L'environnement, boudé par les hebdos
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 30 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Sarkozy ? En baisse. Hollande ? Pas terrible. Marine Le Pen ? Moins bien que son père.
Marion Maréchal-Le Pen ? Dans la bonne moyenne, mais pas plus. La bonne surprise, mais qui reste à confirmer, c'est Juppé. De qui ces verdicts ? Des sondeurs ? Non,mais presque : des patrons des hebdos politiques français, qui se sont confessés aux décodeurs du Monde, à propos des ventes de leurs hebdos, en fonction de la couverture choisie. Et c'est d'ailleurs sur cette désaffection de Sarkozy, que Le Monde choisit de titrer son intéressante enquête. Pourquoi, en dépit de ces échecs, les hebdos persistent-ils tout de même ? La force de l'habitude ? La question n'est pas posée.
Pourtant, il est permis d'estimer que le plus intéressant, dans cette enquête, n'est pas ce petit tiercé des têtes d'affiche politiques. Comme le rappelle Le Monde, les "Unes" consacrées à la politique intérieure française ne représentent, au total, qu'un tiers du total des Unes des hebdos concernés (L'Obs, L'Express, Marianne, Le Point et Valeurs Actuelles). Le plus important -point sur lequel Le Monde n'a pas interrogé non plus les directeurs d'hebdos- c'est le premier schéma de l'article, qui recense toutes les Unes de l'an dernier, classées par sujet. De loin, le plus grand nombre ont été consacrées aux sujets "culture loisirs santé, marronniers" (étrange amalgame, soit dit en passant, mais admettons). Au total, 53 sur la période. Et en queue de la liste, que trouve-t-on ? Mais oui, vous avez deviné. L'environnement : une couverture et une seule sur l'année, tous hebdos confondus. Pour les hebdos aussi, l'écologie, ça commence à bien faire.
Le Monde aurait pu choisir (comme le matinaute) de titrer son enquête sur cette information-là."Les hebdos français boudent l'environnement". Ce titre aurait-il suscité moins de clics, que le titre sur Sarkozy ? Ca reste à établir, mais on ne le saura jamais. A l'inverse, dans une démarche rationnellement attrape-clics, le journal aurait pu titrer sur "ces cinq marronniers qui font vendre les hebdos". Mais ni l'un ni l'autre. Bien que constatant la désaffection des lecteurs, le journal a tout de même choisi, dans une vertigineuse mise en abîme, de titrer sur Sarkozy, c'est à dire sur un sujet présumé non vendeur. Ou bien c'est un acte conscient d'héroïsme, ou bien c'est une démonstration involontaire de la manière dont le journalisme sur les medias se soumet parfois aux mécanismes mystérieux sur lesquels il investigue si brillamment.