-
LPR
La France passe en 2010 de la 18 ieme place a la 46 ieme place au niveau global
Et
Est classee ... 127 ieme ( sur 134 !! ) en ce qui concerne l'egalite des salaires
>< Ici le rapport en pdf ( en anglais ) /// page 138 pour la France >< -
Noëmie Cravatte
Une autre contribution, cette fois-ci pour répondre à cette idée que le féminisme serait "victimaire" (ou comment on détourne le sens des mots)
Texte écrit en 2004 par Saratoga sous le titre 'pourquoi on a défiguré le mot "victime"' (Blog d'Alonso)
"« Victime : personne qui subit la haine, les tourments, les injustices de quelqu’un. Par extension, Victime de (souvent attribut ou en apposition sans article) : personne qui souffre, pâtit (des agissements d’autrui, ou de choses, d’événements néfastes). » Petit Robert
Une victime est quelqu’un qui subit un préjudice et qui en souffre. On peut être victime d’une agression, d’un cambriolage, d’un vol. On peut aussi être victime d’un accident, d’un tremblement de terre ou d’une inondation. Les ressources physiques ou psychiques de la personne qui subit le préjudice n’interviennent en rien dans la définition de celui-ci. Le fait que je sois victime d’une noyade ne permet pas de conclure que je ne sais pas nager. Peut-être que je ne savais pas nager et que je me suis noyée dans deux mètres d’eau. Peut-être que j’étais médaillée d’or aux championnats du monde de natation mais que je suis tombée dans un redoutable torrent en crue. De la même manière, le fait que j’aie été victime d’un cambriolage ne sous-entend pas que je ne sais pas fermer ma porte à clé. Peut-être que j’avais vraiment oublié de fermer la porte. Peut-être a-t-elle été défoncée à coups de pied de biche. Le mot « victime » n’apporte qu’une seule information à mon sujet : quelque chose est arrivé qui s’est avéré néfaste pour moi et j’en souffre. Nulle part il n’est fait allusion à mes compétences.
En conséquence, par quel tour de passe-passe aberrant les termes « victime d’agression », « victime de violences » ou « victime de viol » pourraient-ils sous-entendre que la personne qui a subi le préjudice est plus faible psychiquement que quelqu’un d’autre n’ayant pas souffert des mêmes crimes ou délits ? Avec l’apparition du fameux « victimisme », la nouvelle mode veut que l’on associe le terme « victime de violences » au terme « faiblesse ». Du « On s’intéresse moins à celle qui réalise des exploits qu’à la victime de la domination masculine », écrit par Elisabeth Badinter dans son livre Fausse Route, au « Ma mère n’était pas une victime, elle était professeur de philosophie et aimait sortir et bien s’habiller » déclaré récemment par Franz-Olivier Giesbert sur un plateau de télévision à propos de sa mère battue par son père, tout nous porte à croire que les femmes peuvent être divisées en deux catégories : les femmes fortes, vivantes, courageuses, indépendantes, d’une part, et les femmes victimes de violences, d’autre part, les secondes étant nécessairement faibles, impuissantes, tétanisées de terreur sous leur couette, incapable de vivre. Pourtant, opposer les femmes fortes aux femmes victimes a aussi peu de sens que d’opposer les femmes grandes aux femmes aux yeux bleus. On peut être forte et victime, faible et victime, forte et pas victime, faible et pas victime. Les deux notions sont indépendantes.
D’ailleurs, comme c’est étrange... à peine a-t-on associé le terme « victime de violences » à « faiblesse » que l’on se dépêche de le désolidariser du seul terme qui devrait véritablement lui être adjoint, à savoir la « souffrance ». « Est-il possible d’ajouter les actes physiques aux sentiments psychologiques comme s’il s’agissait d’éléments de même nature ? Est-il légitime de réunir sous le même vocable le viol et une remarque désagréable ou blessante ? On dira que, dans les deux cas, une douleur est éprouvée. Mais ne serait-il pas plus rigoureux de distinguer entre la douleur objective et la douleur subjective, entre la violence, l’abus de pouvoir et l’incivilité ? » se demande Elisabeth Badinter, représentante de ce courant de pensée. Désormais, on est tout près de soupçonner les douleurs psychiques d’être une construction de l’esprit des personnes qui les subissent. Autrement dit, non seulement la « victime » est un être arbitrairement défini comme faible, mais en plus, ce n’est même pas sûr qu’elle souffre vraiment !
Une fois le mot « victime » vidé de sa substance et redéfini de cette manière, l’épouvantail du « victimisme » peut être brandi en toute impunité. Les « victimes de violences » ne sont plus des femmes courageuses, lucides et autonomes se battant contre la douleur, que l‘on pourrait admirer comme on admire les personnes malades se battant contre la maladie ou les personnes victimes d’un handicap (notez que dans ce cas, le mot victime n’a pas changé de sens) se battant contre le handicap. Ce sont des femmes faibles, aveugles et dépendantes qui font tout un raffut parce qu’elles s’imaginent souffrir quand, en fait, elles ne ressentent rien du tout.
Or qui sont-elles, ces femmes soudain transformées de combattantes en hystériques par un tour de passe-passe linguistique ? Elles sont les femmes qui dénoncent les violences sexuelles. Elles sont les femmes qui dénoncent les incestes. Elles sont les femmes qui dénoncent les coups et blessures. Elles sont les femmes qui dénoncent tous les jours les crimes commis par les hommes sur les femmes, par les parents sur les enfants - donc par les dominants sur les dominés. Elles sont la voix des dominé-e-s qui ont décidé que le silence devait cesser.
