Copé, Pellerin, Baylet : réhabilitons la politique
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 32 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
"Il a été tuyauté ?" demande sur France Info Fabienne Sintès à Eric Ciotti.
On parle de Jean-François Copé, l'angelot Copé (si cher à Didier Porte) qui, trois jours plus tôt, annonçait en exclusivité mondiale à Delahousse, sur France 2, qu'il serait candidat à la primaire de la droite. C'était dimanche soir, c'est à dire quarante-huit heures avant la mise en examen, pour dépassement des frais de campagne, de son ennemi préféré Sarkozy, intervenue mardi soir. D'où la question directe de Sintès à Ciotti : il a été tuyauté, Copé ? Aujourd'hui sarkozyste (après avoir été fillonniste) le président du Conseil départemental des Alpes Maritimes ne veut certes pas l'affirmer. Mais il se pose bien des questions, Ciotti. Il ne peut s'empêcher de relever la coïncidence. Quel délice matinal rétrospectif, de revoir cette interview de l'angelot, aujourd'hui, après la mise en examen de Sarkozy. Delahousse : "pourquoi cette accélération ?" Copé : "parce qu'en fait, je crois que je suis prêt". Ô merveille de la soudaine révélation. Ô beauté du foudroiement politique. Il est vrai qu'il avait lui-même été mis hors de cause par les juges, quelques jours plus tôt. Et Copé d'ajouter cette précision, qui prend tout son sel après une maturation de trois jours : "jamais je n'aurais imaginé d'être candidat si j'étais mis en examen". Alors, tuyauté ? On se dit beaucoup de choses, dans le secret des cabinets d'instruction, entre magistrats, avocats et greffiers qui se connaissent bien. Mais ne cédons pas au complotisme. Admirons la coïncidence.
"J'ai voulu m'adresser à un public jeune". C'est la réponse de la ministre remaniée de la Culture, Fleur Pellerin, quand on lui rappelle la calamiteuse visite télévisée de son bureau, que nous avions racontée ici. Devant les caméras du Petit Journal, elle avait révélé ne savoir faire fonctionner ni son téléviseur, ni son téléphone interministériel, ni son lecteur de CD. Elle n'avait pas lu les livres qui s'entassaient sur ses rayonnages, et ne connaissait pas l'auteur du tableau qui tapissait son bureau. Mais ce n'était pas de l'incompétence. Elle "s'adressait à un public jeune". Le "jeune", c'est bien connu, n'adore rien tant que l'analphabétisme satisfait. Saluons la dextérité de la communication.
Nommé sous-ministre à quelque chose, Jean-Michel Baylet laisse la gestion opérationnelle de La Dépêche du midi à son ex-femme, Marie-France Marchand-Baylet. C'est bien. C'est éthique. C'est très République exemplaire. Ainsi, se trouvent évités tous les risques de conflit d'intérêt. Ce n'est pas demain, qu'on reverra La Dépêche saluer à la Une la nomination comme ministre de son propriétaire, avec des adjectifs dithyrambiques, et une photo ancienne de dix ans, comme le relevait Le Petit Journal (étrangement plus implacable avec les censures de Baylet qu'avec celles de Bolloré). Qu'on se le dise : avec Baylet comme avec les autres, La Dépêche sera désormais implacable. Ah, un détail pourtant. Marie-France Marchand-Baylet est la compagne de Laurent Fabius, ex-ministre des Affaires Etrangères, président pressenti du Conseil constitutionnel. Mais aucun souci. Le Conseil constitutionnel ne prendra aucune décision concernant le Sud Ouest, le rugby, et le cassoulet. Faisons confiance à l'intégrité humaine.