Seux, et la "dernière chance" du soldat Vinci

Daniel Schneidermann - - Le matinaute - 43 commentaires

Je bouillais. Je trépignais. Dans la bataille des aéroports, j'attendais fiévreusement Dominique  Seux, le binôme matinal de ce Thomas Legrand qui estime que "franchement", un aéroport ne vaut pas un référendum. Mais que faisait donc Dominique Seux, depuis trois jours ?

En trois jours, ça s'est drôlement enflammé. Le ministre Le Maire (le même qui dirigeait le cabinet de Villepin lors de la privatisation des autoroutes) accuse maintenant les 248 parlementaires partisans du référendum de"faire le jeu des populismes". On ne compte plus les dénonciations "d'un attelage étrange", "baroque", ou "de circonstance",  de la part des mêmes "qui nous expliquent depuis deux ans qu'il faut dépasser les clivages" souligne malicieusement Ellen Salvi, ma consoeur de Mediapart. Et la presse ? Heureusement, les décodeurs du Monde sont là, pour rappeler gravement que "des pro-Fillon ont signé le texte". Merci camarades ! Décodons décodons ! On ne s'en serait pas souvenus sans vous.

Et pourtant, voyez vous ça, l'idée fait son chemin.  Au point, donc, que Seux prend les choses au sérieux. Il en est déjà à appeler le soldat Vinci à se sauver tout seul. Ce serait sa "dernière chance". Fichtre, Dominique, on en est déjà là ?  Et donc, Seux appelle Vinci à en appeler à l'opinion. A mener campagne sur les marchés (les marchés avec des endives et des fromages, pas lémarchés). Et, serviable, Dominique lui fournit au passage l'argument massue : les aéroports, ça ne marche pas. "Les passagers sont-ils satisfaits sur les services, la livraison des bagages, le respect des horaires, le passage des frontières ? La réponse est simple : non !"

Ah, Dominique, comme vous m'exprimez bien ! En 2005, j'ai perdu une valise sur un Paris-New York. Privatisons ! Et ces bagages qui arrivent sur le tapis 23 alors qu'on les attend sur le tapis 19 : privatisons ! Pour ne pas parler de Roissy 2E, ce cauchemar de tapis roulants et de train intérieur : vivement Vinci, qu'il raccourcisse les tapis roulants ! Ou mieux : qu'il le rase et le reconstruise.

"Que Vinci dise concrètement comment, pourquoi, avec quelles idées ils feraient mieux. Leur dernière chance est de le faire devant le pays " appelle solennellement Dominique Seux Mais ils ont parlé, Dominique ! Il suffit de leur demander. On les a entendus ici, leurs arguments, dans les colonnes de votre concurrent Le Monde, le journal de Xavier Niel, gendre de votre propriétaire à vous, Bernard Arnault : toujours davantage d'avions, toujours davantage de passagers, toujours davantage de kérosène, toujours davantage de profit. Il suffit de lire. Que vous faut-il d'autre ?


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