Mais, contrairement aux crimes que la société a pris l’habitude de reconnaître et d’intégrer, ces crimes particuliers que sont les crimes commis sur les femmes par les hommes et sur les enfants par les parents sont des crimes invisibles qui ne dérangent personne. Ce sont les révélations de ces crimes, et non les crimes eux-mêmes, qui troublent l’ordre public. Ce ne sont pas les violeurs qui violent qui font désordre. Ce sont les victimes qui parlent des viols qu’elles ont subis.
C’est pour cela qu’il faut faire taire les victimes de ces crimes. C’est pour cela qu’il faut nier ce qu’elles sont, donner un nouveau sens aux mots qu’elles emploient. On ne peut pas contrer leurs arguments en disant qu’elles ont tort - parce qu’elles ont raison. Mais on peut décrédibiliser leur parole en prétendant qu’elles ne savent pas ce qu’elles disent. La réalité nous déplaît ? Traitons-la d’hallucination." -
Noëmie Cravatte
Chère Judith, chers commentateurs,
Je me permets de vous faire lire quelques extraits tirés de "La domination masculine" de P. Bourdieu (à lire si ce n'est déjà fait), vous y trouverez ce que je veux répondre à chaque fois que l'on me parle de "servitude volontaire" ou de "choix" de carrière des femmes. Bonne lecture ! Au plaisir de vous lire !
[large]"La domination masculine est tellement ancrée dans nos inconscients que nous ne l'apercevons plus, tellement accordée à nos attentes que nous avons du mal à la remettre en question. Plus que jamais, il est indispensable de dissoudre les évidences et d'explorer les structures symboliques de l'inconscient androcentrique qui survit chez les hommes et chez les femmes. [...] J'ai toujours vu dans la domination masculine, et dans la manière dont elle est imposée et subie, l'exemple par excellence de cette soumission paradoxale, effet de ce que j'appelle la violence symbolique, violence douce, insensible, invisible pour ses victimes mêmes, qui s'exerce pour l'essentiel par les voies purement symboliques de la communication et de la connaissance -ou, plus précisément, de la méconnaissance, de la reconnaissance ou, à la limite, du sentiment.[…] On voit bien qu’en ces matières il s’agit avant tout de [...] démontrer les processus qui sont responsables de la transformation de l’histoire en nature, de l’arbitraire culturel en naturel. […] Les apparences biologiques et les effets bien réels qu’a produits, dans le corps et dans les cerveaux, le long travail collectif de socialisation du biologique et de biologisation du social se conjuguent pour renverser la relation entre les causes et les effets et faire apparaître une construction sociale naturalisée (les « genres » en tant qu’habitus sexués) comme le fondement en nature de la division arbitraire qui est au principe et de la réalité. […]Le principe de perpétuation de ce rapport de domination ne réside pas véritablement – ou en tout cas principalement – dans un des lieux les plus visibles de son exercice, c’est-à-dire au sein de l’unité domestique […] mais dans des instances telles que l’Etat et l’Ecole, lieux d’élaboration et d’imposition de ces principes de domination qui s’exercent au sein même de l’univers le plus privé […] Les hommes (et les femmes elles-mêmes) ne peuvent qu’ignorer que c’est la logique du rapport de domination qui parvient à imposer et à inculquer aux femmes, au même titre que les vertus que la morale leur enjoint, toutes les propriétés négatives que la vision dominante impute à leur nature, comme la ruse ou, pour prendre un trait plus favorable, l’intuition. [...]La vision androcentrique est ainsi continûment légitimée par les pratiques mêmes qu’elle détermine : du fait que leurs dispositions sont le produit de l’incorporation du préjugé défavorable contre le féminin qui est institué dans l’ordre des choses, les femmes ne peuvent que confirmer constamment ce préjugé. Cette logique est celle de la malédiction […]. Elle est à l’œuvre quotidiennement, dans nombre d’échanges entre les sexes : les mêmes dispositions qui inclinent les hommes à abandonner aux femmes les tâches intérieures et les démarches ingrates et mesquines (telles que, dans nos univers, demander les prix, vérifier les factures, solliciter un rabais), bref, à se débarrasser de toutes les conduites peu compatibles avec l’idée qu’ils se font de leur dignité, les portent aussi à leur reprocher leur « étroitesse d’esprit » ou leur « mesquinerie terre à terre » , voire à les blâmer si elles échouent dans les entreprises dont ils leur ont laissé la charge, sans pour autant consentir à porter à leur crédit la réussite éventuelle. […] Les dominés appliquent des catégories construites du point de vue des dominants aux relations de domination, les faisant ainsi apparaître comme naturelles. Ce qui peut conduire à une sorte d’auto-dépréciation. […] La violence symbolique s’institue par l’intermédiaire de l’adhésion que le dominé ne peut pas ne pas accorder au dominant (donc à la domination) lorsqu’il ne dispose, pour le penser et pour se penser ou, mieux, pour penser sa relation avec lui, que d’instruments de connaissance qu’il a en commun avec lui et qui, n’étant que la forme incorporée de la relation de domination. [...] Rappeler les traces que la domination imprime durablement dans les corps et les effets qu’elle exerce à travers elles, ce n’est pas apporter des armes à cette manière, particulièrement vicieuse, de ratifier la domination qui consiste à assigner aux femmes la responsabilité de leur propre oppression, en suggérant, comme on le fait parfois, qu’elles choisissent d’adopter des pratiques soumises (« les femmes sont leurs pires ennemies ») ou même qu’elles aiment leur propre domination, qu’elles « jouissent » des traitements qui leur sont infligés, par une sorte de masochisme constitutif de leur nature. Il faut admettre à la fois que les dispositions « soumises » dont on s’autorise parfois pour « blâmer les victime » sont le produit des structures objectives, et que ces structures ne doivent leur efficacité qu’aux dispositions qu’elles déclenchent et qui contribuent à leur reproduction. Le pouvoir symbolique ne peut s’exercer sans la contribution de ceux qui le subissent et qui ne le subissent que parce qu’ils le construisent comme tel. Mais, évitant de s’arrêter à ce constat […], il faut prendre acte et rendre compte de la construction sociale des structures cognitives qui organisent les actes de construction du monde et de ses pouvoirs. […]
