Yannick Jadot face au bombardement des mots

Daniel Schneidermann - - Alternatives - Le matinaute - 137 commentaires

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Le premier combat d'un écolo aux matinales radio, c'est de lutter contre les mots.

Les mots apparemment innocents, et pourtant tous piégés. Plus précisément, d'esquiver les mots dont il est bombardé, et qui vont sournoisement tenter de le faire passer pour un rêveur à côté de ses pompes, qui-va-faire-perdre-la-gauche-à-lui-tout-seul, et ferait mieux de se désister tout de suite, et de laisser la politique aux grandes personnes, surtout-face-au-danger-du-FN. Handicap supplémentaire : écolo, il est supposé "parler vrai", et chargé à lui tout seul de la noble mission de nettoyer la langue de bois incrustée dans le discours des autres.

Mais cette esquive ne doit pas être hargneuse (surtout ne pas agresser le journaliste-bombardeur, sous peine de mélenchonnisation immédiate). On se souvient des combats homériques de Duflot contre Elkabbach. L'esquive doit être légère, gracieuse, démonstrative. Le bombardé doit mettre les rieurs, et le bon sens, de son côté.

Arrivé en tête de la Primaire des Verts, et donc candidat potentiel à la présidentielle, voici Yannick Jadot dans la Cour des Grands. Terminés les combats dans l'ombre au Parlement européen. Il va subir le feu roulant des Salamé, Cohen, Aphatie, Elkabbach, Bourdin, devoir manier la menue monnaie de l'actualité du matin, se forger une opinion en deux secondes sur le bras de fer Valls-Hollande ou l'autodéfense des policiers, et surtout connaître le prix du pain au chocolat. Ce matin, il est sur RTL face à Elizabeth Martichoux (précise, opiniâtre, qui bûche ses dossiers, certainement pas la pire des bombardeuses matinales).

Martichoux : "Vous approuvez la politique anti-voitures, comme le disent certains, de Anne Hidalgo ?" Jadot, très calme, faisant mine de répondre à une question "normale", sans arrière-pensées : "Mais ce n'est pas une politique anti-voitures. C'est une politique pour la santé". Bien répondu, même si c'est évidemment un combat perdu d'avance. Sur RTL comme sur les autres radios, la politique de la mairie de Paris est définitivement "une politique anti-voitures". La grogne des automobilistes dans l'embouteillage se voit, s'écoute, se filme. Le taux de maladies pulmonaires ou cardio-vasculaires dûes à la pollution ne se filme ni ne s'écoute. Combat éternellement perdu dans les Matinales bombardières (mais heureusement gagnable sur d'autres fronts médiatiques) Il faut tout de même le mener, inlassablement. La même Martichoux, un peu plus tard, à propos de l'écotaxe, lui balance "l'écologie punitive". Jadot : "mais qui est puni avec la pollution de l'air ?" Essai transformé. Vous pouvez revenir en deuxième semaine.

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