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Winston Smith : misanthrope
Les inspecteurs font un pas vers la désobéissance
http://www.mediapart.fr/club/blog/sebastien-rome/310810/les-inspecteurs-font-un-pas-vers-la-desobeissance
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Les cadres de l'éducation sont en pleine «crise de confiance»
http://www.mediapart.fr/journal/france/010910/les-cadres-de-leducation-sont-en-pleine-crise-de-confiance
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construire l'école transparente :
http://skhole.fr/construire-l-%C3%A9cole-transparente-par-philippe-danino-et-christian-laval
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Livrets de compétences : entrent en vigueur à cette rentrée 2010
http://pythacli.chez-alice.fr/recent34/livrets-competences-03.pdf
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"Tous surveillés, tous surveillants? »
revue : hommes et libertés Ligue des droits de l’homme
numéro : Hors série Printemps 2010 :
on peut le trouver auprès des section locales de la LDH ou bien le consulter en ligne: http://www.ldh-france.org/H-L-numero-146
« La surveillance des citoyens au nom de l’ordre public, tantôt généralisée et tantôt ciblée sur des « classes dangereuses », est vieille comme l’Etat moderne. […]
A cet ancien tropisme s’ajoute une obsession plus récente qui, insidieusement, fait le lit de la surveillance universelle : l’idéologie du « risque zéro ». L’illusion que le progrès scientifique et technique permettrait une protection contre tous les risques du début à la fin de la vie conduit à accepter des restrictions des libertés et des atteintes à la vie privée. »
il est question plusieurs fois de l'éducation notamment dans cet article : on ne fiche pas les enfants
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« Une société de surveillance? »
auteur: LDH
édition: LA DECOUVERTE
collection : sur le vif.
http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Une_societe_de_surveillance__-9782707157331.html
Au cœur du combat contre les projets de fichiers gouvernementaux, la LDH dresse ici un tableau inquiétant de la situation en France, où le recul des libertés menace la vie privée, l’action militante, le travail social, les associations de défense des droits… Mais la mobilisation de la société civile peut faire reculer les gouvernants. Expliquer, alerter, mobiliser : la défense des libertés et de la vie privée appelle plus que jamais à la « vigilance citoyenne » et au débat démocratique le plus large.
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« Contribution ahurissante d’Alex Türk, président de la CNIL, à la commission sur la dictature électronique. Ce n’est pas vraiment nouveau mais c’est la CNIL qui le dit et les députés ne pourront pas dire « nous ne savions pas« . Big brother est là, et bien là. »
http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article14641 -
Martine Repain
Je tiens à préciser d'entrée de jeu "d'où je parle" : enseignante retraitée, j'ai toujours essayé (dans la mesure du possible) de m'inscrire dans la tradition Freinet.
Or,
Cette émission m'a scandalisée : c'était à se demander si ce débat n'avait pas pour raison d'être de se "payer la Polony". Mr Birenbaum lui a fait subir un interrogatoire de type policier, insupportable. Et le dossier de Laure Daussy ne fait que confirmer cette hypothèse.
Je ne vois pas l'intérêt de ce genre d'émission et ne la regarderai plus.
MR -
zozefine
un conseil de (re)lecture, que j'ai faite pendant mes études et ensuite mes recherches en didactique du FLM, et qui, dans le fond, m'a en même temps totalement découragée et absolument passionnée, comme un défi majeur fait à l'enseignement du français (et des autres matières) et auquel on ne répond pas :
Labov, William – Le parler ordinaire. La langue dans les ghettos noirs des États-Unis, Paris, Minuit, 1978, p. 111-136 (« Le sens commun »).
bien sûr, il y a aussi et depuis des recherches passionnantes sur le français oral, à déguster également avec jubilation et effarement, jubilation parce que ça soulage, et effarement parce qu'en tirer les conséquences didactiques/pédagogiques du point de vue des méthodes et des programmes, et d'une manière générale du point de vue de l'accession au(x) savoir(s), est une chose désirable mais qui ne se fait pas aux étages sidéraux et inter-sidéraux des technocrates oligarches qui discutent, pontifient, découpent, dégraissent et décident dans leurs salles de réunion feutrées, et loin du monde - et en tout cas loin des salles de classe. -
Winston Smith : misanthrope
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2010/05/31052010Accueil.aspx
je vous recommande les fiches remises aux inspecteurs
Primaire : augmenter la taille des classes
Primaire : Réduire les remplacements
Primaire : Scolarisation à 2 ans
Primaire : Rased
Primaire : Intervenants extérieurs en langue vivante et assistants étrangers
Secondaire : plus d'élèves par classe au collège
Secondaire : Fermer les petits établissements
Secondaire : Supprimer les décharges
Secondaire : Optimiser les remplacements
Secondaire : "Rationaliser" l'offre scolaire
Secondaire : L.P. : revoir l'offre de formation
Secondaire : Revoir les IDD
Général : emplois administratifs
je trouve ce commentaire du café pédagogique étrangement décalé:
"Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés". Aucun enseignant ne sera épargné par les mesures Chatel qui frapperont d'une façon ou d'une autre les écoles et les établissements. Mais certains corps, certains enseignements même seront particulièrement affectés par la stratégie de grignotage imaginée par le ministère.
décodage : la seule mesure qui affecte réellement chaque enseignant c'est l'augmentation éventuelle du nombre d'élèves par classe, nous sommes coutumiers des fluctuations d'effectifs ça peut varier de 7 à 8 élèves entre une classe et une autre , entre une année et une autre, concrètement ça ne va pas changer grand chose. Quand on dit que "certains corps seront affectés" on dit queel nombre de fonctionnaires de ce corps va diminuer c'est à dire que le robinet des recrutements va être fermé pour les étudiants (réduction de postes aux concours de recrutement). Et quand on parle d'enseignements, alors on parle du nombre de postes pour certaines disciplines là encore en terme d'ouvertures aux concours.
l'ensemble de ces mesures de casse ne touchera quasiment pas les profs, à vous de chercher les véritables victimes de ces mesures de rigueur, puis ensuite demandez-vous à qui profite la politique de rigueur en général, et enfin demandez-vous qui seront les prochaines cibles. -
Juléjim
Je comprends ton écœurement mais je ne partage pas ton pessimisme, à mon avis prématuré. Le coup de règle (à calcul) paraît tellement violent que cela pourrait avoir valeur de test. Pour tout le monde. Car si cette offensive, qui prend des allures de "solution finale" pour l'école publique, ne provoque pas une réaction de grande ampleur de la part de tous ceux pour qui l'école publique est une grande affaire, alors oui, nous pourrons considérer que la bataille est définitivement perdue. Mais le fait que des personnels non enseignants (inspection/direction), certes syndiqués, se démarquent ainsi d'une politique qu'ils sont sensés appliquer sans barguigner, est exceptionnel. Serait-ce un 1er signe d'un front du refus plus large à venir ? -
Juléjim
... c'est dire si la situation est grave.