[On est porté] à attendre l’affranchissement des femmes de l’effet automatique de la « prise de conscience », en ignorant, faute d’une théorie dispositionnelle des pratiques, l’opacité et l’inertie qui résulte de l’inscription des structures sociales dans le corps. […] [La philosophie de la « conscience »], faute de prendre acte des effets durables que l’ordre masculin exerce sur les corps, […] ne peut comprendre adéquatement la soumission enchantée qui constitue l’effet propre de la violence symbolique. […]
On ne peut attendre une rupture de la relation de complicité que les victimes de la domination symbolique accordent aux dominants que d’une transformation radicale des conditions sociales de production des dispositions qui portent les dominés à prendre sur les dominants et sur eux-mêmes le point de vue des dominants. […]
C’est à travers le dressage des corps que s’imposent les dispositions les plus fondamentales, celles qui rendent à la fois enclins et aptes à entrer dans les jeux sociaux les plus favorables au déploiement de la virilité : la politique, les affaires, la science, etc. La prime éducation encourage très inégalement les garçons et les filles à s’engager dans ces jeux […]. Il faudrait citer toutes les observations qui attestent que, dès la prime enfance, les enfants sont l’objet d’attentes collectives très différentes selon leur sexe et que, en situation scolaire, les garçons font l’objet d’un traitement privilégie (on sait que les professeurs leur consacrent plus de temps, qu’ils sont plus souvent interrogés, moins souvent interrompus, participent plus aux discussions générales). […]
A travers les espérances subjectives qu’elles imposent, les « attentent collectives », positives ou négatives, tendent à s’inscrire dans les corps sous forme de dispositions permanentes. Ainsi, selon la loi universelle de l’ajustement des espérances aux chances, des aspirations aux possibilités, l’expérience prolongée et invisiblement mutilée d’un monde part en part sexué tend à faire dépérir, en la décourageant, l’inclination même à accomplir les actes qui ne sont pas attendus des femmes – sans même leur être refusés. […] [Il existe une] sorte d’effet Pygmalion inversé ou négatif qui s’exerce si précocement et si continûment sur les femmes qu’il finit par passer à peu près complètement inaperçu." […][/large] -
Juléjim
C'est le titre du dernier paragraphe de"Le conflit. La femme et la mère " d'E. Badinter que je viens de terminer.
Comme je suis bon gars, j'en propose les dernières phrases, à toutes celles et ceux qui préfèrent continuer à critiquer E.B pour ses actions Publicis sans lui donner crédit pour son travail d'utilité publique d'intellectuelle engagée auprès des femmes :
"... D'un côté une expérience irremplaçable, l'amour donné et rendu, l'importance de la transmission et de la continuité de la vie ; de l'autre, les frustrations et le stress quotidien, le sacrifice de soi, les conflits inévitables et parfois le sentiment de l'échec avec la culpabilité qui en découle. les vieux parents abandonnés par leurs enfants ne sont pas un épiphénomène. Contrairement à ce que l'on veut nous faire croire, l'amour ne va jamais de soi, même celui de la mère à l'égard des enfants, lesquels devenus adultes, n'ont rien à rendre à leurs parents déficients. En effet, on ne peut donner que ce que l'on a reçu...
L'individualisme hédoniste veut les plaisirs sans les peines, ou à tout le moins privilégier les premiers sur les secondes. Si près d'un tiers des Allemandes (de l'Ouest) restent sans enfant, c'est que le compte n'y est pas. Si elles sont 38,5% parmi les plus diplômées, cela signifie qu'elles trouvent à se réaliser ailleurs que dans la maternité, telle qu'on la leur impose. Que les tenants de la maternité idéale (à leurs yeux) en tirent les conséquences avant qu'il ne soit trop tard.
Pour l'heure, les Françaises échappent au dilemme du tout ou rien. Elles avaient déjà bien résisté aux oukases de certains pédiatres ; tiendront-elles face à ceux des naturalistes, solidement soutenus par les plus respectables institutions mondiales, à ceux des médecins et des infirmières qui les prennent en charge dans les maternités ? Sauront-elles imposer leurs désirs et leur volonté contre le discours rampant de la culpabilité ? Bien que les périodes de crise et d'incertitude ne soient guère propices à la résistance et à la rébellion, il semble que les jeunes femmes continuent largement à n'en faire qu'à leur tête.
Jusqu'à quand ?"
*******************************************
Avec ce livre, E. Badinter pousse un cri d'alarme, à tort ou à raison. Ce à quoi certain(e)s ont cru bon lui répondre par d'autres cris (d'orfraie ceux-là) sans avoir pris la peine, ou le temps, de lire le livre, souvent. Cherchez l'erreur ! -
genevieve poussant hebert
merci Judith ! c'est toujours un plaisir de te lire ! -
alain-b
Pendant que l’on discute de l’élaboration de la fonction du père vis-à-vis de son enfant, on met dans ce pays un homme en prison parce qu’il refuse d’être expulsé vers un pays qu’il a fuit depuis huit ans et qu’il veut s’occuper de sa femme malade et de leurs quatre enfants.
