Start-up : le sujet connecté qui fascine les télés

Sherlock Com' - - Plateau télé - 37 commentaires

Et si on faisait une chronique un peu prospective en mode collaboratif ? Depuis que Macron a parlé de “start-up nation” (prononcez bien “starteup neillechionne”), ces bidules sont partout : dans Le Monde, L’OBS, TF1, M6, France 3, BFM. Tout est start-up : les lunettes, les fraises, les fleurs, les restos. Tu peux même connecter ton vieux ou tes abeilles. De simples producteurs de gadgets ? Plus que ça, la start-up, c’est un état d’esprit, du genre pro-actif et innovant. Immersion dans ce monde merveilleux qui fascine tant les médias.

Y’a pas à dire, c’est la saison de la start-up. Un peu comme certaines variétés de truffes, la start-up d’automne se déguste fin septembre. Rien que cette semaine, elle était au menu du Monde...

De L’OBS...

De l’Elysée... qui a reçu les meilleures start-up qui font de l’hypercroissance qui rend hyper-heureux (à ne pas confondre avec la croissance, qui rend juste heureux).

Tout passe en mode start-up, l’Etat, l’Elysée, les gens. Le monde entier.

Si vous voulez en créer une, il faut vous installer à Lisbonne, c’est le nouvel eldorado…

A moins que ce soit New York, Los Angeles, Miami, l’Afrique, La Chine...

Ou Midi-Pyrénées ?

Ou alors la Bulgarie...

Ah la Bulgarie, un vrai eldorado selon TF1 qui loue les bienfaits du dumping social (on y paye peu de charges)

La start-up, c'est cool

Mais c’est quoi au juste une start-up ? C’est d’abord une entreprise cool comme nous l’expliquent régulièrement les JT. Par exemple, on ne travaille pas dans une start-up, on fait du co-working…voire du co-living.

Oui, on aime tellement bosser dans une start-up qu’on bosse ensemble dans une même pièce et on vit ensemble à l’étage du dessus. Avantage ? Le travail ne s’arrête jamais.

Dans ces bidules, l’ambiance est tellement cool qu’on peut aussi regarder les matches de la coupe du monde de foot au travail.

Certes, on perd en productivité mais ce n’est pas grave. “Sur du court terme, ça peut être aux dépens du travail, mais sur du moyen et long terme, on y gagne, parce qu’on crée une cohésion d’équipe”, assure le patron de “cette start-up de finance participative”.

Un patron “cool” donc, qui a sans doute lu l’article des Echos : “Ma start-up à la télé, décrocher le 20 heures en quatre conseils”. On y apprend notamment qu’il faut envoyer des dossiers de presse papier aux rédactions d’un 20h car “les mails ne sont mêmes pas lus”. Un comble pour des boites cool ultra-connectées.

Un bon sujet pour les chroniqueurs du quotidien

Une start-up, c’est donc vraiment cool. Et c’est censé améliorer notre quotidien. Et qui dit quotidien, dit chroniques du quotidien, dans Télématin (France 2), sur Europe 1 ou BFM. C’est sympa ces start-machins, ça fait de bonnes séquences...

Regardez ce chroniqueur de Télématin avec ces lunettes à trou… Paraît-il que ça évite le mal des transports...

Et des fleurs qui s’allument la nuit, ça vous dit ?

C’est vrai que ça manquait… Invitée d’Europe 1, la start-upeuse a expliqué que cette lumière végétale est possible grâce à un “sérum nutritif” injecté dans la plante, mais attention, “c’est 100% biodégradable”. Lumineux.

D’ailleurs la lumière servira bientôt à se connecter à Internet (c'est fou ce qu'on peut faire avec une start-up). 

Tous les secteurs d’activité sont touchés par ce phénomène. Regardez la santé : Télématin a notamment présenté une start-up qui permet à l’internaute d’avoir un deuxième avis médical sans se déplacer. Et c'est "très sérieux", selon la chroniqueuse :  "c’est un site agréé par la CNIL et qui est remboursée par les mutuelles”. Vu l’expertise médicale de la CNIL, vous pouvez y aller tranquille !

Les start-up, c’est l’info gadget qui détend. Ces inventions font le bonheur des chroniqueurs du quotidien. Mais aussi des marques. A commencer par Orange, qui sponsorise carrément deux programmes télés entièrement consacrés aux start-up.

Des programmes télés financés par Orange

Sur M6, c’est un programme court baptisé “Start-up stories”. Une belle vitrine pour les bidules ultra-connectés utiles au quotidien.

Vous avez peur que votre mamie tombe chez elle ? Vous voulez prendre de ses nouvelles ? Avant, il y avait le voisin ou le facteur qui passait quotidiennement. Maintenant, vous avez Télégraphik, un service qui consiste à mettre des capteurs partout chez la petite vieille. Eh hop, si mamie chute, vous le verrez sur votre smartphone.

Ca marche aussi pour les abeilles. Vous voulez contrôler vos ruches à distance ? C’est possible grâce à “Hostabee”...

Dans le monde merveilleux de la start-up, tous les problèmes se règlent en un clic : il suffit de regarder une appli sur son portable.

Hello les start-up !

Cette fascination pour les start-up, on la retrouve aussi sur BFM Business. Stéphane Soumier, l’animateur star de la chaîne, présente une émission hebdo : “Hello Start-up” (également sponsorisée par Orange). Avec des projets étonnants comme Blook-up. “Une idée de génie” selon Soumier...

Cette start-up vous permet de faire des "blooks"...

