Drakkar : "source anonyme" à l'Elysée
Daniel Schneidermann - - 0 commentaires
La nouvelle est passée un peu inaperçue
, à
la veille du 14 juillet. Mais on a entendu "une source à l'Elysée"
informer la bonne presse que la Syrie n'était pour rien, dans
l'attentat du Drakkar, qui a coûté la vie à 58 soldats français en
1983. On le mettait sur le dos de la Syrie, mais c'était l'Iran. Le
régime du papa de notre invité du lendemain, lui, n'était responsable
"que" de l'assassinat de l'ambassadeur français Louis Delamare. |
Une révélation tellement sensationnelle que même le ministre de la Défense, apparemment, n'était pas au courant. La révélation a été reprise sur les sites des journaux les plus sérieux. Seul le quotidien libanais L'Orient le Jour a noté "l'incroyable maladresse" de cette confidence anonyme (cette réaction livrant d'ailleurs une des raisons possibles de l'anonymat).
Extraordinaire timing. Voilà un attentat commis en 1983, contre des militaires français. La lumière n'a jamais été faite, aucune enquête sérieuse n'a pu évidemment être entreprise, mais on soupçonne le Hezbollah, avec le soutien logistique de l'Iran et de la Syrie. Et soudain, 25 ans plus tard, l'enquête débouche. Ce n'était pas une jeune yougoslave. Non. C'était l'Iran, mon cher Watson. Vivent les invitations, qui accélèrent les enquêtes !
La deuxième étrangeté de cette opération de communication, c'est l'anonymat de cette source élyséenne. Dans cette maison de verre, dans laquelle le chef dit ce qu'il fait, et fait ce qu'il dit, et ne triche pas, et ne truque pas, il se trouve maintenant des "sources" pour demander aux journalistes le "off", comme avant la Rupture ? Mais qui peut bien être cette source ? Aux amateurs d'énigmes, je ne saurais trop recommander la transcription du Monde.fr. La voici. "Le Drakkar, c'est pas la Syrie. Franchement, j'ai beaucoup de respect pour tout le monde, mais pourquoi dit-on des choses fausses." : ainsi Le Monde.fr transcrit-il les confidences de la "source" à plusieurs journalistes. Hum hum ! Cette négation mangée, ce "franchement" : Le Monde aime apparemment les masques transparents. On croit entendre le son de la voix. Nicolas Sarkozy a ainsi tous les éléments en main pour tenter d'identifier la "source", avec autant de diligence que les pirates de "Surcouf". On pourra ainsi recueillir à la "source" ces nouvelles informations sensationnelles.