Extrait de l’appel du RSF :
Guilherme Hauka-Azanga est en prison depuis qu’il a refusé son expulsion vers l’Angola le 31 janvier. Car oui, en France, on peut être condamné quand on refuse d’abandonner sa famille : sa femme en situation régulière et ses quatre enfants nés en France, (deux de sa femme et deux du couple). Cela paraît invraisemblable car qui accepterait d’être séparé de ses enfants ? D’ailleurs la Convention internationale des droits de l’enfant précise qu’un enfant a droit à la présence de ses parents auprès de lui. Or, ce père attentif peut être expulsé le jour de sa sortie de prison, prévue le mardi 16 mars.
Article Lyon-Capitale http://www.lyoncapitale.fr/lyoncapitale/journal/Autre-contenu/Breves/Guilherme-Hauka-Azanga-soutenu-par-RESF
Pétition http://www.educationsansfrontieres.org/?page=article&id_article=25824
Ne pas oublier d'aller voter. -
Ellis
Pas si loin de Ferrat, et de notre chroniqueuse : je reviens de la lecture-spectacle d'un texte sobrement intitulé Tarnac, écrit par le poète (et prof à l'ENS) Jean-Marie Gleize, et dédié à Julien Coupat. Profond, serein, apaisé. Un paysage intérieur, entre dévastation et foi en l'avenir, loin de toute fresque héroïque.
Alors merci à JB d'avoir éveillé mon intérêt pour ces ombres insurrectionnelles, et merci à Ferrat d'avoir chanté sa révolte . -
Compunet
petit clin d'œil à la chronique : La femme est l'avenir de l'homme......
FERRAT qui chante ARAGON c'est juste un moment de bonheur....... -
Gavroche
C'est vrai, il aurait pu vivre encore un peu...
C'est vraiment dur...
Et pour parler des femmes, qui d'autre ?
Cela me fait penser à cette chanson de Raoul de Godeswarsvelde, pour laquelle je n'ai pas trouvé de vidéo.
Adieu pour un artiste
Paroles de Bernard Dimey
Musique de M. Blanchot
On est parti te porter tous en terre
Y’avait Michel et Robert et puis moi
Après bien sûr, on est v’nu boire un verre
Et comme de juste on a tous parlé de toi
On a dit tout c’qu’on savait sur ton compte
On a payé tes ardoises en retard
Passé minuit avec chacun son compte
On s’est r’trouvé tout con sur le boulevard
Si vous saviez comme ils sont les artistes
Si vous l’saviez, nous n’en serions pas là
Si vous saviez comme ils sont les artistes
On n’aurait pas enterré celui-là
Toi qu’es parti comme un grand malhonnête
T’as laissé Pierre et Robert et puis moi
On n’a plus rien que l’bourdon dans la tête
Ca fait beaucoup d’orphelins à la fois
Y’a pas idée de filer à l’anglaise
Comme tu l’as fait sans rien dire aux copains
Y fait pas chaud, tu sais, dans la terre glaise
Tu s’ras tout seul et pis tu auras l’air fin
Moi, pour une fois, j’ai fermé ma grande gueule
Tout comme Robert et Michel et puis moi
La joie de vivre, elle est r’partie tout’ seule
Et d’un seul coup avec nos gueules de bois
On a chanté nos chansons tous ensemble
On a fini par boire à ta santé
A la santé de ceux qui te ressemblent
En espérant qu’il nous en est resté. -
Varlin
La femme est l'avenir de l'homme, chantait-il. On vient d'apprendre la mort de Jean Ferrat. -
Claire
A propos de cet article, j'ai plusieurs interrogations :
tout d'abord, pourquoi selon les médias on parle du 8 mars en tant que "journée de la femme" ou "journée des femmes" ou encore "journée internationale des femmes" et enfin journée internationale des droits des femmes" avec il me semble une nette prédilection pour "journée de LA femme"
Il apparait que la dénomination qui est donné à cette journée va considérablement influer sur les personnes invitées à parler au cours de cette journée : La femme, çà a plutôt une connotation éternel féminin, mode parfum et soins de beauté ; Les droits des femmes va plutôt inciter à se pencher sur un/des bilans pas bien folichons de l'avancée des droits des femmes dans le monde.
Et il me semble qu'arrêt sur images pourrait faire cette analyse du choix de ces différents libellés dans les médias
En ce qui concerne les partages des tâches au sein des couples, effectivement cela moi aussi me semble ressortir de la sphère privée et des rapports de domination que l'on accepte plus ou moins sciemment. Toutefois, l'exemple du congé maternité est assez significatif de l'influence de la collectivité sur la sphère privée.
Je m'explique : être en congé maternité n'est pas être femme au foyer, si en congé maternité la plupart des femmes assument non seulement le bébé mais les courses la cuisine...c'est bien parce qu'elles font un amalgame entre être à la maison pour une raison liée au droit du travail et être femme au foyer pour une raison privée.Confondre çà, c'est bien de la servitude volontaire et le partage des tâches abdiqué pendant cette période sera foutrement difficile à regagner. Un homme qui se retrouve à la maison pour une raison liée au droit du travail (perte d'emploi,...) ne se sentira pas dans l'obligation d'assumer seul les tâches du foyer. C'est bien là que l'on peut voir que le social interfère avec la sphère privée
l'égalité des droits dans la sphère sociale comme dans la sphère privée n'est jamais acquise, c'est une vigilance en continu, autant de la part des hommes que des femmes. tant dans la sphère privée que dans la sphère sociale. -
Gavroche
Ben oui, hein, la journée de la femme, fallait bien qu'y'en ait une qui s'y colle à ASI, et bien entendu, une femme... C'est bien connu que c'est les arabes qui parlent de mieux de la discrimination, forcément, ils sont concernés, et que c'est les femmes qui parlent le mieux de leur position dans la société... Les autres, les blancs, et les hommes, apparemment, seraient moins impliqués ... et regarderaient le combat depuis les tribunes, amusés...
