Facebook censure un témoignage de victime de violence policière

Manuel Vicuña - - Silences & censures - 0 commentaires

Il a voulu témoigner sur Facebook des sévices policiers dont l’un de ses collègues avait été victime,

mais le réseau social en a décidé autrement... en censurant le post de Guillaume Mazeau, maître de conférences à la Sorbonne. Dans cette publication, retranscrite intégralement par Mediapart, le prof livre un récit cru et frontal. "Il vient d'arriver cela à un collègue enseignant à Paris-1. Une scène horrible et impensable il y a quelques années. Le discours anti-flic primaire me fatigue. Mais à un moment il faut ouvrir les yeux.", explique Mazeau qui a décidé de rapporter le témoignage de l’un de ses collègues, prof à la Sorbonne, Guillaume Vadot.

La scène est survenue jeudi dernier en gare de Saint-Denis. "Je [Vadot] sortais d’une gare de banlieue avec une copine, en fin de journée. Au moment de passer les tourniquets, on entend des hurlements." Vadot aperçoit alors une femme noire d’une cinquantaine d’années, menottée, violemment interpellée par des agents de police. Alors qu’un attroupement se forme, Vadot choqué a un réflexe : "J’ai sorti mon téléphone pour filmer, en me disant que cela pourrait cadrer les choses, faire baisser le niveau d’impunité. Ça n’a pas duré plus d’une minute."

"On va te violer..."

En l’espace d’un instant, il aurait été brusquement mis de côté par deux des nombreux policiers. C’est là que les choses dérapent, explique-t-il. "Ils se mettent à deux sur moi, chacun me faisant une clé à l’un des bras. Une douleur énorme me traverse les articulations. J’ai les deux bras torsadés dans le dos, avec ces deux hommes dans des positions qu’ils ont apprises, qui pèsent de toute leur force pour me plaquer contre le mur."

Vadot dépeint les deux agents comme "surexcités" : "Crânes rasés, les yeux brillants, j’ai du mal à croire que la scène qui suit est réelle. «On va te tuer, tu es mort, on va te défoncer, je te crève là sur place dans dix minutes». Et au fur et à mesure que les cartilages s’étirent sous la torsion, ils remontent mes poignets dans mon dos, et augmentent la torsion. Celui de gauche me met la main sur les fesses. «T’as cru que t’allais jouer avec la police ? Regarde comme on va jouer avec toi». Et il me met une première béquille. Puis il remet sa main sur mes fesses. Avec les clés de bras, je ne peux plus respirer normalement." Nouvelle béquille, les menaces se poursuivent "On va te violer, ça te plaît ça ? Je vais te violer et on va voir si après tu filmeras la police", lui aurait lâché l’un deux. "« Maintenant on va te mettre des coups de taser, tu vas voir comment ça pique ». Et, toujours celui de gauche, m’envoie une décharge dans le bras. Je sursaute, et je me mets à trembler."

Une plainte bientôt déposée

D’autres insultes et menaces fusent encore, relate l’enseignant : "«T’es prof ? Quand l’État islamique viendra à la Sorbonne tu vas les regarder en te branlant ». Celui de gauche : «Regarde-moi sale pédé. Sale pute. Tu habites là-bas hein ? (il montre mon immeuble). Je vais venir chez toi, je vais mettre une cagoule et je vais te violer »." Jusqu’à ce que, selon Vadot, les policiers, après l’avoir forcé à déverrouiller son téléphone et à effacer les photos, repartent en courant.

Alors que Facebook a rendu cette publication inaccessible (avant de la republier), la victime a décidé de ne pas en rester là. Ce lundi, Guillaume Vadot a décidé de rompre l’anonymat (jusqu'ici son collègue avait pris soin de ne pas indiquer son nom) lors d’une conférence de presse, live tweetée ici. Selon lui, les hommes qui l’ont violenté seraient "de la police nationale". Vadot a indiqué qu’il avait d’ores et déjà été contacté par l’IGPN, la police des polices. Avec son avocat il a fait savoir qu’il allait saisir le procureur de la république et le Défenseur des droits. "La plainte est en cours de rédaction", explique-t-il.

L'occasion de lire : "Violences policières : Facebook republie un post censuré"

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