ici.

Le NYT rappelle que "la police a d'abord prétendu que M. Traoré était mort d'une crise cardiaque. Puis, après une autopsie, les autorités ont avancé une infection grave. La famille de M. Traoré a demandé une autre autopsie, en disant qu'il est entré dans un fourgon de police vivant pour se retrouver mort peu après. Cette autopsie a suggéré que M. Traoré était mort d'«asphyxie» mais n'a pas indiqué comment". Le quotidien ne revient pas sur la demande d’une troisième autopsie formulée par la famille – demande refusée hier par le procureur. Pourtant, à en croire L’Obs, la piste du "syndrome asphyxique" semble s’imposer après le témoignage de gendarmes qui assurent avoir "employé la force strictement nécessaire pour maîtriser" du jeune homme avant d’ajouter que ce dernier "a pris le poids de nos corps à tous les trois au moment de son interpellation." La famille accuse aujourd’hui les gendarmes de bavure.

Ce décès fut "la cause de violents affrontements entre les minorités en colère et des policiers" écrit le NYT qui fait le parallèle avec les émeutes de 2005 déclenchées après la mort de deux adolescents – Zyed Benna et Bouna Traoré – et dont l’issue du procès dix ans plus tard fut la relaxe des deux policiers poursuivis pour non-assistance à personne en danger comme nous le racontions ici. Cette fois-ci, poursuit le NYT, les manifestations de soutien à Traoré se sont emparées de la bannière Black Lives Matter (les vies noires comptent) du nom du mouvement militant états-unien qui dénonce le racisme et les violences policières.

Car le NYT fait le constat qu’en France, comme aux Etats-Unis, "la culture de l’impunité des policiers bien ancrée conduit à des abus d’autorité sur les minorités". Et l’Etat d’urgence promulgué par François Hollande au lendemain des attentats du 13 novembre à Paris n’a rien arrangé : "les attaques terroristes n’ont pas conduit le gouvernement français et les législateurs à interpeller la police afin qu’elle tienne compte des abus contre les minorités africaines et d'Afrique du Nord de la France". Le NYT va même jusqu’à rappeler que Hollande a abandonné la lutte contre le contrôle au faciès. La mesure généralisant la remise par la police d'un récépissé en cas de contrôle d'identité, et portée fin juin par des députés, a en effet été retoquée comme nous le racontions ici.

Et le New York Times de conclure par une leçon : "l'État islamique a montré qu'il est en mesure d'exploiter les sentiments de colère et de l'aliénation à des fins meurtrières. Maintenant, plus que jamais, la police a besoin de bâtir la confiance avec les communautés minoritaires en démontrant le respect des droits de tous les citoyens français, quelle que soit leur foi ou leur couleur, et qu'une application impartiale de la justice ne fait aucune exception pour la police".

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