Alors, oui, je suis d'accord, UNE journée de « LA » femme tous les ans, c'est peu, surtout pour la moitié de l'humanité...
Mais parler de « servitude volontaire » dans le cas des femmes qui « subissent dans leur sphère privée la domination des hommes », là, ça me fait quand même marrer... Certes, une journaliste, une psychanalyste, une publicitaire riche, ont les moyens culturels, et même disons le, financiers, de « refiler les gants mapa » à leur jules, et peuvent accéder à l'émancipation... Ne serait-ce qu'en payant une femme, encore, de ménage. Je ne sais pas pour Judith, mais pour Madame Publicis, ça ne fait aucun doute.
Et les ouvrières d'usine ? Les femmes de paysans ? Croyez-vous qu'elles peuvent sans problèmes « faire usage de leur liberté » ? Croyez-vous que ce soit aussi simple de dire « y'a qu'à » pour ces femmes là, qui sont la grande majorité des femmes de ce pays ?
« Bon, chéri, t'as pas récuré les cabinets, je me casse en vacances, tu t'occupes des gosses... » Ben voyons...
Madâme Badinter se garde bien de remettre en cause le système qui opprime les femmes (et les hommes aussi, d'ailleurs), tiens donc, elle en profite. Elle préfère assener que si les femmes sont opprimées, « c'est qu'elles le veulent bien ». En clair, les raisons de l'oppression ne sont pas sociétales, mais individuelles... Un peu comme les patrons qui négocient « de gré à gré » avec les salariés, individuellement. Ce qui permet de jeter aux orties le droit du travail.
Bref, comme pour Ilham Moussaid et son foulard, voilà donc sainte Judith partie en campagne, distribuer sa parole, sa vérité, aux guenons que nous sommes. Bobo, prétentiarde (on emploie des termes très chics, « doxa », alors qu'on pourrait dire, je ne sais pas, « préjugés », ce mot là, les cruches le comprennent) et péremptoire... Ce qui serait bien, c'est que les donneurs de leçons foutent la paix aux femmes qui font d'autres choix que les leurs, comme Viobi, par exemple. Ou au moins, condescendent à les écouter.
Quand mon fils est né, ce fut une joie de m'en occuper pendant plusieurs mois...J'ai fait ce choix, toute seule comme une grande. Je n'aurais laissé ce rôle là à personne... Et la recherche du pouvoir ne m'intéresse pas, comme si la relation avec l'autre était domination, combat, conflit, au lieu d'être tout simplement un échange... Je plains sincèrement toutes celles qui voient "l'amour" de cette manière, ça doit effectivement être épuisant. Le « carriérisme » qui va avec ne m'intéresse pas non plus... Je souhaite juste être heureuse, avec mes propres choix. Comme tout le monde, j'imagine.
Mais c'est vrai, j'oubliais, je suis une guenon, moi aussi...
PS : visiblement, vous n'avez pas digéré que Badiou vous pose un lapin... -
Juléjim
Hier après-midi je découvre la chronique et une série de commentaires copieux pour la plupart... Alors commence une lente rumination d'un possible commentaire, contributif, de préférence... En vain.
Aujourd'hui à midi le numéro d'avril de Sciences Humaines dans ma boîte aux lettres ! Avec, vous n'allez pas le croire, le dossier principal consacré au... post-féminisme ! Illico, je me jette dessus comme un mord de faim !
Voici le sommaire du dossier :
- le choix des armes p33
- qu'est-ce que le postféminisme ? p38
- "les femmes ne sont pas les clones des hommes" p40 (entretien avec Susan Pinker*)
- tout gérer, tout concilier p43 (les mères célibataires)
- figures libres (de la "pintade" à la "mère-poule écolo radicale en passant par "la féministe en niqab")
*****************************************
(*) cette psychologue canadienne est l'auteure d'un ouvrage dont le titre français ("Le sexe fort n'est pas celui qu'on croit") trahit le titre original ("The sexual paradox"). Elle porte un regard nouveau et contemporain sur la différence hommes-femmes. Voici un extrait de la fin de son entretien accordé à SH :
SH : Le problème, dites-vous, c'est que la société est encore régie par des normes masculines...
SP : "Dans "Le prix du bonheur" (A. Colin 2007), l'économiste anglais Richard Layard explique pourquoi les salaires et les débouchés des femmes, dans les pays riches, se sont améliorés au détriment de leur bonheur déclaré. Pour moi, la raison en est qu'elles ont atteint des postes répondant à des critères et des ambitions masculines.
Depuis trente ans, les femmes ont combattu pour l'égalité des sexes. Aujourd'hui, elles se rendent compte qu'elles ne sont pas des clones des hommes. Le modèle masculin de réussite ne convient pas forcément à toutes. Elles poursuivent des objectifs variés et différents. L'une des belles victoires de la seconde vague du féminisme a été de leur donner la possibilité de choisir en fonction de leurs intérêts. Elles peuvent si elles le veulent devenir des scientifiques, des professeurs d'universités, des ingénieures, sans être epêchées par des formations inadéquates ou des idées sexistes démodées. Il faut certes continuer à se battre pour l'égalité des chances. Chaque garçon ou fille doit pouvoir avoir l'opportunité de choisir sa vie. Mais il ne faut pas confondre cette égalité d'opportunités avec celle d'une égalité mathématique.
