Effondrement : "le survivalisme dépasse les catégories politiques"

La rédaction - - Alternatives - 69 commentaires


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Et après ? Comment survivre, ou vivre, après l'effondrement ? Collectivement ou individuellement ? Pour en parler sur notre plateau, Pablo Servigne, collapsologue, co-auteur de "Comment tout peut s'effondrer" et "L'entraide, l'autre loi de la jungle", Bertrand Vidal, sociologue spécialiste de l'imaginaire des catastrophes et du survivalisme, auteur de "Survivalisme", et Denis Tribaudeau, instructeur de survie, auteur de "Survie mode d'emploi" et "Guide de la survie en ville".

le survivalisme à la loupe

Bunkers, boîtes de conserves entassés dans une base autonome durable, équipement : les images du survivalisme sont nombreuses, des reportages à la télé-réalité en passant par les chaînes YouTube. Un salon du survivalisme a même vu le jour pour la première fois en France en mars 2018.

Bertrand Vidal revient sur l'histoire de ce mouvement apparu dans les années 50 en pleine guerre froide, dans une période marquée par la peur du communisme : "Aujourd'hui, il y a un focus sur la menace environnementale". Pablo Servigne note que le survivalisme regroupe un "éventail de postures différentes" dont un "retour au sauvage". Denis Tribaudeau explique le succès de cette volonté de "se réancrer avec le vrai" par un "mal-être social".

quelle idéologie politique ?

Si les survivalistes originels étaient influencés par le libertarianisme aux États-Unis, est-ce encore le cas aujourd'hui ? Pour Vidal, il s'agit encore de personnes qui ne veulent pas être "dans la grille", "hors du radar" : les survivalistes sont critiques de la société de consommation et de la façon dont "elle s'insinue dans nos modes de pensée".

Le mouvement est aussi influencé par l'extrême-droite, dont Piero San Giorgio, un racialiste blanc qui fut proche d'Alain Soral, dont il a supervisé les stages de survie d'Egalité et réconciliation. Mais Servigne précise que "le survivalisme dépasse les catégories politiques". San Giorgio reste "une figure du survivalisme", nuance Tribaudeau. Vidal note qu'une constante du survivalisme est "l'idée que la nature vaut mieux que la culture". Or, la définition de ce qu'est "la nature" permet d'identifier un allié et un ennemi, qui peut être l'étranger.

solidarité vs. individualisme

Sommes-nous condamnés, en cas d'effondrement, à la guerre de tous contre tous, comme le montre par exemple le film La Route ? Pour Servigne, cela ne correspond pas à la réalité : en cas de catastrophes, les individus s'entraident, et dans la nature, les groupes qui survivent le mieux sont les plus coopératifs. Tribaudeau abonde : dans ses stages, la personnes considérée comme la plus faible peut être celle qui apporte la solution.

Autre échelle et autre solution : celle des Villes en transition, comme Grenoble, qui préparent la société du futur. Vidal remarque que la ville de Grenoble était déjà pionnière en terme d'industrialisation au XIXe siècle, avec l'idée que "demain sera meilleur qu'aujourd'hui", ce qui n'est plus une idée partagée aujourd'hui : "On est passé d'un imaginaire du progrès à un imaginaire du regret."

(Emission préparée avec Romain Gaspar)

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