Une amie, ré-éducatrice en Rased, m'envoie ce matin le mail fwd suivant :
" COMMUNIQUÉ
Les inspecteurs et les personnels de direction ne seront pas les fossoyeurs de l’Éducation nationale
Le ministre de l’Éducation nationale a exposé l’objectif principal des années scolaires à venir en termes de postes à supprimer dans le primaire et le secondaire :
- suppression progressive des maîtres spécialisés E sous couvert de sédentarisation
- suppression des RASED
- disparition des psychologues scolaires
- abandon de la scolarisation des « 2 ans »
- généralisation du recours à des personnels non titulaires pour assurer les remplacements
- augmentation du nombre d’intervenants extérieurs à l’Éducation nationale dans le second degré (à la place de profs), mais suppression dans le premier degré (langue vivante)
- augmentation du nombre moyen d’élèves par classe dans les premier et second degrés
- suppression des établissements de petite taille (écoles -EPLE) avec regroupements sous prétexte de rationaliser les moyens
- transformation de postes en HSA et d’HSA en HSE
- suppression des heures d’IDD
- « rationalisation » de l’offre de formation pour les élèves du second degré
- mutualisation des secrétariats et des conseillers
- réduction des postes administratifs…
Les inspecteurs et personnels de direction, comme tous les enseignants, savent que ces mesures vont renforcer les inégalités et toucher prioritairement les élèves les plus fragiles, les secteurs où les services publics font déjà défaut. Ces propositions auront des conséquences désastreuses pour la réussite scolaire de tous les élèves.
Le ministère attend de la part des personnels d’encadrement la plus grande « loyauté » (synonyme ici d’allégeance).
Il est nécessaire que chaque inspecteur, chaque personnel de direction, refuse les mensonges et les manipulations ainsi que le soutien à une politique de démantèlement de la Fonction publique aux conséquences désastreuses pour l’ensemble de la population.
Le système éducatif, déjà ébranlé par les mesures précédentes, n’a jamais été aussi gravement menacé.
Les inspecteurs et les personnels de direction ne seront pas les fossoyeurs de l’Éducation nationale
Le secrétariat National
snpi-fsu
Le secrétariat général
snU.pden-fsu "
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Ben mon colon...
:-(( -
peheme
Incroyable Natacha Polony qui pense qu'il n'y a pas plus de violence mais qu'il est légitime d'en parler beaucoup plus, au risque de faire basculer des votes ?
Il y a 40 ans de ça, nous traitions notre prof de physique chimie, signifiant qu'elle "couchait". C'était faux, mais le jeu était déjà de faire craquer les profs pas faits pour le métier. Un autre prof bégayait ... il n'a fait que passer.
Je crois que les humains sont les mêmes depuis des millénaires et le problème de l'école, c'est les profs, comme Natacha. Et les enfants, surtout.
Sans être un voyou (normes de l'époque) j'ai volé les cerises du presbytere, mis le feu à des poubelles contre le portail de l'école ...
A mon arrivée au collège à 10 ans, j'ai subi l'attaque d'autres élèves ... un test imbécile que les enfants savent faire subir aux autres (la poussée), et on est devenus copains. Oui, il y a des violences.
J'ai le sentiment que beaucoup de gens ont oublié le passé, d'autant plus que ça permettra de stigmatiser certains élèves, éventuellement basanés. Je ne vais pas au bout de l'émission : c'est trop .. inutile. Pourquoi y aurait-il plus de violences à notre époque ? alors qu'il y a tellement plus de profs.
Relisez la littérature svp, pour découvrir à quel point les choses s'améliorent. Conclusion : que toutes les Natacha profs deviennent journalistes et bossent au Figaro, là où on peut les oublier tout à fait.
Ah, encore Natacha .... je me barre. -
Dams
J'ai trouvé dans ce débat un consensus général entre tout les participants . Les problèmes de l'école ont plus été des constats que des débats.
La règle sociologique, que toute violence à pour origine un problème de communication a été évoquée, en reportant le problème de communication sur la société mais en ne remettant surtout pas en cause le système éducatif.
Le rôle d'un professeur est double celui d'enseigner mais aussi d'évaluer (de « juger») un élève (notes , appréciations, conseils de classe).
Cette double fonction n'est jamais mentionnée dans les débats et c'est dommage.
Ne serait ce pas ce rôle de « juge » qui est à l'origine de la violence dans les écoles ?
La violence a augmentée sur 30 ans et comme par hasard, il y eu la surpression du certificat d'études, la fin du BEPC en tant qu'examen indépendant, en fin de terminal les admissions dans les études supérieures se font sur dossier (sauf la FAC : ouf ! un lieu de savoir qui échappe à ce flicage normatif des professeurs de la maternelle à la fin des études supérieures).
Cette fonction de « juge » continue sa montée puissance dans les médias : combien de sujet télé sont sur l'échec en FAC ? on commence même à parler de concours d 'entrée à la FAC et on réfléchi à un bac en contrôle continu.
La séparation des pouvoirs est une base de la démocratie alors pourquoi les élèves n'ont ils pas le droit à une évaluation scolaire indépendante ? -
Annie Sétoualé
40 minutes d'émission, et je ne sais toujours pas de quoi on parle !
C'est quoi un pédagogiste ? C'est quoi un anti-pédagogiste, bon sang de bon soir ? Me voilà obligée à une session de rattrapage en pleine ligne jaune, à aller lire des trucs que je n'ai pas encore lu - honte à moi sans doute - rien que pour savoir de quoi on parle.
Je ne suis pas prof, j'ai pas d'enfant. J'ai commencé à lire les messages, mais je ne suis pas allée jusqu'au bout tellement je me sens en dehors du truc. Apparemment je suis la seule buse qui comprend pas le film. Bon l'enfant au centre ou pas au centre. Je suppose que le pédagogiste il colle le môme au milieu. C'est ce que je comprends du petit résumé au dessus de l'émission. Mais ça ne me dit pas trop ce que ce qu'il y a derrière cette histoire de centrage ou ex-centrage.
Ces dernières semaines, il apparaissait qu'on pouvait sans peine regarder des émissions dont on ne connaissait pas grand chose au sujet. Là je dois dire, que si ce que j'entends est loin d'être inintéressant, un petit rappel, une petite contextualisation m'aurait bien aidée.
Bon j'y retourne -
i-jeanm
Passons aux détails sur lesquels je ne te rejoins pas.
[quote=Damien]Au 19e siècle, les positivistes vont donc se servir du modèle scientifique pour instaurer une sorte de décret sur la possibilité d'atteindre une vérité absolue sur le monde via un modèle scientifique rigoureux. Cette pensée elle-même va prendre du plomb dans l'aile à la suite de la théorie d'Einstein, qui va critiquer celle de Newton. La théorie de Newton en physique étant considérée à l'époque comme la connaissance la plus fiable que nous puissions avoir sur le monde, il s'agit 'd une sorte de révolution. On commence alors à s'inquiéter : puisqu'il est possible de reprendre une loi scientifique pourtant largement admise et fonctionnelle, alors cela veut dire que les théories peuvent toujours être amenées à changer. Problème donc si l'on veut considérer que la connaissance scientifique est conjointe à la notion de vérité absolue.
