A Marseille, l'ombre du "squale"
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 28 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
La hiérarchie de l'information a parfois ses mystères.
Une affaire occupe actuellement la police et la Justice des Bouches-du-Rhône. L'affaire est compliquée, elle met en cause un nommé Alexandre Guérini, industriel spécialisé dans le traitement des déchets, et actuellement mis en examen pour corruption, trafic d'influence, et blanchiment en bande organisée. Or, il se trouve qu'Alexandre est le frère de Jean-Noël Guérini, cacique socialiste, président du Conseil général des Bouches-du-Rhône. Le frère est-il impliqué dans les turpitudes (présumées) de son frère ? C'est toute la question. L'enquête en cours le dira (peut-être). L'affaire est suivie par la presse "nationale". Ni de trop loin, ni de trop près. Les sujets, en ce moment, ne manquent pas.
Jusque là, rien à signaler. Mais voici. Comme il est d'usage, tous les protagonistes sont évidemment placés sur écoutes. Les écoutes révèlent que les deux frères se parlent. Beaucoup. Toujours normal. Mais voici que les écoutes révèlent un beau jour que les Guérini ont été informés de l'ouverture d'une nouvelle information contre Alexandre. Et qui les informe ? Attention, à en croire plusieurs journaux, l'informateur s'appellerait...Bernard Squarcini. Comment ? "Le" Bernard Squarcini, dit "le squale", patron de la police secrète française, directeur de la DCRI, grand maitre des fadettes, saint patron des "farfelus" ? Oui, le même, par ailleurs ancien préfet de police de Marseille. Re-comment ? Son nom est prononcé dans les affaires marseillaises, et vous n'en savez rien ? Non. Parce que les journalistes d'investigation qui suivent le dossier n'insistent pas vraiment sur cet aspect. Dans la longue enquête du Point en vente cette semaine, qui fourmille de détails terrifiants sur les écoutes des Guérini, les allusions à Squarcini n'arrivent qu'en bas de l'article, en quelques lignes timides. (Le Parisien, quelques jours plus tôt, avait été plus explicite et donné davantage de détails). Pourtant, l'information est intéressante, non ?
Voilà pourquoi vos journaux (qui ont, ces temps-ci d'autres sujets d'intérêt, répétons-le), ne vous ont pas encore raconté que le chef de la police secrète française est mis en cause dans une affaire marseillaise. C'était notre contribution du matin aux mystères de la hiérarchie de l'information.