Affaire PPDA : "Tout un milieu savait, tout un milieu le protégeait"

La rédaction - - Silences & censures - Scandales à retardement - 22 commentaires

Autopsie d'une affaire hors normes


Télécharger la video

Télécharger la version audio

La "chute d'un intouchable" pour Complément d'enquête, un "système PPDA" pour Libération : depuis février 2021, les témoignages de femmes s'accumulent contre l'ancienne star du JT de TF1, Patrick Poivre d'Arvor. Elles sont aujourd'hui 27 à accuser PPDA de harcèlement, d'agressions sexuelles ou de viols. Que disent ces témoignages de Patrick Poivre d'Arvor et de son statut à TF1, chaîne sur laquelle il a régné pendant 22 ans, de 1986 à 2008 ? Comment la première accusation publique, formulée par Florence Porcel en février 2021, a-t-elle entraîné une avalanche de nouveaux témoignages et de nouvelles plaintes ? Comment les journalistes ont enquêté sur l'un de leurs confrères les plus puissants ? Dernière question, qui se fait plus pressante à chaque nouvelle révélation : qui savait, à TF1 et dans le reste de la profession, ce que cachait la toute-puissance de PPDA ? De son côté, le journaliste nie en bloc toutes les accusations portées contre lui et a déposé plainte pour "dénonciation calomnieuse" contre 16 femmes. Il a également porté plainte en diffamation contre le Parisien.

Disons-le tout net, cette émission n'a pas été simple à organiser. Des dizaines de coups de fils, d'entretiens et de longues discussions n'ont pas suffi à faire venir sur notre plateau d'anciens employés de TF1. Toutes celles et ceux à qui nous l'avons proposé ont refusé de s'exposer devant les caméras, craignant pour beaucoup d'être automatiquement catalogués dans la catégorie des complices passifs. Signe, sans doute, que PPDA pèse toujours, au moins dans les esprits. Pour tenter d'autopsier cette affaire hors normes, nous recevons cette semaine Muriel Reus, présidente-fondatrice de l'association "Femmes avec", vice-présidente de #MeTooMedia, et qui a témoigné contre PPDA dans les pages de Libération. À ses côtés, nous recevons également Benoît Daragon, journaliste au service "Récits" du Parisien, qui a enquêté sur les agissements de PPDA dans la tour de TF1.

Les invitées du soir de PPDA

Depuis le début de l'affaire, les plaignants et de nombreux autres témoins racontent comment PPDA invitait quasi-quotidiennement des femmes à assister au JT de 20 heures, puis à le rejoindre dans son bureau. Une situation ubuesque pour Muriel Reus, qui raconte à Libération avoir vécu exactement la même mécanique : "Personne ne s'est jamais interrogé sur ce ballet permanent de jeunes femmes invitées sur ce plateau ? Pourquoi on ne s'est jamais posé la question de la sécurité de toutes ces femmes conviées le soir ?"

Une directrice d'école protégeait ses élèves

Catherine Lambret, ancienne directrice de l'Institut pratique de journalisme (IPJ), a raconté à Complément d'enquête que pendant dix ans, elle n'envoyait aucune de ses élèves femmes aux endroits où travaillait Patrick Poivre d'Arvor, pour les protéger. "Certains disent qu'ils ne savaient pas, Madame Lambret savait", note Benoît Daragon. Pour Muriel Reus, le témoignage de Catherine Lambret est "imparable" : "Qui pourrait le remettre en cause ?"

Après 20 heures, plus personne à TF1 ?

Qui savait ce qu'il se passait dans le bureau de PPDA ? Auprès de France 2, son ancien joker au JT, Dominique Bromberger, estimait que les faits s'étant déroulés pour la plupart après 20 heures, il est normal que la rédaction n'ait pas eu vent des faits reprochés à la star de TF1. Une réponse à côté pour Muriel Reus : "Après 20 heures, on était dans l'entreprise, il se passait des choses. Je pense que personne n'a voulu voir, n'a voulu savoir."

Les plaignantes espèrent un procès

Face à ces accusations, PPDA riposte en justice. Le journaliste a porté plainte contre seize de ses accusatrices pour "dénonciation calomnieuse". Une aubaine pour Muriel Reus, visée par cette plainte, qui espère que cette action ira au bout pour "maintenir" ses accusations au tribunal. Elle anticipe, sur le sujet des violences sexuelles, le "procès du siècle".

Pour aller plus loin 

- L'enquête du Parisien qui a déclenché l'affaire
- Le
dossier de Libération consacré à l'affaire PPDA
- Le témoignage de Muriel Reus dans Libération
-
Le site de #MeTooMedias 


Lire sur arretsurimages.net.