Et la possibilité de choisir librement notre chemin et de changer les choses est un bénéfice des démocraties occidentales postféministes d'aujourd'hui."
Personnellement, je la trouve très optimiste là, la dame. Mais c'est peut-être sa vision et son vécu anglo-saxon qui veut ça ? -
J-net
Merci pour cette chronique riche et engagée.
Elle m'a terriblement rappelée une récente discussion avec ma mère, sur la mise en pratique de nos principes féministes. Nous n'étions pas vraiment d'accord et je pense que notre appartenance à des générations différentes y est pour quelque chose.
En gros elle disait: c'est scandaleux que "la société" (je résume à la serpe) soit aussi indulgente, aussi peu critique, avec les hommes/les machos qui quittent leur femme et les laissent se débrouiller avec les enfants ou n'en foutent pas une rame à la maison.
En gros, je répondais: les hommes n'ont aucune raison de lâcher les privilèges que notre fonctionnement social et privé leur consent, ceux qui sont de bonne volonté le feront spontanément, les autres, il faudra leur arracher l'égalité, non en se faisant plaindre ou défendre par la "société" mais en l'imposant individuellement, pied à pied.
Dans la servitude volontaire, je vois deux choses: la difficulté des femmes à lâcher le pouvoir (certes aliénant, mais pouvoir quand même) que leur donne la main-mise sur la sphère privée -cette difficulté est très certainement le fruit d'un héritage social et culturel qui nous dit que c'est le "devoir" d'une femme d'assumer cela. Et l'inertie de certains hommes face à cette main-mise maternelle. Oui, il doit être épuisant de réclamer l'égalité dans le partage des tâches familiales, surtout quand on obtient peu de résultat et que l'on baigne dans les "scènes de ménage".
Je l'ai déjà dit ailleurs dans le forum, j'ai mis ma conviction profonde qu'il n'y a pas de rôle prédéfini du "père" et de la "mère" en pratique. J'ai décidé d'être "le père", au sens des rôles traditionnels. L'arrivée de l'enfant n'a pas entamé le partage égalitaire des tâches ménagères parce que nous avons, dès le début, intégralement partagé les soins au nourrisson. Je pratique "l'inertie masculine" pour les tâches ménagères qui me rebutent le plus. Parfois, je pense que je sais "mieux" ou que je fais "mieux" avec notre fils, mais jamais je ne pense que c'est parce que je suis sa mère, biologiquement parlant. Je suis convaincue que c'est parce que nous, parents, avons tout partagé de façon égalitaire depuis le début, que je peux penser ainsi.
Cependant, je ne me suis pas débarrassée de la culpabilité de ne pas être une "bonne mère", de ne pas avoir trouvé mon compte dans la fusion mère/enfant, ou plutôt, je ne peux pas m'empêcher de me demander si j'ai privé, en agissant ainsi, mon enfant de quelque chose dont il aurait eu "besoin".
Bref, je partage pleinement l'idée que nous ne pourrons pas imposer de l'extérieur l'égalité dans les foyers. Cependant, un congé de maternité / parental obligatoire à égalité pour hommes et femmes y contribuerait formidablement, et il faudrait, d'autre part, que l'on finisse par prendre des mesures vraiment contraignantes en matière d'égalité professionnelle, pour dissuader les femmes de rester au foyer pour les motifs souvent évoqués (et pas infondés): pourquoi irais-je me fatiguer dans un boulot peu valorisant, mal payé et sans perspective de promotion, alors que je suis si bien chez moi avec mes enfants ? -
poisson
Je me méfis de toute les réflexions qui m'entrainent vers : la victime est coupable.
Cela semble souvent une manière de sortie rapide d'une difficulté. Comme en escalade, face à un passage infranchissable, vas-y que je te pose un rappel, abandon d'un peu de matos, et zip le descendeur. Mais on peut pas dire qu'on a fait la voie, si on n'est pas sorti par le haut.
Et sans vouloir vous affranchir trop, vous empêcher de faire vos vies (quoique certains n'est pas besoin de moi pour se cloisonner dans des peurs de rater!) :
Les histoires d'embrouilles sur les tâches ménagères cachent autre chose!
Un père qui prétend rendre ses enfants heureux, tout en cherchant à rendre leur mère malheureuse, doit quand même se poser quelques questions sur lui-même. Et un père ne doit pas trouver sa place en prenant celle de la mère. C'est tout. -
Varlin
Ah, le couplet sur la servitude volontaire ! La dimension sociale n'existe pas, bien sûr. Ou à peine. C'est pareil dans tous les domaines, d'ailleurs. Tout le monde sait bien que les pauvres sont des cons et les femmes des... Et ça vaut d'autant plus quand c'est une femme qui le dit. -
Robert·
Et les couples homosexuels (hommes ou femmes) qui adoptent un enfant, ils font comment pour les taches ménagères?
Oh pardon, j'oubliais, ce ne sont pas des gens comme nous! -
Oriane
Je suis d’accord sur l’importance de la servitude volontaire, mais de là à dire que les aliéné-e-s sont seul-e-s responsables de leur aliénation…
Sur la distinction sphère privé/sphère publique, j’ai du mal à suivre. Il me semblait que justement, un des grands apports du féminisme, c’était d’avoir démontré le lien entre les deux. Si des femmes dans leur vie privée sont humiliées, dévalorisées, exploitées, leurs envies ignorées, ridiculisées, par leurs pères, amoureux, médecins, psy, ou toute autre personne susceptible d’être porteuse d’un comportement servant le patriarcat, il est important d’en parler publiquement et mener une action politique.
