Tuerie : Newtown en a assez des médias
Gilles Klein - - 0 commentairesNewtown (27 000 habitants) qui a subi la mort de 28 personnes dont 20 petits écoliers, en a assez des médias venus du monde entier, note la presse américaine. Certains journalistes reconnaissent cette pression et critiquent le fait d'interviewer en direct de jeunes enfants traumatisés juste après le drame.
Dans le Mercury, un premier reportage encadré de bleu explique que les magasins de Newtown manquent de fleurs à cause des enterrements. Le deuxième reportage sur deux colonnes est titré "Newtown aux médias : vous ne faites qu'empirer ce cauchemar." "Il y a des pancartes « no media » et « no press » dans plusieurs points de la ville", explique cet article paru aujourd'hui. "Dans une taverne sur Queen Street, un groupe attablé autour de pizzas échange des anecdotes sur le fait que les reporters TV égratignent le nom de la ville ou celui des habitants", raconte Adrienne Lafrance. "Il y a même un carton jaune demandant aux journalistes de passer leur chemin, à la porte d'une église. Les parents du petit garçon de 6 ans qui a réussi à échapper au tueur juste avant que sa maîtresse et ses camarades soient abattus ont mis un avis demandant que l'on ne sonne pas chez eux, raconte CNN. A chaque fois que l'on sonne, il croit que c'est l'assassin qui l'a retrouvé", ajoute la journaliste. "Teri Brunelli, la propriétaire d'un magasin de souvenirs dit qu'elle est harcelée par les équipes TV. Et, bien qu'elle ait tout refusé, les responsables d'émissions lui téléphonent jusque tard dans la nuit pour essayer de la faire changer d'avis." |
Les habitants dénoncent aussi l'invasion des rues par les véhicules des chaînes de télévision et de radio qui ont provoqué des embouteillages dans le centre-ville (le drame s'est produit à l'école de Sandy Hook, un village qui fait partie de Newtown). Le journal Politico dénonçait, le 13 décembre, le fait que certaines chaînes comme CNN, Fox News ou MSNBC aient interviewé des enfants qui venaient d'échapper au massacre. Politico souligne que même si Wolf Blitzer, l'un des présentateurs vedettes de CNN, a expliqué après un direct avec un petit garçon que CNN "ne faisait ce genre d'interview qu'avec l'accord des parents", cela n'excuse rien. |
Cité par Politico, le journaliste Bruce Shapiro estime que "les enfants sont sous le choc, ils ont peur, ils peuvent être flous sur ce qu'ils ont vu (...) Ces témoins peuvent dire des choses vraies ou fausses, mais juste après un massacre comme celui-là cela devient des faits. (...) C'est du journalisme irresponsable". Interview d'une fillette en direct sur MSNBC |
Plusieurs journalistes d'autres médias critiquent ce qu'ils ont vu, même quand ils étaient sur place. Exemples.
James Poniewozi, chroniqueur TV de l'hebdo Time, souligne le 14 décembre que quel que soit le nombre de morts, tous les enfants de l'école primaire de Newtown sont des victimes. Pourtant, à peine avaient-ils pu échapper au massacre qu'ils étaient guettés par les journalistes qui voulaient les interroger en direct.
Jonny Dymond, correspondant de la BBC à Washington, est resté trois jours sur place. Le 17 décembre, il écrit : "Je couvre l'actualité sur le terrain depuis quinze ans, même sur de gros événements, je n'ai jamais vu cela, et je ne me suis jamais senti aussi mal de contribuer à ce malaise." Il note que les médias britanniques à eux seuls ont envoyé une centaine de journalistes sur place. Conférence de presse : trois policiers (chapeau au premier rang), encerclés par des centaines de journalistes à Newtown |