Gaza : "Le risque génocidaire n'a pas été pris au sérieux"
La rédaction - - 53 commentairesTélécharger la video
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Dix mois après l'attaque du Hamas contre Israël, dix mois après le début de l'offensive israélienne, que reste-t-il de Gaza ? Un nouveau bilan, probablement sous-évalué, fait état de 40 000 morts dans l'enclave palestinienne, écrasée sous les bombes. Des dizaines de milliers de déplacés survivent dans des camps de fortune, et rien ne semble entraver la fuite en avant du pouvoir israélien, qui continue d'affirmer à la face du monde que le siège de Gaza a pour seul but d'extirper le Hamas de la société gazaouie. Face aux images de dévastation qui nous parviennent chaque jour, le débat continue : est-ce un génocide ? Notre invité est l'un des premiers à l'avoir théorisé, en décembre 2023, dans une analyse parue sur le site d'Orient XXI. Ziad Majed est politologue, professeur à l'Université américaine de Paris, spécialiste du Moyen-Orient.
Émission enregistrée le 19 août 2024.
Le génocide est-il une question de chiffres ?
Non, répond Ziad Majed. Dans son analyse, il prend en compte les victimes humaines, bien sûr - "Il y a une destruction de ce groupe, ou d'une partie du groupe menant à des dizaines de milliers de morts" -mais aussi l'ampleur des destructions systématiques des moyens de subsistance des Palestiniens de Gaza : leurs habitations, leurs commerces, leurs stocks de médicaments. Ziad Majed rappelle également que les séquelles psychologiques de cette guerre, difficilement mesurables, marqueront pendant des années les Gazaoui·es.
Une violence inédite à Gaza
Pourquoi parler de génocide à Gaza, et pas ailleurs ? Pour Ziad Majed, la guerre menée par Israël depuis octobre 2023 est un cas à part dans l'histoire de la violence : "La concentration de feu, la violence, la puissance et la technologie combinées à une barbarie dans cette violence, à Gaza, en dix mois, a tout dépassé. On n'a jamais vu autant de violence et autant de souffrances concentrées dans 360 km2 où vivent 2,2 millions de personnes."
"Embrasement", le mot qui tache
Les médias raffolent du mot "embrasement" pour décrire le risque que le conflit ne devienne régional, et implique à l'avenir le Liban, l'Iran ou la Jordanie. Un mot qui fait bondir Ziad Majed : "Ce qui est malheureux et pervers dans cette notion, c'est que c'est comme si 40 ou 50 000 morts à Gaza, un cas d'école de génocide, devenait presque un détail, occulté parce qu'il peut y avoir un «embrasement» dans la région."
Pour aller plus loin
- L'analyse de Ziad Majed parue sur le site d'Orient XXI.
- Notre dossier sur le 7-Octobre et la guerre menée à Gaza par Israël.