De plus, la partie du texte sur l’inégalité de traitement dans le cadre du congé parental (et là-dessus je suis d’accord) montre bien ce lien, et le rôle de la société dans la situation d’inégalité.
Expliquer les inégalités de fait par la seule attitude des femmes, ça revient un peu à adopter "la rhétorique virile de la droiture et de la responsabilité individuelle" pour reprendre l’expression de L. Wacquant. C’est nier que nous sommes tou-te-s façonné-e-s par notre éducation, nos expériences, notre environnement. Sans tomber dans le déterminisme et occulter notre faculté à réfléchir et changer nos comportements et mentalités, l’école, la famille, les médias, l’environnement social jouent un rôle déterminant dans la construction de nos personnalités. Les attitudes et attentes de l’entourage social, dont les adultes, envers les filles et les garçons sont clairement différenciées pour l’écrasante majorité des gens. De même façon, le langage, entre autres, conditionne notre vision du monde et nos comportements ; et notre vision du monde et nos comportements maintiennent ou transforment le langage.
Le langage, l’accès à l’emploi, le déroulement de la carrière professionnelle, les publicités sexistes, les jouets différents pour les garçons et les filles (avec pour les filles la possibilité de jouer à faire le ménage comme maman, pour devenir bobonne comme elle), les stéréotypes de genre, l’injonction de maternité, etc., c’est aussi de la seule responsabilité des femmes ?
Ok, beaucoup de femmes sont aliénées et ont une part de responsabilité dans leur situation. "A moitié victimes, à moitié complices, comme tout le monde". Mais cette première partie du texte, finalement, est assez proche du discours ultra libéral basique du "Quand on veut on peut", qui conduit à rendre les groupes en situation d’infériorité/domination responsables de leur situation.
Le coup des "oppresseurs" qui ne sont pas responsables de la situation mais qui se contentent d’en profiter et à qui on ne peut donc rien reprocher, c’est vraiment gros…
Bien sûr, certaines femmes devraient commencer par questionner leurs désirs, leurs valeurs, changer leur attitude et montrer aux autres que leurs comportements peuvent être oppressants et perpétuer les inégalités. Leur propre comportement peut parfois conduire à créer les conditions de leur propre exploitation, certains hommes se contentant d’en tirer profit. Mais profiter d’une situation et l'entretenir, c’est aussi être responsable. Nous sommes tou-te-s responsables de nos comportements et relations avec les autres.
Un autre point qui me gène dans le texte, c’est qu'il part du postulat du couple hétérosexuel traditionnel et cette généralisation du modèle de Lafâme. Tout le monde ne s’inscrit pas dans ce modèle marié-e-s - deux enfants - un labrador - un monospace. Toutes les femmes ne veulent pas reproduire la norme dominante qui a toujours représenté une aliénation. Pourtant, les employeurs présument toujours qu’elles veulent avoir des enfants dont elles s’occuperont avec dévotion, et préfèrent ainsi éviter d’embaucher des femmes, par exemple (et il y a un tas d'autres formes d'inégalités, dans le travail ou ailleurs, que le point de vue retenu par le texte ne permet pas d'expliquer).
Par ce postulat de départ, ce texte rejoint paradoxalementt une certaine tendance à la "fêtedesmèrisation" qu'il entend critiquer.
Enfin, même si je n'aime pas du tout la façon dont est récupérée et utilisée la journée du 8 mars (transformée en journée de Lafâme... à quand la journée du noir ? de l'homo ?), les problèmes qu’entend dénoncer cette journée ne concernent pas que la répartition des taches ménagères au sein du couple hétérosexuel avec enfant(s).
Il y a tellement d’autres choses qui m’oppressent que les taches ménagères.
Ne pas être coincée dans le modèle traditionnel avec la charge de la majorité des taches domestiques n’empêche pas d’être agressée par des hommes par sifflement, interjections, discussions forcées, propos humiliants, comme si c’était normal ; qu'on attende des femmes qu'elles soignent leur apparence pour être et paraître de "vraies femmes" ; que les filles soient élevées pour être sages, discrètes, dévouées, douces, et les garçons indépendants, dégourdis, virils, etc ; que les jouets pour enfants apprennent aux filles à jouer à faire la cuisine comme maman et aux garçons à développer leur imagination ; que des corps de femmes soient utilisés par la publicité pour vendre toute sorte de produits, etc.
En plus de la chronique, je suis effarée de lire sur le forum ce message de Judith : "Si je devais fonder un mouvement "féministe", ce serait celui-là : celui qui protège le droit des pères, clef de voûte d'un projet de société égalitaire, mixte, émancipé". Cette opposition entre féminisme et droit des pères me choque et surprend en ce qu’elle ne fait que reprendre des clichés anti-féministes éculés.
Le féminisme n’est pas une opposition homme/femme. Le but est justement pour beaucoup de remettre en cause le patriarcat qui repose sur des oppositions binaires (homme/femme, homo/hétéro, mère/père, etc.). Il faut déconstruire les genres, échapper à ce système bipolaire qui distribue arbitrairement les rôles et pouvoirs, remettre en cause l’idée de complémentarité hommes - femmes qui devraient se compléter du fait de leurs pseudo-différences. Le féminisme (universaliste) ne profite pas qu'aux femmes, beaucoup d'hommes ne se reconnaissent pas non plus dans le genre auquel ils sont censés correspondre ni dans leur rôle de père distant et autoritaire et son affectés par les injonctions de virilité constantes (et la question de la sexualité s’entrelace avec celle des genres).