La théorie de la gravitation de Newton était déjà mise en défaut avec des phénomènes comme l’anomalie ( à l’époque ) de la précession de la périhélie de mercure ( la chasse à la planète manquante n’a pas donné de résultats ) . La relativité a permis de l’expliquer. La théorie de la gravitation Newton est toujours utilisable pour peu que l’on se restreint à son domaine de validité. C’est même conseillé, la relativité générale est bien plus compliquée à comprendre. Juste pour fixer les idée de la différence de niveau, la troisième loi de Newton se voit au lycée, la théorie de la relativité générale se voit en master ( et en fin de master )
Il faut plutôt regarder du coté de la remise en cause du déterminisme en physique avec la mécanique quantique qui est probabiliste. Avant, les probabilités servaient à travailler faute de connaître les paramètres cachés. À l’époque, c’était un gros choc, la fin du rêve de la prédiction de l’avenir par l’utilisation de lois scientifiques.
Tu as l’air d’avoir une dent contre l’utilisation des mathématiques. On trouve un allez-retour continuel entre les maths et la science. La science découvre une nouvelle structure, les mathématiciens caractérisent les propriétés de cette structure. On récupère ainsi un cadre plus rigoureux pour travailler. Les mathématiques ne sont pas forcément une passion, c’est surtout un moyen de description très efficace, encore faut-il l’utiliser comme il faut.
En éducation, les mathématiques permettent de faire travailler la logique et le raisonnement dans un cadre bien définie sans les problèmes de sens que peut poser un texte littéraire ou les concepts qui se rajoutent quand on veut décrire la nature.
Par contre les écritures condensés demandent d’être extrêmement bien comprises pour éviter de se tromper sur leur signification mais bon, c’est mieux qu’une formule de plusieurs pages pour travailler.
Ta vision d’une éducation basée sur la programmation est je trouve excellente mais je me demande si on parle de la même programmation. Je suis la définition du codeur, c’est à dire l’écriture de règles précises qu’un ordinateur suivra sans sourciller en utilisant les données qu’on lui donne. Pas de compréhension des règles requises, pas d’imagination, pas de création ( je ne considère pas le hasard encadré par des règles non définies par soit-même comme une création ), on reste dans le domaine défini par les règles. Aucune remise en cause non tolérée possible. -
Damien (dit le Farfadet)
Je vais me lancer dans un exercice assez farfelu (pour un farfadet, être farfelu est un point d'honneur), mais comme je suis à Toulouse pour mes vacances et que l'émission se charge mal là où je dors, je vais me retrouver à participer au débat concernant une émission que je n'ai pas vue (hormis les premières secondes).
Le premier point qui me semble essentiel, autour de la notion d'éducation, c'est que comme d'habitude on a créé artificiellement deux grands axes (pour ensuite s'étonner qu'ils ne sont pas en désaccord sur tout, comme c'est étrange). En gros, soit c'est le savoir à transmettre qui est premier, soit c'est l'élève qui est premier. Le tout dans une logique de transimission que je soupçonne donc de fonctionner selon le schéma de Shannon : Emetteur - message - canal - Récepteur. Donc on a posé la question du message, on a posé la question du récepteur. Implicitement, on considère alors que le problème du canal est relié à la question du savoir et de l'élève, et on oublie tout bêtement les profs puisqu'on a surtout invité des journalistes.
De mon côté, je ne sais pas si la question de la transmission est véritablement posée dans l'émission. C'est-à-dire demander "qu'est-ce que transmettre?", avant de demander "comment transmettre?". Parce que dans l'immédiat, si on se demande si les élèves sont au centre où si le savoir est au centre, on ne se demande pas ce qu'est transmettre et on a affaire à deux manières différentes d'envisager la transmission. D'un côté il y a les partisans du savoir-information, il faut transmettre par des cours, beaucoup de cours avec beaucoup de contenu et de toute manière ça leur fera des pieds à ces petits cons parce qu'ils ont oublié la signification du mot "apprendre" (bachoter). De l'autre, on a l'école de l'éducation-pour avoir-des élèves-éduqués (comprendre polis, mignons, gentils, la vie est belle). Du moins c'est ainsi que se présente l'opposition médiatiquement construite. Les partisans de la transmission d'informations par un travail austère et les partisans de la transmission d'un certain mode de vie, d'une forme de communauté humaine dédiée à l'apprentissage. Donc on n'est ni d'accord sur l'objet à transmettre ni sur la manière de faire acquérir cet objet.
Puis on vient à prétendre qu'au fond c'est le système éducatif qui est en crise. Donc les partisans de l'éducation prétendront que depuis le départ le dispositif éducatif ne permet pas la communauté dédiée au savoir, et les partisans de l'information affirmeront que le savoir se perd parce que les élèves apprennent moins qu'avant, que le niveau des diplômes n'est plus ce qu'il était. Les deux affirmeront sans doute que de toute manière c'est l'objectif des diplômes qui est mal posé, les "éducateurs" affirmeront que les diplômes ne sanctionnent pas une éducation, les "formateurs" plaideront pour leur part en faveur d'une moins grande réussite au bac, d'un niveau définitivement relevé, qui nécessitera un véritable travail de la part des élèves.
On peut ajouter en parallèle de tout ça leurs reproches mutuels. Du point de vue du "formateur", l' "éducateur" est le représentant des sciences de l'éducation et non de l'éducation elle-même. Les sciences de l'éducation recevront les reproches successifs d'être une invention récente, qu'on a commencé à les écouter dans les années 60 (ce qui aurait mener à la catastrophe actuelle), qu'au fond ce n'est qu'une manière de déposséder l'enseignant de la reconnaissance qu'on lui accorde de savoir enseigner. Les sciences de l'éducation seraient une technocratisation de l'école, donc le processus ne mènerait qu'au néolibéralisme, un modèle de construction du crétin de base plus facilement manipulable. Les "formateurs" affirmeront dès lors que l'éducation est avant tout une affaire de savoir, que le mode de vie n'existe que relativement au savoir, que l'étude est la seule manière d'éduquer correctement, que le rapport prof élève ne tient que dans la mesure où un prof transmet à ses élèves les informations nécessaires pour s'orienter convenablement en toute chose.
