Murdoch : démission chef Scotland Yard. Miliband pour le démantèlement du groupe
Gilles Klein - - 0 commentairesLe patron de Scotland Yard, Paul Stephenson, a démissionné dimanche 17 juillet, en raison de ses relations passées avec un ancien dirigeant du groupe Murdoch.
Cette démission intervient au terme d'un week-end où se sont succédé les mauvaises nouvelles pour Rupert Murdoch, et pour ses soutiens passés au sein de la police et du pouvoir britannique. Rebekah Brooks, ex-directrice de News International (la filiale de Murdoch en charge des quotidiens britanniques) qui avait démissionné vendredi, a été arrêtée dimanche midi. Des soupçons de corruption étaient apparus autour du patron de Stephenson, que l'on savait proche du groupe Murdoch. Tout ceci alors que des tensions se font jour au sein de la famille Murdoch.
Rebeka Brooks (ancien patronne de la rédaction de News of the World) a été convoquée dans un commissariat londonien, où elle a été placée en état d'arrestation dimanche midi. Elle est interrogée dans le cadre de deux enquêtes ouvertes pour "corruption" (versement d'argent à des policiers par News of the World) et "écoutes illégales". Selon sa porte-parole qui travaille pour la société Bell Pottinger en charge des relations publiques de Brooks: "on lui avait dit il y a une semaine qu'elle n'était pas en cause, puis tout d'un coup vendredi on la convoque. Elle se présente aujourd'hui, et elle est surprise lorsqu'elle est arrêtée à son arrivée. Elle était venue pour aider l'enquête".
Sur son blog, Robert Preston, responsable du service Economique de la BBC écrit que l'arrestation de Brooks est un très mauvais coup porté à Murdoch, alors que sa filiale britannique n'avait jamais cessé d'expliquer qu'elle n'avait aucun lien avec le scandale des écoutes et qu'il ignorait que la rédaction de News of the World les pratiquait, lorsqu'elle la dirigeait.
Mais Preston ajoute que cette arrestation survient à point nommé puisqu'elle "pourrait empêcher Brooks faire publiquement des révélations gênantes pour ses nombreux amis très haut placés devant la commission parlementaire qui devait l'entendre mardi"
LeDaily Mail écrit que c'est Rebeka Brooks qui a convaincu le Premier ministre David Cameron de prendre Andy Coulson, ancien rédacteur en chef de News of the World comme patron de sa communication. Ceci alors que Cameron s'apprêtait à choisir un journaliste de la BBC. Cameron avait été informé qu'il devait choisir quelqu'un qui soit "acceptable" par le groupe Murdoch qui le soutenait via ses journaux britanniques. Après avoir, au début de l'année, démissionnéde son poste auprès du Premier ministre, lorsque le scandale des écoutes a commencé à prendre une dimension politique, Coulson a été invité deux mois plus tard, à séjourner à Chequers, la résidence du Premier ministre.
Le chef de la police, invité d'un hôtel de luxe
Non seulement certains policiers auraient été payés par News of the World pour fournir des renseignements au journal, mais le patron de la police britannique, lui-même, a aussi bénéficié des largesses du groupe.
"Le patron de la police bénéficie d'un passe-droit à 12 000 livres" titre l'édition dominicale du Times (groupe Murdoch). Ce quotidien révèle que le chef de la police britannique, Sir Paul Stephenson, et son épouse ont séjourné gratuitement, en janvier dernier, à Champneys une résidence hotelière de luxe qui possède l'un des spas les plus luxueux d'Angleterre. Une révélation d'autant plus embarrassante que le chargé des relations publiques de ce spa n'est autre que Neil Wallis, un des acteurs clé du scandale des écoutes téléphoniques menées par News of the World. Wallis a été arrêté la semaine dernière. Il a été rédacteur en chef adjoint de News of the World, et il a aussi travaillé pour la police britannique comme conseiller en communication de Stephenson. Interrogé par le Sunday Times, Stephenson a reconnu avoir séjourné cinq semaines à Champneys avec son épouse pour suivre un programme de remise en forme après une opération., "Ce qui lui permis de retravailler six semaines plus tôt que prévu" explique le policier dans un communiqué, précisant que la police a payé les frais du programme, mais que "le séjour dans l'hôtel, et tous les repas ont été offerts par l'un des patrons de Champneys qui est un très proche ami de la famille". Le Sunday Times précise que le prix moyen d'une chambre à Champneys est de 598 £ par jour (680 euros). Après son arrestation, Wallis avait reconnu qu'il était payé 1 000 £/jour (1 180 euros/jour) par la police quand il conseillait Stephenson. Lorsqu'il a fait le point sur le scandale des écoutes avec le ministre de l'Intérieur et le Premier ministre la semaine dernière, Stephenson n'aurait pas évoqué ses relations avec Wallis ajoute le Sunday Times. | Sunday Times dimanche 17 juillet 2011 |
L'Observer, l'édition dominicale du Guardian, assure qu'Elisabeth (fille de Murdoch) accuse son frère James, actuel directeur du groupe, d'avoir, avec Rebeka Brooks, "niqué l'entreprise" ("fuck the company") L'Observer cite Michael Wolff, un des biographes de Rupert Murdoch qui assure qu'Elisabeth aurait fait cette déclaration lors du lancement d'un livre politique. Mais pour certains observateurs, Wolff n'est pas très crédible, ayant toujours été très critique envers James Murdoch. L'Observer ajoute que si des familles américaines des victimes du 11 Septembre ont été espionnées par des journaux du groupe Murdoch, cela pourrait être fatal à la compagnie. Brooks, James et Rupert Murdoch devaient témigner sous serment devant une commission d'enquête parlementaire. L'article est paru, avant que Brooks ne soit arrêtée dimanche midi. The Observerdimanche 17 juillet 2011 |
De son côté, le Sunday Telegraph annonce que James Murdoch qui préside le bouquet satellite BskyB (que Murdoch souhaitait intégralement racheter), est mis en cause par le conseil d'administration qui pourrait décider de le remplacer.
Enfin, le chef de l'opposition travailliste, Ed Miliband, a réclamé dans une interview à l'Observer le vote d'une loi anti-concentration de la presse, qui aboutisse au démantèlement du groupe Murdoch en Grande-Bretagne. Ce groupe "a trop de pouvoir sur la vie publique britannique", a dit Miliband.
Mise à jour - 20h45 :démission du patron de Scotland Yard Sir Paul Stephensonqui explique son départ dans un très long communiqué, où il reconnaît ne pas avoir informé le ministre de l'Intérieur, et le chef du gouvernement de ses relations avec Wallis.
L'occasion de lire notre observatoire Murdoch : avis de tempête sur la police et les médias britanniques.