Et un muffin aux olives pour Xavier Niel !

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 121 commentaires

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"Alors, il parait que Xavier Niel vous a donné quelque chose ?"

J'arrive, hier soir, à l'émission de Frédéric Martel Soft Power, sur France Culture. S'y trouvent rassemblés, outre un invité que nous connaissons bien, le sociologue Dominique Cardon, la fine fleur des journalistes ès-économie des medias, Marjorie Paillon, de France 24, et Emmanuel Paquette, de L'Express. Et une seule chose les intéresse, les émoustille : alors, il parait que Niel a participé à la collecte de Ulule. Il a donné combien ? Je confirme. Oui, Niel a souscrit un abonnement exceptionnel de solidarité sur Ulule (soulignons qu'il a fait ce choix-là, plutôt que celui du don défiscalisé, que l'on peut faire ici, sur la plateforme J'aime l'info). Il faut croire que Xavier Niel a de bons canaux d'information, qui dépassent son propre journal, puisque Le Monde, depuis quatre jours, n'a pas consacré une seule ligne aux redressements fiscaux qui nous frappent, avec Mediapart et Indigo (détail de l'affaire ici).

Scoop, donc : Xavier Niel a souscrit un abonnement exceptionnel de soutien de 1000 euros. Ce qui lui donnera droit aux contreparties de crowdfunding prévues pour ce montant : outre la participation à un apéro de l'équipe avec muffins aux olives, au plaisir de pouvoir nous suivre toute une journée, et de participer (depuis la régie) à l'enregistrement d'une émission. Ni plus, ni moins. Et si nous gagnons, nous le rembourserons, comme les autres -ah, ce plaisir suave de faire un chèque à Xavier Niel ! Mais on voit bien pourquoi Niel émoustille mes confrères. Parce qu'il est partout, ils l'imaginent même où il n'est pas. Mon confrère de L'Express, stupéfait, me prenant à part : "mais il n'est pas dans votre capital ?" Eh non, camarade. Ni directement, ni indirectement, ni par prête-nom interposé. Notre site a un actionnaire unique : le signataire de ces lignes. Point final. Et si le capital a vocation à s'ouvrir un jour, comme nous le disons depuis le début, c'est à l'équipe du site. Point final. Quand bien même Niel eût-il contribué pour le montant exceptionnel de 100 000 euros (que nous avons conçu pour son type de profil, avouons-le), il n'aurait pas eu droit à davantage qu'au muffin aux olives (peut-être dénoyautées, pour ce montant, le point mérite débat).

Ni Niel, ni aucun business angel d'aucune sorte, dans notre capital : la chose étant pour nous évidente, sans doute ne le répétons-nous pas assez, puisque le doute subsiste même chez les théoriquement mieux informés. C'est cette petite particularité qui garantit, depuis le début, notre totale indépendance. Et c'est celle que nous souhaitons voir perdurer. Avec un bon espoir de succès : en quatre jours de collecte, nous avons dépassé les 250 000 euros collectés, en additionnant les deux plateformes, soit la moitié de la somme dont nous avons besoin. Merci à tous ! Ne relâchons pas !

A vrai dire, la nouvelle qui, ce week-end, nous a fait le plus plaisir, ce n'est pas la souscription de Niel. C'est le soutien de quelques lanceurs d'alerte français, dont Stéphanie Gibaud, ex-UBS, que nous recevions dans cette émission. Ce soutien est significatif. Comme notre site, le phénomène des lanceurs d'alerte est né de la révolution numérique. Comme nous, c'est en empoignant les leviers numériques que ces David ont réussi à bousculer les Goliath des pouvoirs installés. Comme nous, ils dérangent. Pas étonnant, que nous nous retrouvions. Le parallèle s'arrête là. Chacun sa place, et son mérite. Les lanceurs d'alerte sont bien plus courageux que nous, qui ne faisons que notre métier de journalistes. Mais il est des soutiens qui donnent du sens à toutes nos petites agitations.

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