Tarnac/Coupat : pas "d'entreprise terroriste" (juge d'instruction)

Justine Brabant - - 0 commentaires

Coupat ne sera pas jugé pour terrorisme. La juge d'instruction de l'affaire dite de Tarnac, Jeanne Duyé, a renvoyé Julien Coupat et quatre de ses co-accusés devant un tribunal correctionnel pour "association de malfaiteurs", mais a rejeté la "relation avec une entreprise terroriste", circonstance aggravante requise par le parquet contre trois d'entre eux. Une étape importante dans cette affaire judiciaire hautement médiatisée, et ponctuée depuis sept ans de nombreux emballements.

Ce n'est pas le non-lieu général demandé par les avocats des prévenus, mais c'est tout de même une victoire pour eux. Huit militants libertaires ont été renvoyés en correctionnelle, mais ils ne seront pas jugés pour terrorisme, contrairement aux réquisitions du parquet. Ce dernier souhaitait que Julien Coupat, Yildune Lévy et une troisième personne fassent l'objet d'un procès pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", mais la juge d'instruction Jeanne Duyé n'a retenu dans son ordonnance rendue vendredi 7 août qu'un renvoi pour "association de malfaiteurs".

Sur quoi se fondait le parquet pour évoquer une "entreprise terroriste" ? Dans ses 135 pages de réquisitoire - dont @si vous détaillait le contenu ici -, le ministère public tentait de lier Julien Coupat et le "groupe de Tarnac" au sabotage de lignes TGV en 2008 d'une part, et à la publication de l'Insurrection qui vient en 2007 aux éditions de La Fabrique d'autre part. Mais il avait eu peine à convaincre : même s'il était possible de prouver que Coupat et Lévy étaient responsables des sabotages (ce qu'ils ont toujours nié), pourquoi cela aurait-il valu des poursuites pour terrorisme alors qu'un sabotage similaire de ligne TGV a été considéré en 2014 comme un simple "acte de malveillance", relevait Le Monde à l'époque ? Quant à l'Insurrection qui vient, comment expliquer - s'il était le brûlot dangereux décrit par le parquet - qu'il n'ait jamais fait l'objet de poursuites, et soit en vente libre à la Fnac, eut beau jeu de relever Coupat (qui a par ailleurs toujours nié en être l'auteur principal) ?

"Après près de sept années d’instruction complètement à charge, nous avons enfin une décision de justice courageuse. C’est un désaveu total pour le parquet", se sont félicités les avocats des prévenus à l'annonce du renvoi. Sept années d'un emballement lancé à grande vitesse par Michèle Alliot-Marie, ponctuées de témoignages douteux (diffusés sur TF1, puis dénoncés par TF1), de propos déformés (par France Inter), et plus récemment, des sorties médiatiques d'un Coupat inquiet du climat régnant en France depuis l'adoption des lois sur le renseignement et sur l’apologie du terrorisme. Sept années (provisoirement) conclues, donc, par "l’un des plus retentissants déraillements de la justice antiterroriste" en France, grince Le Monde.

L'occasion de (re)lire notre synthèse : "Pourquoi le parquet considère Coupat comme un terroriste", et de se replonger dans notre copieux dossier : "Tarnac, manips à grande vitesse".

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