Le procureur de Paris invente l'enquête retardataire
Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 40 commentaires Télécharger la videoTélécharger la version audio
Tout. Le prix de chaque montre
, le tarif de chaque chambre d'hôtel fréquentée: si vous ne savez pas encore tout sur la coûteuse passion horlogère du député socialiste de l'Essonne Julien Dray, c'est que vous avez raté la presse française depuis près de deux mois. A peine l'affaire avait-elle éclaté, que les journaux débordaient de révélations et d'adresses. L'abondance de ces fuites n'a d'ailleurs pas indigné immédiatement. Sans doute hypnotisés par les scintillants détails révélés, nombre de défenseurs de la présomption d'innocence ou de camarades de Julien Dray ont tardé à se manifester. |
Si cette passion horlogère a été mise sur la place publique, c'est que des rentrées suspectes ont été décelées sur le compte du député, en provenance notamment d'un compte de l'association des "Parrains de SOS Racisme". Pourtant, dans l'enquête pour "abus de confiance" dont il est l'objet, Dray n'est pas mis en examen. Ses avocats n'ont pas accès au dossier. Il ne peut pas se défendre ouvertement. Aucune instruction n'est ouverte. L'enquête, diligentée par le seul parquet (placé sous l'autorité du gouvernement) dure depuis deux mois, sous un régime très particulier: celui de l'enquête préliminaire.
C'est que "l'enquête préliminaire" a un avantage: elle préserve le secret des investigations. Défense de rire, c'est un spécialiste qui le dit: le procureur de Paris Jean-Claude Marin, celui qui a précisément décidé, au jour d'aujourd'hui, d'en rester à ce stade, et de ne pas saisir de juge d'instruction. Il le disait sans rire au micro de RTL, ce matin, tout en réservant un scoop à l'émission: scandalisé par les fuites, M. Marin a décidé d'ouvrir une enquête. Excellente initiative. On pourrait, à l'occasion, inventer une nouvelle procédure: l'enquête retardataire.