L' "éducateur" pour sa part affirmera que le "formateur" est un idéaliste qui cache avant tout sa volonté de pouvoir sur les élèves et son traditionnalisme des plus conservateurs. En gros, le "formateur" serait avant tout celui qui ne veut pas se lier à ses élèves, qui ne se sent pas concerné par eux et qui rêverait de leur enseigner sans avoir à retrousser ses manches. Cela donnerait une sorte de haut-parleur sur pattes qui au fond ne se soucie même plus de comment présenter son cours du moment qu'il donne les informations nécessaires. Celui-là serait surtout fier d'être ce qu'il est, l'individu avec un diplôme qui peut dès lors écraser ses élèves au nom de leur ignorance, laquelle ne tiendrait au fond qu'à leur faute (petits branleurs!!!). L' "éducateur" considère que cela cache un non-sens, parce que l'on naît ignorant et que l'enseignant doit être celui qui nous met sur la voie qui nous fait aimer le savoir. De plus il considère que le "formateur" est le véritable responsable de l'ignorance des élèves, en tant qu'il ne s'y prend que par la violence pour leur enseigner. De plus il affirmera que l'enseignement le plus approprié aux programmes gouvernementaux est celui du "formateur", et qu'en ce sens c'est lui le premier représentant de l'échec de l'éducation nationale.
Ce que je dépeins ici ne correspond pas à des individus, plutôt à des archétypes. Je pense toucher juste en affirmant qu'aucun prof ne correspond parfaitement à l'un où l'autre des portraits, mais que chacun prend position sur un certain nombre de ces critères, ce qui permet ensuite aux médias de présenter le problème de l'éducation selon cet antagonisme. Ce que l'on retrouve donc ici même, avec une "formatrice", un "éducateur", et un "centriste". Joie, bonheur, félicité, maintenant nous avons tout compris à pourquoi l'éducation marche mal : "C'est parce que machin dit des conneries. - Ok, mais truc aussi dit n'importe quoi. - Ah... Bon... Alors comment on s'en sort ? - Essayons de voir sur quels points ils s'accordent. - Ils disent que le système marche mal. - Ah ben voilà, on a la solution maintenant ! - On crame tout ? - Non, on dit que c'est la faute au système et on laisse les politiques se démerder avec la patate chaude."
Alors voici le moment où je prêche pour ma paroisse : tintin tintin tralala ploum poum zwing tsoin tsoin
[large]Voici le moment du farfadet[/large]
Ouh la la j'ai peur...
Alors je crois que tout ceci est assez mal problématisé, parce que les deux postulats sont bancals par avance. Contre l'enseignement comme transmission d'information, il y a deux arguments fondamentaux, dus à l'emploi d'un modèle similaire à la théorie de Shannon :
1) Entre donner et recevoir, il y a une faille infime qui n'est pas problématisée. Il ne suffit pas de dire pour être entendu. Il ne suffit pas de présenter pour être compris. Il ne suffit pas d'être examiné pour retenir. L'éducation n'est pas une simple semaille où on attend ensuite que ça pousse en priant dieu pour que la récolte soit bonne. Autrement dit il n'y a pas de canal reliant le prof aux élèves. Ce n'est pas simplement un problème d'attention. Il n'y a pas de canalisation, aucun système de vases communicants.
2) Le savoir n'est pas une information. Le plus simple consiste à dire que si les informations s'égrainent et peuvent se donner une par une, un savoir ne se morcèle pas et constitue par avance un réseau. Dire une phrase en implique de nombreuses autres, Donner une formule implique toute une théorie derrière. Avec une histoire passée et à venir, des évolutions possibles, des points qui fonctionnent plus ou moins bien, des modèles en train d'être réformés à l'heure actuelle, etc. Le savoir est un réseau évolutif, dynamique, il n'est pas un simple objet, ni constitué de simples objets que l'on pourrait séparer puis reconstituer comme des légos.
Le deuxième problème ramène au premier : être entendu une fois ne suffit pas quand on pense le savoir comme de l'information à donner aux élèves. Cela donne un ensemble toujours partiel, souvent mal agencé, mal saisi, invalide dans sa totalité, valable par endroits seulement.
Le deuxième postulat est tout aussi stupide : considérer que la communauté mène à l'apprentissage, qu'il s'agit avant tout de saisir une méthode psychologico-sociale pour enseigner laisse entendre qu'après tout le dispositif même d'enseignement ne constitue pas un rapport de pouvoir. Ce qui est purement idéaliste. Il y a un modèle de pouvoir présent, en France, qui est le modèle magitral, même s'il donne l'air de s'estomper dans l'enseignement secondaire, notamment avec la violence des élèves telle qu'elle est habituellement présentée. Pour autant, le modèle magistral existe encore dans les prépas et dans les facs, et c'est selon lui que l'on forme les enseignants. Ce modèle est parlant et peut éclairer sur les insuffisances des sciences de l'éducation. Jamais on ne pose dans ces théories que l'enseignement magistral ne peut pas fonctionner sans une reconnaissance au moins symbolique de l'autorité du prof dans sa matière. Il y a une démonstration de force constante, et une forme d'incongruité dans l'espoir de s'en débarrasser pour ne garder que l'éducation. Ce rapport de force fait partie de l'éducation. Il peut servir à écraser les élèves, mais il permet également un conflit constructif. Et surtout, s'il n'existe pas, alors la classe, dans le dispositif que nous connaissons, se désorganise et produit des effets disparates (pas forcément du désordre ou de la paresse, pas nécessairement non plus du travail commun et de l'étude).
On pourrait, à la manière d'Erving Goffman définir une face de l'enseignant et une face de l'élève. L'enseignant est à la fois une sorte de prédicateur et de grand juge. D'un côté il doit écarter toute apparence d'ignorance face aux élèves. Il doit avoir toutes les réponses, ce qu'il ne sait pas n'existe pas. Dans les écoles, de toute manière, on n'interroge jamais les élèves sur ce qu'ils savent mais sur ce qu'ils répètent. L'ignorance, par contre, fait partie de la posture de l'élève, il est censé ne rien savoir, c'est-à-dire avoir besoin de l'enseignement du professeur. Dans une sorte d'idéal type, l'élève est l'ignorance pure qui désire apprendre et l'enseignant le savoir pur qui se déverse dans l'apprentissage. L'élève n'a rien à apporter, tout au plus doit-il essayer de suivre l'enseignant avec toutes ses facultés pour participer à son cours.
Ensuite l'enseignant est un grand juge, il décide de ce qui est vrai et de ce qui est faux, de ce qui est important de ce qui ne l'est pas, de ce qui mérite de s'y attarder de ce qui ne le mérite pas. S'il est le détenteur du savoir, alors ce qu'il présente est savoir et ce qu'il ne présente pas ne l'est pas, ou alors est encore inaccessible à l'élève dans une dimension propédeutique. A l'inverse, l'élève est celui qui se trompe, qui potentiellement se trompe. L'enseignant est donc là pour faire justice au savoir et remettre l'élève sur le droit chemin.