Des blooks ? En fait, c’est un service qui propose tout simplement d’imprimer… vos posts Facebook, Twitter ou instagram. L’internet papier, fallait y penser. Croyez Soumier sur parole, “ça donne des livres absolument magnifiques”. En même temps, c’est normal, car c’est plus qu’un livre selon le créateur du service : “C’est une manière de devenir auteur de sa propre vie”, “C’est une trace qui reste pour l’éternité“. Des tweets clash en papier, dans votre bibliothèque, paraît-il que ça s’appelle le progrès. #Cafard

Parfois, ça va dans l’autre sens, on passe du papier au numérique : “Tasty Cloud” propose aux restaurateurs de passer à des menus sur tablette.

 “C’est la possibilité de changer son menu en un clic”, dixit son créateur. Lequel a un argument de vente imparable : “Il n’y a plus de coût lié à l’impression”. C’est vrai qu’entre 30 menus papiers, et 30 iPad, en terme de coût, y’a pas photo...

Même l'armée a l'esprit start-up

Cool, moderne, ultra-connecté, le monde des start-up est vraiment un monde à part. Avec son vocabulaire propre. Une start-up, c’est toujours co-quelque chose : co-working, co-design, collaboratif, connecté. C’est aussi prospectif, innovant, créatif. Et ça touche tout le monde. Même l’armée. Oui, même l’armée a “l’esprit start-up”

Dans un documentaire multi-rediffusé sur LCP et tout à la gloire de l’armée (normal, c’est produit par l’armée), on apprend ainsi que “la culture de l’innovation et de l’anticipation” est dans "l'ADN de l’armée”.

Par exemple, ceux qui conçoivent des tenues de camouflage ne sont pas des militaires qui dessinent des tenues vert-marron. Non, ce sont des "équipiers de recherche" qui sont "créatifs", "curieux", qui ont "un sens artistique" quand il s’agit "de développer des techniques très élaborées dans le domaine du camouflage". Du vert-marron quoi.

Mais attention, pour concevoir ce vert-marron qui s’adapte à tous les milieux, cela nécessite une bonne organisation : "Au sein des forces spéciales, débriefer est une seconde nature. Face à l’apparition de nouvelles menaces, favorisées par les nouvelles technologies, les équipes s’appuient sur les retours terrains pour continuer à garder un temps d’avance". En français dans le texte : chef, faut coudre du vert-marron. Enfin coudre… N’imaginez pas qu’ils font ça dans un atelier de tissage. La voix off nous explique que "dans ce véritable laboratoire d’idées, sont conçus tous types de matériel, des plus high tech ou plus rustiques, avec des techniques plus ou moins artisanales". Artisanal ? Oui, il coud !

Enfin non, il ne coud pas. “On fait de l’intégration textile”, explique, sans rire, un brigadier…

De l’intégration textile. Et c’est comme ça pendant tout le doc. Lequel conclut en beauté en alignant 4 mots compte triple : "En plus d’être force de proposition, les équipes sont également en prospection et travaillent en étroite collaboration avec les entreprises technologiques".

Bref, l'armée est  à la pointe. Et heureusement, car même Daesh est passée en mode start-up...

Connecter le monde et désintégrer le lien social

C’est donc ça l’esprit start-up. Un bidule ultra-connecté qui recrache de la novlangue co-design. Mais sous couvert de vouloir connecter le monde, les start-up désintègrent du lien social. Dans une bonne humeur communicative évidemment.

Sur TF1, on s’extasie devant le premier robot pizzaiolo (120 pizzas par heure). RIP les pizzaiolos.

Sur LCI, on s’épate devant les taxis autonomes développés par une start-up lyonnaise. RIP les taxis.

Et les caissières et les caissiers ? RIP aussi. Une start-up française a conçu un supermarché entièrement automatisé avec des caméras qui font la différence entre les sandwichs au poulet et les sandwichs au jambon. 

C’est fou ça, on ne sait toujours pas répartir la richesse équitablement, par contre, permettre à une caméra de faire la différence entre un sandwich poulet et un sandwich jambon, c’est fait. Visiblement, dans ce monde merveilleux de la start-up, qui fascine tant les médias, on ne met pas les efforts de recherche au bon endroit. 

Mais vous verrez rarement à la télé des critiques contre les start-up (sur la précarité des employé.e.s par exemple).  Et pour cause : la start-up, c'est pratique, ça fait des petits sujets légers en fin de JT. C'est facile à filmer : dans la minute où vous appelez une start-up, on vous ouvre nécessairement les portes. C'est de la production d'infos à faible coût. Mais pas seulement. 

Car les télés sont véritablement fascinées par le modèle start-up. La preuve ? Regardez qui a créé des structures pour leur filer des coups de pouce...

M6...

TF1...

Et même France Télévisions est en train de s'y mettre...

C'est pas cool tout ça ?

Les 3 devinettes

1) Mais quel est cet objet ?

2) Quelle est la particularité de ces fraises ?

3) Quelle est la particularité de ce menu ?

>> Retrouvez chaque midi, dans le forum, un nouvel indice tant que la réponse n'aura pas été trouvée.

>> Chaque bonne réponse rapporte 1 point. Et à Noël, le ou la gagnant.e recevra un petit colis (non piégé) qu'on va remplir au fur et à mesure. Pour cette deuxième semaine, on rajoutera du fil vert et du fil marron (pour pratiquer "l'intégration textile")

>> Classement actuel : 1. Little jo (2 points) / 2. XXX / 3. XXX

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