Viols français au Rwanda : "Causette" piratée et menacée ?
Dan Israel - - 0 commentairesUn magazine féminin piraté et menacé pour avoir fait ressurgir un sujet qui fâche : des viols perpétrés par des soldats français au Rwanda en 1994 ?
Le directeur de publication du magazine Causette (dont nous avions commenté la pimpante première couverture, en mars 2009), Grégory Lassus-Debat, a annoncé ce matin, notamment dans Libération et sur France Info, avoir porté plainte contre X pour "accès frauduleux dans le système de traitement automatisé de données" et pour "suppression de fichier". Mercredi dernier, à l'heure du bouclage du dernier numéro (en kiosque aujourd'hui), l'équipe a eu la mauvaise surprise de découvrir, au moment où elle envoyait les articles à l'imprimerie, que presque tous les dossiers informatiques avaient disparu du serveur qui devait les transférer vers l'imprimeur. "Cela ne peut pas être une erreur de manipulation d'un membre de l'équipe, assure à @si le directeur de Causette. L'opération nécessitait six clics de souris, et les fichiers sont très lourds, on ne peut pas les supprimer en une seconde par mégarde." Il estime que la boite mail d'un des membres de la rédaction a pu être piratée : "Nous avons changé de serveur récemment, et l'administrateur réseau nous avait envoyé les nouveaux mots de passe par e-mail." |
Les journalistes ont pu reconstituer le magazine grâce aux versions précédentes de chaque page, encore présentes sur les ordinateurs de la rédaction. "Il y aura sans doute quelques coquilles dans le magazine, parce que nous en avions corrigé certaines directement sur la dernière version, qui a disparu", indique Lassus-Debat. Mais pour quelle raison le magazine aurait-il été piraté ? Tout en répétant ne pas vouloir "verser dans la théorie du complot" et "avoir du mal à en parler car il n'y a aucune preuve", le journaliste rappelle le sujet de la grande enquête du mois : le témoignage de deux femmes rwandaises, qui affirment avoir été violées par des soldats français, lors de l'opération Turquoise au Rwanda en 1994. Leur témoignage est corroboré par d'autres témoins, passés par des camps de réfugiés pendant le génocide rwandais.
Le magazine a décidé d'enquêter sur place après la venue en France, en juin, de trois femmes portant les mêmes accusations (France Inter leur avait consacré une bonne place). Venues spécialement pour être entendues par la justice militaire française, elles avaient appris la veille de leur audition que le juge avait un problème de santé, et ne pouvait pas les recevoir. Elles sont toujours en attente d’une nouvelle convocation. Causette est donc parti à la recherche d'autres témoignages, et les a trouvés.
Un autre élément bizarre fait penser à la rédaction que ce sujet sensible pourrait gêner : une des journalistes auteures de l'enquête, basée en Afrique du Sud, a reçu un e-mail étrange. Envoyé depuis la messagerie d'une des deux femmes qui témoignent dans le magazine, il détaillait toutes les circonstances de ses rencontres avec la journaliste, et finissait en espérant que sa mère et sa famille allaient bien. "Et ce, alors que la femme rwandaise ne parle pas un mot de français et est quasiment analphabète !", témoigne Lassus-Debat. Après avoir envoyé en exclusivité son magazine, et témoigné auprès de Libé, France Info, la matinale de Canal+ et Slate, il a répété son histoire aujourd'hui à de nombreux médias, dont l'AFP.
Coïncidence ? Complot ? Le complotisme commence à s'infiltrer à @si, si l'on en croit la dernière chronique du matinaute...