Ce sont, une fois encore des figures qui relèvent de l'archétype pur et simple. Mais c'est ainsi que fonctionne le rituel. Le rituel peut très bien mal fonctionner. Et c'est ce qui peut donner des classes incontrôlables, totalement absentéistes, etc. Non pas parce que les élèves ont d'emblée décidé de détruire le dispositif (ça pourrait arriver, bien entendu, mais la plupart du temps j'ose croire qu'autre chose est en jeu en parallèle), mais parce que le dispositif magistral n'est plus en place. La fonction première de ce dispositif est de rassembler des élèves pour qu'ils suivent les consignes d'un enseignant. Une sorte de conduite des conduites. Il s'agit d'amener les individus à adopter un certain comportement, paisible. Il ne suffit pas à faire travailler les élèves, mais il est censé les amener au comportement socialement réclamé de calme et de silence.
Ce qui crée un dysfonctionnement dans un certain nombre de postulats des éducateurs, c'est son incompatibilité fondamentale avec le dispositif magistral, notamment parce que le dispositif magistral n'individualise pas les élèves, bien qu'il les prenne en charge un par un. Certes on pourrait envisager de réformer totalement ce dispositif, pour autant à ma connaissance la majorité des "éducateurs" ont abandonné ce combat depuis longtemps. D'ailleurs ce serait autant une réforme culturelle qu'institutionnelle, qui devrait donc toucher également les enseignants et les administrateurs eux-mêmes.
Vous allez me dire qu'on en revient à la crise du système lui-même. A la fois dans les contenus des programmes, qui fonctionnent de manière informationnelle, et dans le dispositif d'enseignement lui-même. Je crois pour ma part que l'enseignement, en tant que démarche antérieure aux dispositifs d'enseignement actuels, échappe aux problèmes systémiques, à partir du moment où la transmission est bien problématisée. L'enjeu de transmettre consiste avant tout à faire corps avec les élèves et d'autre part à faire corps avec la constitution du savoir, et non avec le savoir lui-même.
Sur ce dernier point il y a beaucoup à dire. Actuellement, l'enseignement des filières générales au lycée, par exemple, correspond à une séparation entre technique/spécialité et culture générale. Mais vous remarquerez que cette séparation correspond à peu près à celle entre "sciences" et "littérature". On ne reproche pas spécifiquement aux littéraires de manquer de culture générale quand on discute des programmes d'enseignement (sauf quand on reproche à la totalité des programmes d'en manquer), c'est plus souvent ce qu'on pose aux filières S. Le récent débat sur l'histoire en S a fait beaucoup de bruit, alors qu'il n'y a eu que peu de bruit quand on a supprimé les mathématiques et les sciences en terminale L et en ES. Etrangement, de la même manière on déconseille d'aller en L, on affirme qu'au fond en S on a plus de possibilités. On entend par-là que l'enseignement technico-scientifique en S n'est pas jugé rattrapable au même titre que les éventuels manques de culture générale quand on arrive dans l'enseignement supérieur.
A mes yeux, cela en dit long sur cette séparation très étrange, Premièrement, la nécessité de culture générale ne S provient d'une longue tradition d'une culture de l'écriture. Quelqu'un qui ne savait pas écrire correctement, ou pire que ne savait pas écrire du tout, portait un stigmate social important. Montrer que l'on sait bien écrire a longtemps été une sorte de critère de représentation sociale important. De ce point de vue, on peut éventuellement comprendre l'importance d'une culture générale (comprendre "littéraire") chez les scientifiques, et ce depuis bien avant les filières S, ES et L. Cette culture de l'écriture commence à disparaître tout doucement. L'écriture est compensée par des techniques (correcteur orthographique, ordinateur qui enregistre la voix et traduit en écrit), d'une part, et elle devient elle-même une technique. Le langage SMS, par exemple, ne correspond pas à une disparition de l'orthographe et de la grammaire, elle est en premier lieu la réponse à un problème d'espace et de rapidité d écriture. Cette technique se superpose aujourd'hui à la culture de l'écriture en lent déclin, ce qui donne cette sensation d'une dégénérescence à certains (du genre Finkielkraut), mais ceux-là ne comprennent pas qu'il s'agit en fait d'un glissement souterrain, un changement de la place et de la problématique de l'écriture.
Deuxièmement, il y a la possibilité de "rattraper" la culture générale. Et là ce n'est plus un problème de l'écrire, mais du lire. C'est là, à mon sens, le noeud véritable du problème de la séparation entre science et culture générale, et cela provient de la conception informationnelle du savoir. On enseigne de plus en plus les sciences comme une sorte de protocole, avec des règles, des lois, des formules et des schémas expérimentaux. Fred B me répondrait sans doute qu'il demeure des démonstrations en mathématiques, on doit répondre à des problèmes, il y a une forme de réflexion. Certes, j'en conviens parfaitement. Mon problème n'est pas de prouver que les programmes de S sont destinés à des zombies décérébrés. Je tiens plutôt à signaler qu'il y a une technicité et un contenu informationnel fondamental dans cette manière de procéder. On ne fait pas d'histoire des sciences, on apprend des lois. On ne discute pas des modèles paradigmatiques, on apprend simplement les découvertes mathématico-scientifiques sans jamais expliquer d'où elles proviennent. On apprend effectivement une culture mathématique et scientifique, mais on n'est nullement dans la démarche du développement des sciences et des mathématiques. Appliquer un savoir scientifique ou mathématique n'est pas forcément aisé, pour autant cela demeure bien plus aisé que de discuter de ce qu'on ne sait pas encore. Là où je veux en venir : il s'agit d'un enseignement informationnel, bachoter et appliquer. Que cela soit difficile, je ne le démens pas. Par contre, j'affirme que ce n'est pas une démarche de savoir mais d'information.
Quel est son intérêt? Il s'agit essentiellement à mes yeux de former le plus rapidement possible des élèves à une forme d'utilité. C'est pourquoi on ne discute pas le savoir mais on transmet des informations. Socialement, l'enseignement vise de plus en plus à un usage économique rapide, et déjà au 19e siècle ce problème existait mais plus dans une logique de servir l'Etat que dans celle de servir les entreprises. Or, me direz-vous, la culture générale n'est pas appropriée à cette dimension pratique. Je réponds que c'est évident. Mais j'ajouterai juste ceci : la culture générale est conçue comme une propédeutique informationnelle à une étude de la constitution des savoirs. La philosophie, par exemple, est avant tout une recherche. De même pour la littérature ou pour l'histoire... L'histoire n'est pas un domaine destiné à une mise en pratique à partir d'information, et quand elle est un outil, c'est pour comprendre des mécanismes politiques, économiques ou encore sociaux, jamais pour des prévisions véritables. La culture générale vise donc à coordonner une exigence informationnelle de l'éducation aux deux principaux métiers auxquels mènent de telles études : l'enseignement et la recherche. Certes on peut devenir conservateur de musée, ou journaliste, ou ce que vous voulez. Mais les seules filières dans lesquelles on prétend que cela aura une utilité immédiate sont celles-là.
