les trois grâces et le voile islamique

Alain Korkos - - 0 commentaires

Un article de La Tribune de l'Art nous apprend, en date du 12 mars dernier, que les Trois Grâces de Cranach actuellement exposées au Louvre ont été censurées à Abou Dhabi.

En effet, "Au mois de novembre dernier, les quelques acheteurs du Monde à l’aéroport d’Abou Dhabi pouvaient constater avec surprise que l’appel à mécénat pour l’achat des Trois Grâces publié par le Louvre était vigoureusement barré de noir à l’emplacement des fesses, des sexes et des seins des trois indécentes jeunes femmes" :

Voici la parution originale, retrouvée par nos services dans Le Monde du 23 novembre 2010 :

Les Trois Grâces de Cranach, c'est ce tableau pour lequel a récemment été lancée une souscription nationale :

Les trois Grâces par Lucas Cranach, 1531

Vaste coup de comm' du Louvre qui se fit mousser en achetant une oeuvre pas vraiment indispensable quand on sait qu'il possède déjà, entre autres peinturlures de Cranach, cette Vénus de bien meilleure qualité :

Vénus debout dans un paysage par Lucas Cranach, 1529

On pourrait en sourire, de cette censure d'Abu Dhabi. Se dire que ça n'a aucune importance. Sauf que la France est en train de construire, dans cette capitale des Émirats arabes unis, un "Louvre Abou Dhabi".

Le projet a dès son origine soulevé maintes contestations, pour une foule de raisons. Françoise Cachin (ancienne directrice du musée d'Orsay récemment décédée) avait co-écrit avec Jean Clair (ancien directeur du musée Picasso) et Roland Recht (membre de l'Institut) un violent article à ce sujet dans Le Monde du 7 février 2007. Son titre avait le mérite d'être précis : Les musées ne sont pas à vendre - Les oeuvres d'art sont un patrimoine à montrer, pas une attraction ni une marchandise.

"L'exemple actuel d'Abou Dhabi, écrivait-elle, est alarmant. Ce pays d'à peine 700 000 habitants se propose de construire, dans un site touristique et balnéaire afin d'en augmenter l'attractivité, quatre musées, dont un inévitable Guggenheim, et un « français » portant la griffe « Louvre », mais obligeant à des prêts à long terme tous nos grands musées, dont les responsables n'auront plus leur mot à dire. Ce sont nos responsables politiques qui sont allés offrir ce cadeau royal et diplomatique. Contre près de 1 milliard d'euros... N'est-ce pas cela « vendre son âme » ?"

Par ailleurs, il faut savoir que les conservateurs français sont également chargés d'acquérir sur le marché international des zeuvres qui seront accrochées dans ce Louvre des sables. Oeuvres qui resteront la propriété personnelle de l'émir et non celle de l'État d'Abou Dhabi, oeuvres qui subiront la censure. Car les peinturlures occidentales à caractère religieux ou les nus plus ou moins olé-olé à prétexte mythologique risquent fort de subir les foudres de l'émirat, ces larges coups de stylo-feutre sur des exemplaires du Monde en sont la preuve éclatante.

Mais il y a peut-être un moyen de voir la chose d'un autre oeil, il suffit de se dire que ces trois grâces d'outre-Rhin sont revêtues d'un voile islamique très-très ajouré…

 

Le musée du Luxembourg à Paris présente actuellement et jusqu'au 23 mai 2011 une exposition intitulée Cranach et son temps où l'on voit plein de tétons teutons.

 

L'occasion de lire ma chronique intitulée Faites chauffer la cire! ou... le sexe s'épile-t-il pour plus de sex-appeal?, dans laquelle il est question de nanas à poil sans poils peintes par Cranach et quelques autres prétendus artistes totalement obsédés que c'en est une véritable honte, ah !

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