Je rejoins pleinement Potiron quand elle dit (et sur tout le reste aussi) : "Je veux bien qu’on discute de la place des pères, des pressions virilistes sur les hommes, mais par pitié, ne tombez pas dans ces arguments de pacotille, pétris de mauvaise foi ! Pourquoi faudrait-il dresser deux luttes légitimes l’une contre l’autre ? " -
Dzonkha
Franchement le texte de Viobi m'avait énervée par son côté caricatural, mais sur d'autre critères c'est également le manichéisme des propos de cette chronique de Judith Bernard qui m'agace également.
Personnellement, j'ai longtemps eu le même discours que Judith "pardon mesdames, mais c'est votre affaire" sur la question de la répartition des tâches ménagères. Plus aujourd'hui. Plus depuis que j'ai des enfants. Plus depuis que ma fille ait reçu pour un Noël le set complet de nettoyage (avec balai, serpillière et chariot), le four micro-onde rose (avec inscrit dessus : "girls only") pendant que mon fils recevait un set de bricolage. Encore maintenant, le fait de l'écrire me fait violence, vraiment. Et pourtant les personnes qui ont fait ces cadeaux ne l'ont pas fait intentionnellement et ne sont pas particulièrement rétrogrades. Plus depuis que je vois quantité de livres pour enfants entretenir ces schémas stéréotypés.
Alors, cette question de la répartition des tâches ménagères m'apparaît comme le résultat d'un lavage de cerveaux opéré dès l'enfance et cela relève d'une responsabilité collective.
Citation Judith : "Qu’il faille quinze jours aux femmes, pour se remettre d’un accouchement dont on sort avec l’impression d’être passée sous un camion, la chose va de soi, il s’agit là d’un congé "naturellement" sexué totalement indiscutable. Mais qu’il paraisse évident aux yeux de tous qu’ensuite, c’est à la femme, et à elle seule, d’assurer les premières semaines d’élevage du nourrisson – et donc évidemment toutes les tâches ménagères y afférentes - tandis que monsieur passe tout le jour dehors à la chasse aux revenus, voilà qui ne laisse pas de m’interloquer."
Moi, ce qui m'interloque, Judith, c'est que vous associez "les premières semaines d'élevage du nourrisson" avec "les tâches ménagères qui seraient afférentes" ??! C'est là, il me semble le résultat du processus de lavage de cerveau que je viens de décrire (même si bien sûr je perçois le brin d'ironie que vous y mettez). Pour moi, l'un ne va (ne devrait pas aller) en aucun cas avec l'autre.
Personnellement, je pense que les femmes qui sont mères sont différentes des hommes qui sont pères, ben oui! Les mères ont porté durant neuf mois leur bébé dans leur corps, elles l'ont accouché, elles ont forcément, qu'on le veuille ou non (intellectuellement) un rapport différent au nourrisson, un besoin de proximité différent de celui du père. Alors non, un père n'est pas une mère, ce n'est pas une chose "interchangeable". Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas quantité de manières d'être l'un ou l'autre, que pour le coup c'est une affaire de l'ordre de l'intime, du privé (vous estimez à quinze jours le fait de se remettre d'un accouchement, c'est votre ressenti; acceptez que cela ne soit pas le même pour toutes les femmes; moi, par exemple ce serait plutôt un an, mais c'est très personnel cette affaire!). Et je me méfie terriblement d'une Viobi qui voudrait mettre dans ses cases toutes faites les pères et les mères; mais je me méfie également terriblement de votre discours, Judith, qui fait de même (même si vos cases sont très différentes de celles de Viobi).
Non, s'occuper d'un nourrisson ne va pas avec les tâches ménagères, c'est là toute la subtilité! On peut très bien choisir de prendre du temps pour s'occuper de ses enfants, tout en demandant une répartition équitable des tâches ménagères. Je doute sincèrement que le fait d'instaurer un congé paternel obligatoire résolve le problème de la répartition actuelle des tâches ménagères (tant il est profondément inscrit dans nos schémas mentaux), bien que cela ne ferait pas de mal, j'en conviens.
La différence de rapport à l'enfant entre les femmes et les hommes est infiniment plus complexe que celle du rapport au balai. Dans un cas, il y a quand même une différence de vécu physiologique indéniable qui a de profondes répercutions psychologiques, dans l'autre, c'est juste un schéma dont la société n'arrive pas à sortir. -
Elihah
Et tant que j'y suis je remets le lien vers le papier d'Elsa Dorlin:
"Pourtant, cela ne l’empêche pas de faire la leçon aux «écoféministes», laissant croire que l’écoféminisme - issu des mouvements féministes des pays du Sud - n’est qu’une pratique à la mode pour classes moyennes européennes en mal de verdure. Badinter renoue ainsi avec cette rhétorique ambiguë dont elle a usé et abusé dans Fausse route en 2003, et qui consiste à promouvoir un féminisme qui flirte dangereusement avec un antiféministe notoire. Hier, elle accusait le féminisme de se vautrer dans la «victimisation», aujourd’hui, elle lui reproche de défendre un nouvel «essentialisme» (la femme = la mère). Finalement, le féminisme que Badinter appelle de ses vœux s’adresse à deux groupes et deux groupes seulement : les «bobos» qui se fourvoient dans l’écoféminisme et les jeunes femmes «des quartiers» aux prises avec les intégristes sexistes. "