Pour autant, comme je le soulignais plus haut, l'information n'est pas un savoir, et n'importe quel chercheur vous dira que la culture générale n'est pas à proprement parler ce qui vous forme à la recherche. Ce qui donne son caractère de propédeutique à cette culture générale. Car effectivement, ce sont des ersatz de connaissance que n'importe qui pourrait apprendre en lisant un livre. Il s'agit donc d'une illusion d'information permettant de coller au modèle actuel de programme ministériel, illusion que les élèves devront ensuite apprendre à détruire et surpasser pour développer un véritable savoir. Ce que les études supérieures, genre licence, devaient initialement faire, et que l'on repousse aujourd'hui de plus en plus vers le master. D'ailleurs, le master lui-même commence à donner les cours de méthodologie que l'on donnait il fut un temps en licence.
En même temps, en ce qui concerne la transformation des individus par le savoir, un des buts présentés dans le discours "éducateur", ne peut pas avoir lieu autrement que dans un modèle de constitution du savoir, et non d'indigestion d'informations. Les informations se trouvent dans des livres, le problème devrait être d'apprendre à chercher soi-même, à constituer un travail non seulement de documentation mais de croisement rigoureux, d'analyse subtile, etc. Le jour où les élèves auront moins d'heures de cours et plus de travail en bibliothèque, en atelier ou en labo, pour mettre en place des analyses, des schémas expérimentaux, des inventions techniques, alors peut-être y aura-t-il de nouveau du savoir dans les écoles. Nous en sommes arrivés là à cause d'un postulat selon lequel il faut savoir pour inventer. Donc on partait du principe qu'il fallait mettre au courant d'un maximum de savoirs en un minimum de temps pour prévoir ensuite une véritable recherche. Ce principe ne pouvait que mener à un modèle informationnel, l'information étant avant tout la technique de transmission d'informations rapide et efficace. Mais il est évident que cela ne peut correspondre à une transmission de savoir, et cela a fait place à un système éducatif plus abrutissant qu'intelligent.
Quant au problème de la violence dans les écoles, il s'agit d'un faux débat. Parce que si la violence existe certes dans les écoles, elle la déborde et est en vérité un problème social général. Il faut par conséquent étudier la violence dans notre société avant de pouvoir discuter de la violence à l'école. Dans cette problématique, l'étude du néolibéralisme est importante. Nous ne sommes pas exactement dans un système de régression des valeurs, dans une transformation des valeurs. Partant de là, la violence devrait aussi être étudiée dans un heurt entre deux modèles, l'un émergent, l'autre déclinant. Il faut sur ce point savoir se garder d'une posture passéïste ou au contraire fataliste, et savoir réformer par l'invention et non par une vaine répétition d'anciens ou de nouveaux dogmes.
Donc pour répondre au problème général, la question du dispositif de transmission est brouillée par avance par la notion d'information qui élude le savoir au profit d'un faire immédiat censé exclure le savoir. D'ailleurs, le processus de Bologne recommande de remplacer la notion de savoir (knowledge) par celle de compétence (skill). Du coup, le débat entre les "éducateurs" et les "formateurs" ne tient pas debout, puisque cela fait longtemps que l'on a jeté le bébé avec l'eau du bain. Il n'y a plus rien à transmettre, et le débat sur la transmission consiste à accuser un canal qui n'existe pas, au lieu de se demander ce que l'on transmet véritablement. Le jour où l'on donnera moins d'heures de cours et plus de travail en bibliothèque ou en labo, à essayer de répondre à des problèmes posés en cours, peut-être pourra-t-on de nouveau se demander comment transmettre un savoir. Pour l'instant, nous pouvons nous contenter de considérer l'éducation comme une programmation des étudiants à un modèle de mise en application économique immédiate. Le savoir n'existe pas en France actuellement, à part dans certaines niches désormais coupées du public. Il a fait place à une société de l'information. -
Natacha Polony
Post scriptum : Loin de moi l’envie de m’étendre sur le sujet, mais je constate que Guy Birenbaum parle à mon sujet de « conflit d’intérêt », ce qui me semble, une fois encore, un terme pour le moins impropre et tendancieux. Le conflit d’intérêt implique, comme son nom l’indique, un intérêt. En l’occurrence, n’étant justement pas « intéressée » aux ventes du livre de Claire Mazeron, ayant rédige cette préface gratuitement, pour la beauté de la cause, et parce qu’il rejoignait mes propres ouvrages qui (je le précise pour Laure Daussy qui n’a pas dû les lire) ne prônent absolument pas un « retour à l’école traditionnelle » (encore une interprétation ! Chère Laure, quand on donne des leçons, il faut se montrer irréprochable…), n’étant pas intéressée, donc, je ne vois pas bien en quoi il y aurait conflit d’intérêt. Le seul intérêt qui est le mien est de faire émerger les idées qui permettront à l’école de produire moins d’échec et moins d’inégalités. Et en cela, Claire Mazeron et moi avons un intérêt commun. Comme, d’ailleurs, ces institutrices que je cite et avec lesquelles je n’ai aucun lien particulier, si ce n’est que je trouve leurs analyses et leurs pratiques intéressantes et efficaces pour les enfants. Peut-être nous trompons-nous sur ces idées, ces analyses, mais c’est un autre problème. Cher Guy, je vous l’ai dit sur le plateau : je suis de l’école Jean-François Kahn. Contrairement à ce que vous semblez croire, je ne suis pas de droite, et de toute façon, peu importe. Je pratique un journalisme qui ne se contente pas, tel le commentaire sportif, de déclarer qu’untel a fait un croche-pied à untel et que machin a marqué. Je tente de comprendre le pourquoi du comment. De trouver un sens ; par exemple au fait qu’une école qui prétend avoir pour seul but de réduire les inégalités n’a jamais été aussi inégalitaire. Cela vaut, je crois, toutes les arguties entre journalistes.
Cordialement,
Natacha Polony -
Natacha Polony
Chère Laure Daussy,
Vous vous doutez, je pense, que l’article que vous m’avez consacré appelle quelques remarques. Je ne demanderai pas, comme le suggère un de vos internautes, de droit de réponse officiel, ce genre de démarche m’ayant toujours paru un peu dérisoire. Je me contente donc de ce commentaire de texte que, je l’espère, vous accepterez de bonne grâce, vous qui vous êtes livrée à l’exercice sur mes propres articles. Certes, j’aurais aimé pouvoir vous lire avant l’émission, ce qui m’aurait permis de vous répondre directement, et de rappeler les paroles exactes que j’ai prononcées lorsque vous m’avez interrogée pour votre enquête. Le procédé en eût été élégant…
Tout d’abord, je suis forcée de vous faire remarquer que vous pratiquez exactement le genre d’amalgames et de généralisations que vous affirmez avoir trouvé dans mes articles, et que vous dénoncez avec la vigueur d’un sans-culotte fraîchement converti. Les mots ont un sens, chère Laure, et vous semblez l’oublier. « Lorsque Polony, dites-vous, évoque les thèses de Meirieu, elle parle systématiquement de "pédagogisme", et non des "pédagogues". » Et de citer en lien hypertexte le seul article que vous avez pu trouver pour étayer cette pétition de principe. En fait, vous extrayez de son contexte le seul article du Figaro où j’emploie ce terme (je viens de le vérifier dans mes archives), et cet article, vous ne pouviez certes pas le savoir, m’avait été commandé par ma rédaction en chef pour agrémenter une page de ma collègue Marie-Estelle Pech sur ce qu’elle appelait la « galaxie des anti-pédagos ».
Pour ma part, je n’utilise jamais ces termes qui me semblent, comme je l’ai dit dans l’émission, très réducteurs et impossibles à comprendre pour ceux qui ne sont pas de la partie. De plus, j’estime que les enseignants que je cite habituellement sont tout autant « pédagogues ». Ils ne pratiquent simplement pas la même pédagogie. Dans mes articles, je préfère donc expliciter ce que sont ces pédagogies « modernes », et cela donne ceci : « les pédagogies qui, pendant des années, ont développé des méthodes constructivistes, c'est-à-dire où l'enfant construisait lui-même ses savoirs en procédant par tâtonnements successifs » (24/02/2010 « Le fléau de l’illettrisme »).
Vous citez également un article que j’avais écrit sur les hommes politiques qui s’intéressent à l’éducation, et vous pointez le terme « pédagolibertaires », selon vous dépréciatif. Vous n’aurez pas manqué de noter que ce terme désigne des hommes politiques tels que Daniel Cohn Bendit, qui est bien, de son propre aveu, libertaire, et qui soutient les tenants des pédagogies constructivistes puisqu’il a été rejoint politiquement par Philippe Meirieu. Pardonnez-moi, mais il s’agissait de nommer ces courants, ce qui est complexe, et je devais marquer la différence avec les « libéraux modernistes » tendance Copé et les « républicains », tendance Chevènement. Auriez-vous trouvé mieux ? Quant à savoir si ces réformateurs de l’école ont ou non « pignon sur rue », comment qualifieriez-vous quelqu’un qui fut conseiller d’un ministre, inspira une loi d’orientation et notamment les structures de formation des professeurs, et qui est reconnu par la quasi-totalité des médias comme un interlocuteur de premier plan ?
Dans ce même article (car vos sources sont bien peu nombreuses pour une telle enquête) je « loue » les républicains en écrivant qu’ils « voient dans l'école un lieu spécifique, de transmission des connaissances et de formation des citoyens ». Cette phrase est purement descriptive, et si je ne cache pas que j’ai la même vision de l’école, n’importe qui est libre de penser que cette vision, loin d’être bénéfique, est réactionnaire. « A noter, ajoutez-vous, que sa collègue, Marie-Estelle Pech, en charge avec Polony des pages éducation du Figaro, décrit les mêmes "républicains " comme "tenants d'un enseignement strictement disciplinaire et élitiste". Une description beaucoup plus distanciée, donc, que celle de Polony. » Plus distanciée, ou plus conforme à votre vision ? « Elitiste » ne comporte donc pas, pour vous, un jugement de valeur alors que ces mêmes républicains ne se reconnaissent pas dans ce terme ?
Je ne vais pas infliger à vos internautes un tel décryptage sur l’ensemble de votre œuvre. Je préciserai simplement que j’ai préfacé le livre de Claire Mazeron, qui était une de mes interlocutrices depuis longtemps, parce qu’il me semblait intéressant pour quiconque veut comprendre le système éducatif. Il n’y a là aucune collusion ni aucune amitié, mais une vision commune. Les journalistes qui font des livres d’entretien ou co-signent un ouvrage sont donc pour vous interdits d’écriture ? Et ceux qui admirent sans le dire ? Quant à votre affirmation selon laquelle je n’informe pas mes lecteurs que Claire Mazeron est Vice-présidente du Snalc (« classé » à droite, comme vous l’écrivez mais dont une bonne part des militants, et Claire Mazeron en particulier, sont issus de la gauche républicaine…) cette affirmation est tout simplement fausse. Vous utilisez pour l’étayer un article qui faisait partie d’un ensemble dans lequel j’avais déjà précisé la qualité de Claire Mazeron.
Plus largement, je crois que vous confondez, et même que vous mêlez, dans vos articles comme dans ceux des autres, information et analyse. Pour moi, je sais faire la différence. J’apporte à mes lecteurs des informations, des faits, et j’y ajoute (mais les lecteurs ne sont pas idiots, ils le comprennent) une lecture de ces faits qui aide à en comprendre le sens. Et si je citais les mêmes interlocuteurs que tous mes confrères, je ne ferais pas mon travail de journaliste. Car, comme je vous l’ai dit lors de notre discussion (mais vous n’avez pas éprouvé le besoin de l’ajouter à votre article), mes collègues citent tous les mêmes experts, à qui ils donnent une parole exclusive, sans que cela semble vous choquer. Philippe Meirieu, François Dubet, Marie Duru-Bellat sont omniprésents dans les médias et vous n’y voyez aucun monopole de pensée ? Quand je cite la sociologue Nathalie Bulle (j’ai bien dit sociologue, chercheuse au CNRS et pas polémiste) alors qu’elle est ostracisée par mes confrères, c’est moi qui commets une faute ?
Mais Luc Cédelle et Pascal Bouchard vous ont eux-mêmes démentie lors de l’émission en admettant pour l’un son admiration pour Philippe Meirieu, et pour l’autre, qu’il avait fait sa thèse avec lui… Objectivité… Je vous demande donc : à quand la même analyse sur les articles du Monde, de Libération… Car ce qui vous gêne sans doute est que je suis la seule journaliste, non pas qui « prend aussi peu de distances », mais qui justement prend des distances avec Philippe Meirieu. Le pluralisme vous dérange-t-il à ce point ? J’ignorais, au moment où vous m’avez appelée, que vous aviez été remerciée en janvier du site internet du Figaro, et que vous aviez, durant votre passage là-bas, consacré des articles aux questions de société, et notamment d’éducation. Je ne savais pas que la tonalité de vos articles était par exemple en faveur de l’interdiction de la fessée. Vous ai-je vexée en y consacrant un des premiers textes de mon blog ? J’en serais désolée. Mais vous qui vous piquez de déontologie, ne croyez-vous pas qu’il aurait été honnête de préciser aux lecteurs que vous avez quitté sur un litige l’employeur qui est le mien ? On pense ce que l’on veut du Figaro, et de mes écrits en particuliers, mais qui les lit y constatera une liberté totale, notamment quand il s’agit de critiquer les réformes de l’actuel gouvernement ou des précédents (c’est pour cette raison que la dernière question de Guy Birenbaum lors de l’émission était quelque peu déplacée, ou du moins d’une formulation tendancieuse).
Je l’ai dit au cours de l’émission, je préfère débattre du fond, des idées, plutôt que de dénier à mes interlocuteurs leur légitimité. Je pense que les lecteurs d’Arrêt sur image auraient, eux aussi, préféré parler de ce qui se passe à l’école, plutôt que de mon cas, qui ne mérite pas tant d’honneur.
Cordialement.
Natacha Polony -
jpf
le figaro serait donc un journal militant ( ouahh la nouvelle ) mais est ce le journal qui transforme les journalistes en militants ou doit on donner des preuves de son militantisme pour y travailler -
delphes
Ce forum tombe très très bien. J'ai une info de première main sur les médias et l'éducation, et je cherchais où la caser ici.
Canal + (Lundi Investigation) tourne cette semaine dans mon lycée un reportage. Ils sont dégoûtés...
Mon lycée est dans une banlieue très chaude du sud de l'Ile-de-France.
Mais c'est un lycée (donc 2/3 des vrais cas problématiques des collèges ont été "éliminés"), et un peu le lycée "modèle"** ZEP/APV (Zone éducation Prioritaire / machin machin Violence) des zones "chaudes", avec plein de sous, et plein de dispositifs, ce qui fait que tout le monde s'y sent très bien, profs et élèves, très libres, etc. Rien de vrai là-dedans. Rien de représentatif des situations très tendues que l'on peut connaître dans le collège à 100 mètres de nous par exemple....
Sauf qu'ils n'ont pas eu l'autorisation pour tourner ailleurs !!! Interdiction du Rectorat ; interdiction des inspecteurs ; interdiction du ministère. Le seul établissement où on les a autorisé à tourner, situé dans une ZEP, c'est le nôtre. Et ils passent leur journée à tourner dans des salles de classe tranquille, avec des profs qui leur disent qu'ils ne vivent pas le "malaise enseignant", même s'ils en sont conscients "ailleurs".
C'est quand même dingue, ces interdictions de tourner.
je glisse le mail ici... Peut-être que vous le retiendrez, que vous vous en souviendrez... J'aimerais bien avoir des précisions sur le sujet quand le reportage sortira. Ou un de ces jours.
Si quelqu'un a des infos ou peut en avoir...
** oh, oui, vrai modèle ; j'y suis depuis trois ans, je crois que j'ai vu tous les hommes politiques en vue là-bas. Sarkozy devait venir l'été dernier, mais y a eu 10 morts français en Afghanistan au même moment, alors il a pas pu, vous comprenez. Mais on a vu Darkos, Jack Lang, Pécresse ; Manuel Valls, j'en parle pas, on a ses enfants en cours, normal qu'il vienne un peu ;-). C'est le lycée "bling bling" par excellence. On est censé appliquer la réforme avant tout le monde. A la limite, c'est presque nous qui l'inventons. On est le lycée de l'avenir, vous comprenez.... ;-))))))
ps : émission intéressante, j'en parlerai dans d'autres posts je pense. Le sujet nous intéresse forcément, hein ? Hé, ho ? y a combien de profs sur ce site ? Beaucoup, oui, je sais, on ne nous refait pas. Télérama, les Inrock, Libé, Arrêt sur images, Courrier international.... La dure vie du prof... Vous recevez des propositions avantageuses d'abonnemnts à tous ces trucs quand vous signez pour la première fois à l'Educ'Nat', dingue, non ? -
kawouede
La revue de presse d'un meirieuiste éclairé : http://philippe-watrelot.blogspot.com/
c'est tellement mieux que Polony qui ne fait qu'enfoncer des portes ouvertes pour les lecteurs du Figaro et les fans de Finkielkraut -
David
Une émission assez foutraque qui donne le sentiment de ne pas être dirigée. On vous sent, Guy Birenbaum, complètement dépassé par le sujet (manque de préparation ? d'intérêt ?), laissant tantôt les invités en roue libre, tantôt les interpellant sur des questions anecdotiques qui n'ont pas vraiment d'intérêt sinon pour le journaliste que vous êtes (je partage le sentiment d'autres asinautes d'un procès de mauvaise foi intenté à Natacha Polony). Bref en tant qu'enseignant et sur un sujet qui m'intéresse, j'avoue être assez déçu de la médiocrité du débat.
Cela dit, et à votre décharge, il faut avouer que ce débat entre "pédagogues" et "anti-pédagogistes" est en soi d'un intérêt assez limité (on a l'impression à écouter les intervenants qu'il se cantonne à savoir qui a insulté qui en premier). J'ai toujours pensé qu'il y avait, dans cette querelle de chapelles, des outrances des deux côtés et je préfère à cet égard me considérer comme agnostique. Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises méthodes dans l'absolu, il y a un enseignant, des élèves et un savoir à transmettre. L'enseignant est à peu près libre de choisir la méthode qui lui semble la plus efficace pour que ses élèves s'approprient le savoir, l'essentiel au bout du compte, c'est quand même le résultat. Et je me méfie des ayatollahs des deux bords qui viennent vous dire qu'en dehors de la méthode qu'ils utilisent (et qui fonctionnent probablement pour eux et pour les élèves auxquels ils ont affaire) il n'y a point de salut.
P.S. Que pense Judith Bernard, en tant qu'enseignante et chroniqueuse d'ASI, de la question ? -
Marie la dern'
Intéressant quand même, même si les invités étaient sacrément polissés.
On perçoit que l'éducation est très politique, qu'elle repose sur des valeurs, une éthique. On n'enseigne pas pareil si l'on pense que les larmes d'un gamin sont presque à coup sûr du cinéma ou si l'on pense qu'elles peuvent marquer une réelle émotion. On n'enseigne pas pareil si les élèves ont d'emblée la culture dominante que reprend la culture scolaire ou s'ils possèdent une culture différente.
C'est ça la pédagogie peut-être, rendre les savoirs accessibles à tous. Permettre aux élèves de percevoir le rapport entre les savoirs et eux: intéressé par et intéressé à.
Et ça, je pense que tout le monde sera d'accord. Alors, le clivage, il est où? Il aurait fallu inviter quelqu'un de plus franc: Briguelli (pas sûre de l'orthographe), je pense qu'on aurait mieux compris de quoi il retourne vraiment. -
Elihah
Remarque:
il y a un comm en haut de page qui commence par:
"le jour où l'on parlera de la violence (des profs) faite aux élèves, et je ne parle pas de "violences physiques", alors là on aura fait un sacré pas... et ça c'est pas "nouveau"...."
je voudrais ajouter que la violence institutionnelle touche tous les participants de la MaisonMammouth, élèves, profs, admins, atos....
Mais bon, c'est juste une remarque... -
Mike le héros
Bon, je n'ai pas pu aller au-delà de l'heure d'émission...
En parlant de mélanges des genres, je trouve tout simplement dégueulasse (et pas nécessairement envers Natacha Polony) de faire figurer cette enquête de Laure Daussy sur la page de l'émission.
Soit vous faites une émission sur le discours médiatique en général, soit vous faites une émission spécifiquement sur Natacha Polony comme vous en aviez fait sur Barbier, mais cela serait quand même bien que les choses soient claires pour tous, et exploiter le grave problème de l'école pour finalement se concentrer sur le cas "bien plus intéressant" de Natacha, ça craint !